L'Allemagne s'oppose à ce que les pays du G20 s'engagent dans des plans de relance budgétaire, basés sur la dépense publique, pour stimuler l'économie mondiale, a affirmé hier le grand argentier allemand Wolfgang Schäuble, ouvrant la voie à un possible désaccord avec les Etats-Unis. Les tentatives de doper l'activité économique en assouplissant toujours davantage la politique monétaire pourraient s'avérer «contre-productives» tandis que les relances budgétaires «ont perdu de leur efficacité», a mis en garde M. Schäuble, peu avant une réunion à Shanghai des grands argentiers du G20. Alors que la conjoncture mondiale ne cesse de s'assombrir, la Banque centrale européenne (BCE) semble en voie d'agir plus vigoureusement, la Réserve fédérale américaine (Fed) redouble désormais de prudence après un relèvement de ses taux fin 2015, et la Banque du Japon s'est résolue à instaurer des taux négatifs dans l'espoir de stimuler le crédit. Mais «réfléchir à de nouveaux plans de relance n'aboutit qu'à nous détourner des véritables tâches auxquelles nous devons nous atteler», a averti le ministre allemand des Finances, évoquant les besoins de réformes structurelles. «Les politiques monétaires sont extrêmement accommodantes, au point qu'elles pourraient en devenir contre-productives, au vu de leurs effets négatifs», a-t-il fait valoir, lors d'un séminaire de l'Institute of International Finance organisé en marge du G20-Finances de Shanghai. De leur côté, les politiques de relance budgétaire, qui voient les Etats gonfler les dépenses publiques pour soutenir la reprise économique, «ont également atteint leurs limites», a poursuivi M.Schäuble. Des commentaires qui s'inscrivent en contraste flagrant avec le récent appel de Washington à «recourir de concert» aux politiques de relance monétaire et budgétaire. «Des outils puissants quand ils sont utilisés ensemble», a commenté cette semaine le secrétaire au Trésor américain Jack Lew, rappelant que la reprise mondiale ne peut dépendre des seuls Etats-Unis. «Il est de plus en plus important (...) que les pays disposant d'une marge budgétaire l'utilisent pour soutenir leur demande intérieure», avait abondé un haut responsable américain. Mais pour Wolfgang Schäuble, «si vous voulez vraiment que l'économie réelle se renforce, il n'y a pas de raccourci possible sans réformes (structurelles)». La priorité pour les membres du G20 n'est pas de laisser filer davantage leurs déficits, mais au contraire de commencer «prudemment» à assainir leurs comptes publics, a jugé le ministre, fidèle à la ligne allemande d'orthodoxie budgétaire. «Le modèle de croissance fondé sur l'endettement atteint ses limites», a-t-il souligné, raillant la montée des «entreprises zombies» ne survivant que grâce au crédit.