Poutine attentif au discours de Khameneï en octobre 2007 Les Iraniens vont devoir choisir qui des 6000 candidats - dont 586 femmes - aura un des 290 sièges du Parlement et désigner les 88 membres de l'Assemblée des experts, sur 160 postulants considérés par le Conseil des gardiens de la Constitution comme émérites. Demain sera un jour particulier en Iran où quelque 55 sur les 79 millions d'Iraniens sont appelés à s'exprimer vendredi lors des premières élections depuis l'accord nucléaire de juillet 2015, une consultation essentielle pour le président Hassan Rohani qui cherche à renforcer son camp face aux conservateurs afin de poursuivre les réformes engagées au double plan économique et social. Les Iraniens vont renouveler les membres du Parlement et de l'Assemblée des experts, une instance composée des religieux chargés de nommer et de remplacer au besoin le Guide suprême, les deux étant à ce jour dominés par les conservateurs. Les gains engrangés contre toute attente dans la conclusion positive des négociations avec les Etats-Unis et les autres pays occidentaux sur le nucléaire rendent la tâche moins malaisée, surtout que les réformateurs avaient boycotté les élections législatives précédentes pour protester contre la réélection, à leur sens frauduleuse, du président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad, en 2009, laissant le champ libre au camp rival. Mir Hossein Moussavi et Mehdi Kharoubi, les chefs de file des contestations qui furent émaillées de nombreux incidents à cette époque, dont des manifestations violemment réprimées par les forces de l'ordre, sont toujours en résidence surveillée depuis 2011. Mais les temps changent et cette fois-ci, les réformateurs ont voulu être dans la course à travers l'ensemble du pays et, conscients de la nécessité d'accroître leurs chances, ils ont même élaboré des listes communes avec les modérés - dont certains figurent dans les rangs des conservateurs - pour les deux scrutins. C'est le cas, par exemple, du petit-fils du fondateur de la République islamique, l'ayatollah Rouhollah Khomeiny, Hassan Khomeiny, dont la candidature à l'Assemblée des experts, a été rejetée par la commission chargée d'instruire les dossiers, au motif que ses «compétences religieuses n'ont pas pu être vérifiées». C'est ainsi que le Conseil des gardiens de la Constitution, massivement dominé par les conservateurs, supervise les élections et écarte, au fur et à mesure de l'instruction, les principales figures du camp réformateur obligé de s'en remettre à des candidats moins bien connus. Les Iraniens vont devoir choisir qui des 6000 candidats - dont 586 femmes - aura un des 290 sièges du Parlement et ils iront désigner les 88 membres de l'Assemblée des experts, sur 160 postulants considérés par le Conseil des gardiens de la Constitution comme émérites. Côté pratique, si les résultats des petites circonscriptions et des villes de province seront connus dans les 24h, tel n'est pas le cas de la capitale car, pour Téhéran, il faudra attendre environ trois jours. Ce double scrutin revêt une dimension particulière parce qu'il intervient exactement six semaines après la levée des sanctions internationales contre l'Iran, au lendemain de la signature, le 14 juillet 2015, de l'accord historique sur le programme nucléaire iranien, arraché après deux ans d'âpres négociations, et qui permet de rompre l'isolement du pays dont l'économie a également beaucoup pâti d'un blocus systématique durant une décennie.Depuis son élection en 2013, le président Rohani a accompli des avancées majeures en vue d'affranchir l'Iran de cette contrainte, convaincu de la nécessité de miser sur les investissements étrangers pour une relance de la machine économique qu'il va lui falloir réformer au plus vite, son mandat arrivant à terme en 2017.Or son pari ne saurait être gagné en l'absence de soutiens francs et résolus au sein des deux instances qui vont être renouvelées ce vendredi, alors que les attentes sont énormes, dans les catégories populaires comme dans la classe moyenne, et que le chômage endémique, de l'ordre de 10% en moyenne, affecte en premier lieu la jeunesse dont 25% piaffent d'une impatience légitime. Face à lui, le Guide suprême qui a toléré la conclusion de l'accord sur le nucléaire, l'ayatollah Ali Khameneï, ne cache guère sa méfiance envers les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux dont il ressasse systématiquement les velléités d'infiltration dans les secteurs politique, économique et culturel de l'Iran. Il est le gardien intransigeant des principes et des valeurs de la révolution islamique de 1979. Désigné par le collège de 80 religieux, après un changement de Constitution, il s'adjuge le contrôle total des relations extérieures, de la défense, des services de sécurité, de la justice et il contrôle fortement les médias. Appelant ses fidèles à une mobilisation sans concession, il observe les tentatives contestataires comme celle des anciens présidents, Akbar Hachemi Rafsandjani, pourtant le principal soutien à son élection à ce poste en juin 1989, et Mohammad Khatami, qui sont montés au créneau ces dernières semaines pour mettre en garde contre les extrémistes du courant conservateur. Candidats en la circonstance, ils obtiendraient, en cas de victoire du camp réformateur, un triomphe à la mesure de leur ambition: désigner le successeur de Khamenei, aujourd'hui âgé de 76 ans.