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G20: Refus de toute stratégie monétaire agressive
Publié dans Le Maghreb le 19 - 02 - 2013

Les grandes puissances du G20 s'engagent à ne pas sombrer dans une "guerre économique" et écartent toute stratégie monétaire agressive, ont-elles annoncé samedi à Moscou. La Suisse, invitée pour la première fois, a plaidé pour une réglementation efficace des marchés financiers. "Le monde ne doit pas faire l'erreur, d'utiliser les devises comme instrument de guerre économique", a déclaré le ministre britannique des Finances George Osborne. Il s'est exprimé durant les débats qui ont réuni les grands argentiers des vingt principaux pays riches et émergents durant deux jours à Moscou. Comme les pays riches du G7 mardi, les Etats du G20 s'engagent à "s'abstenir de procéder à des dévaluations compétitives", indique leur communiqué final. "Nous ne fixerons pas de cibles de taux de changes à des fins de compétitivité", promettent-ils. Alors que le G7 affirmait que les changes doivent être "déterminés par les marchés", le G20 se fixe seulement l'objectif de parvenir "rapidement" à un tel système. La déclaration de Moscou souligne que la politique monétaire doit "continuer à soutenir la reprise économique" et appelle à une plus étroite collaboration. "Il faut prendre des mesures pour améliorer la compétitivité de nos économies" mais les gouvernements ne doivent pas viser "la manipulation de la monnaie", a résumé le ministre russe Anton Silouanov. La Russie préside le G20 cette année.
Euro sur la sellette
Tandis que le G20 est censé coordonner les efforts vers une croissance "forte, durable et équilibrée", un repli sur des stratégies nationales peu coopératives risquerait de saper une reprise mondiale balbutiante, souligne le communiqué final. Le G20 semble en partie emboîter le pas au FMI (qui a appelé à lever le pied sur la rigueur budgétaire) et à la Commission européenne. Cette dernière est prête désormais à envisager des délais pour la réduction des déficits. Ses grands argentiers ont ainsi mis l'accent sur des "stratégies budgétaires de moyen terme crédibles" que les pays riches membres du G20 devront élaborer d'ici le sommet de Saint-Pétersbourg en septembre.
Aucun objectif chiffré
A Toronto, en 2010, les Etats du G20 s'étaient engagés à réduire d'au moins de moitié leur déficit public à l'horizon 2013, ce que plusieurs gouvernements ne sont pas parvenus à faire. Toute référence à des objectifs chiffrés et à des échéances précises a disparu du communiqué à Moscou. Qui plus est, ces plans devront être mis en œuvre "en tenant compte des conditions économiques à court terme et des marges de manœuvre budgétaires là où elles existent". "La prise en compte de la situation économique doit nous permettre de ne pas ajouter de l'austérité à la récession", s'est réjoui le ministre français Pierre Moscovici. Le G20 appelle avec insistance les pays "en excédent", comme l'Allemagne ou la Chine, à "développer les sources internes de croissance" pour soutenir leurs partenaires à la peine. Un vœu déjà exprimé par le passé mais qui, de l'avis de plusieurs délégués, n'a pas encore rencontré le succès escompté.
Présence suisse
Invitée pour la première fois à un sommet du G20, la Suisse tire un bilan positif de cette réunion des ministres des finances du G20 à Moscou. La conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf, y a plaidé notamment pour une réglementation efficace des marchés financiers. A l'issue de la rencontre, la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf, a rappelé devant les représentants des médias que seule une concurrence accrue, et non le cloisonnement des marchés, pouvait ramener l'économie mondiale sur la voie de la croissance. Cela implique une réglementation efficace des marchés financiers. Pour la conseillère fédérale, les efforts doivent donc se porter maintenant sur une mise en œuvre systématique des réformes, telles Bâle III, décidées au niveau international. Celles-ci stabiliseront le système financier, renforceront la confiance et généreront de nouveaux investissements, indique un communiqué du Département fédéral des finances (DFF). La Suisse s'est prononcée pour un engagement clair en faveur de stratégies visant à assainir durablement les finances publiques, indique ce communiqué publiés samedi dernier. La Confédération apporte son soutien à l'initiative de la présidence russe du G20 qui propose notamment un régime permettant la restructuration ordonnée de la dette publique. Le communiqué du DFF ne fait toutefois pas mention de la décision du G20 d'écarter toute stratégie monétaire agressive. En Septembre 2011, la Banque nationale suisse (BNS) a instauré le cours planché de l'euro à 1,20 franc. La BNS y a consacré plusieurs milliards pour stopper le renchérissement massif du franc qui pénalisait l'économie d'exportation.
Fiscalité des multinationales
Le DFF n'évoque pas non plus dans son communiqué le souhait du G20 de dispositions conjointes contre les structures permettant aux multinationales de se soustraire à leurs obligations fiscales. Des mesures devront être présentées en juillet par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). La Suisse accueille le siège fiscal de maintes multinationales. Le président de la Banque nationale suisse Thomas Jordan n'a pas été invité à cette réunion, a indiqué la porte-parole du DFF Brigitte Hauser-Suess. En revanche, deux collaborateurs de la BNS y ont toutefois pris part.
Entretiens bilatéraux
A Moscou, Mme Widmer-Schlumpf a souligné que la réforme des droits de vote du Fonds monétaire international devait se faire en tenant compte de l'importance respective des contributions financières des différents membres. Cette réforme devrait aussi refléter les flux commerciaux et financiers internationaux. Avec les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales des Etats du G20, la cheffe du DFF a aussi rencontré le président Vladimir Poutine. Elle a en outre eu l'occasion de mener de nombreux entretiens bilatéraux, notamment avec son homologue allemand Wolfgang Schäuble.
Réunions futures
Sur invitation de la présidence russe, la Suisse participera en 2013 aux réunions des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales des Etats membres du G20. Cette collaboration témoigne des bonnes relations existant entre la Suisse et la Russie, ainsi que de l'importance de la Suisse dans le système économique et monétaire international.
Changes, déficits et fiscalité: les principaux points du communiqué
Voici les principaux points du communiqué final diffusé à l'issue d'une réunion de deux jours des ministres des Finances et banquiers des principaux pays riches et émergents du G20 à Moscou.
Monnaies
"Nous renouvelons nos engagements à progresser plus rapidement vers des systèmes de taux de change davantage déterminés par les marchés et vers la flexibilité des taux de change, afin que ceux-ci reflètent les fondamentaux, et à éviter les désalignements (divergences) persistants de taux de change, et dans cette optique, à travailler en plus étroite collaboration les uns avec les autres de manière à croître ensemble. Nous nous abstiendrons de procéder à des dévaluations compétitives. Nous ne fixerons pas de taux de change à des fins de compétitivité."
Politique monétaire
"La politique monétaire doit viser la stabilité des prix domestiques et continuer à soutenir la reprise économique, en conformité avec les mandats respectifs."
Déficits
"Les économies avancées élaboreront, d'ici le sommet de Saint-Pétersbourg (en septembre), des stratégies budgétaires de moyen terme crédibles. Des plans crédibles de consolidation budgétaire à moyen terme seront mis en place et exécutés en tenant compte des conditions économiques à court terme et des marges de manœuvre budgétaires là où elles existent."
Situation économique
"Les risques les plus extrêmes qui pesaient sur l'économie mondiale se sont réduits et la situation s'est améliorée sur les marchés financiers. (...) Des risques importants persistent et la croissance mondiale est encore trop faible, avec un chômage inacceptablement élevé. Il est nécessaire de poursuivre l'effort en cours pour construire une union économique et monétaire plus forte dans la zone euro et pour lever les incertitudes liées à la situation budgétaire aux Etats-Unis et au Japon, ainsi que de développer les sources internes de croissance dans les économies en excédent."
Fiscalité
"Nous sommes déterminés à définir des mesures pour répondre aux enjeux d'érosion des bases et de pratiques d'optimisation fiscale, à prendre des actions collectives nécessaires et nous attendons le plan d'action complet que l'OCDE nous présentera en juillet".
Système bancaire
"Nous restons engagés à la mise en œuvre intégrale, rapide et cohérente des réformes du secteur financier qui ont été agréées", affirment les ministres et banquiers centraux des vingt principaux pays riches et émergents dans la déclaration finale de leur réunion. "Nous demandons instamment à toutes les juridictions d'adopter la réforme de Bâle III aussi promptement que possible", ajoutent-ils. Ce nouveau cadre réglementaire, élaboré à marche forcée après la crise financière, vise principalement à renforcer les fonds propres des banques de même que leurs réserves de liquidités pour limiter les risques de défaillance. Alors que les règles de Bâle III devaient initialement entrer en vigueur progressivement à partir du 1er janvier, les Européens n'avaient pas réussi en 2012 à trouver un accord, leurs divergences portant notamment sur le montant des bonus des banquiers. La Commission européenne a récemment assuré qu'un accord était proche. Aux Etats-Unis aussi, ce nouveau cadre réglementaire n'est pour l'heure pas appliqué, comme l'avaient annoncé les autorités de supervision américaines à l'automne. "J'ai trouvé très important que l'ensemble des participants, et au premier chef les Etats-Unis, confirment l'intention, pour ceux qui ne l'ont pas déjà transposé dans leur législation, d'adopter l'accord de Bâle III avant la fin de l'année 2013", a déclaré, samedi dernier, le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer, même si cette échéance n'est pas réaffirmée dans le communiqué.
FMI
"Nous nous engageons, conjointement avec l'ensemble des membres du FMI, à obtenir un accord sur la formule des quotes-parts et à finaliser la 15e revue générale des quotes-parts d'ici à janvier 2014. Nous réaffirmons notre engagement à nous assurer que la distribution des quotes-parts reflète mieux les poids relatifs des membres du FMI dans l'économie mondiale".


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