Seul point noir : une application très stricte de ce texte peut conduire des investisseurs à se détourner de l'Algérie. Le projet de loi contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme a été présenté hier devant l'APN, par le ministre de la Justice, garde des Sceaux, M.Tayeb Belaïz. Dans son intervention, le ministre a mis en exergue les dispositions du projet de loi, le durcissement des sanctions à l'encontre de toute personne physique ou morale qui se rend coupable de tels crimes. Plus encore, Belaïz qui a relevé que ce nouveau texte «vise l'adaptation de la législation algérienne aux normes internationales et aux engagements de l'Algérie dans le domaine de la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme», a clairement annoncé la couleur en insistant sur les responsabilités pénales des institutions financières et des professions libérales. Dans le projet de loi, il est, en effet, clairement établi que la non-dénonciation d'opérations frauduleuses de transfert de fonds est passible de poursuite judiciaire. Le ministre de la Justice a également évoqué l'élargissement des prérogatives de la cellule d'information financière, véritable colonne vertébrale du nouveau dispositif de lutte contre ce genre de crime. Entre autres domaines d'intervention, cette cellule indépendante disposera du pouvoir de suspendre une opération de transfert d'argent sur simple suspicion de fraude. La loi fixe la durée du gel de l'opération à 72 heures, à charge pour les enquêteurs de trouver les preuves irréfutables d'intention de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme. Corollairement à cette batterie de mesures destinée à combattre une forme de criminalité transnationale, le ministre de la Justice entend réhabiliter le chèque bancaire en rendant obligatoire le passage par un organisme financier de toute transaction commerciale à partir d'un certain palier «qui sera défini réglementairement». Cela, en plus de l'obligation faite aux banques d'identifier leurs clients et de s'intéresser aux origines des fonds déposés à leur niveau. Au niveau de l'Assemblée, les réserves des députés n'ont pas concerné le fond de ce projet de loi. Nourreddine Fekier, membre de la commission juridique qui a planché sur le texte rejoint les propos du ministre, en relevant notamment que la nouvelle loi, outre qu'elle met en conformité la législation nationale avec les conventions internationales signées par l'Algérie, a une fonction préventive. «La responsabilisation des intervenants moraux et physiques dans l'acte de transfert de capitaux, renseigne sur la volonté des pouvoirs publics de prévenir d'abord toute action criminelle». Cependant, le même député signale qu'en ce qui concerne la réhabilitation des transactions bancaires, «il y a le risque que cette loi se transforme en frein à l'investissement». Fekier explique ses craintes par l'inadaptation du secteur financier national aux standards internationaux en termes de transferts de fonds. «Si la réforme financière traîne à voir le jour, une application très stricte de ce texte peut conduire des investisseurs à se détourner de l'Algérie au vu des lenteurs des procédures bancaires.» Le vote du projet de loi aura lieu samedi prochain.