La Soummam a résonné, hier, de ces multiples voix, appelant à plus de liberté et à une citoyenneté majeure. Le «pèlerinage» des ârchs a donc été une réussite, tant au plan de l'organisation qu'à celui de la mobilisation. Ils furent nombreux, dès la veille de la marche, et surtout en cette journée d'hier 20 août, à rallier Akbou, lieu du rendez-vous, de cette marche où fut convoquée l'histoire. Ils sont même partis à pied, depuis Aïn El-Hammam et les villages limitrophes de la wilaya de Béjaïa. D'ailleurs, ce sont les habituels moyens de transport - bus, fourgons aménagés et voitures particulières - qui ont rallié Akbou: le point de départ. Ainsi donc, la wilaya de Tizi Ouzou n'a pas voulu être en reste. Elle a tenu à assurer sa participation comme elle l'a fait durant toutes les actions programmées par le mouvement des citoyens, du mouvement qui a prouvé, brillamment, son ancrage populaire. Bien mieux, dans certaines communes, où les moyens de transport n'ont pas été mis à la disposition des marcheurs, les citoyens n'ont pas manqué d'exprimer leur colère soit en occupant l'APC, comme c'est le cas à Tirmitine, près de Draâ Ben Khedda ou en barricadant la route à Tifra dans la région de Tigzirt. A Tizi Ouzou, où une permanence de la Cadc essayait d'informer les citoyens au fur et à mesure de la progression de la marche, plusieurs citoyens ont marqué leur dépit de n'avoir pu participer à cette action, car, retenus à Tizi Ouzou dans le but de «perturber» l'éventuelle visite du ministre des Moudjahidine, visite annoncée par... la rumeur et attendue de pied ferme. Le but étant, de ne pas permettre au ministre de déposer une gerbe de fleurs au carré des martyrs. La dernière sortie d'un membre du cabinet Benflis a été la cause, d'une certaine façon, de la reprise des émeutes. La Cadc ayant opté pour le «boycott» et même la perturbation de toute visite officielle. Finalement, c'est dans un climat de tension retenue que les ârchs et le wali ont déposé leur couronne. Il fut un temps, pas très lointain, où des enfants de chahids furent arrêtés pour avoir osé rendre un hommage aux martyrs: autres temps, autres moeurs! Par ailleurs, alors qu'à Béjaïa une opération ville morte a accompagné la marche d'Ifri, Tizi Ouzou, en revanche, a été, certes, aux aguets, attendant des nouvelles de la marche, mais dans une atmosphère, relativement détendue. Les commerces, les cafés, les institutions et les entreprises ont vaqué normalement. Mieux, les citoyens, comme c'est un peu le cas ces jours derniers, ont été nombreux en ville. Au niveau des permanences politiques des partis, c'est la même attente. Collés à leurs portables, les responsables partisans vivaient la marche. C'est ainsi que les citoyens ont poussé un ouf de soulagement quand ils ont appris que l'action s'était déroulée dans un calme absolu. Surtout, quand le «clash» annoncé entre les marcheurs et une éventuelle délégation officielle annoncée, pour hier, à Ifri, n'a pas eu lieu. En fait, seuls les citoyens étaient de la partie à Ouzellaguen, les officiels ayant préféré faire dans la sagesse et éviter Ifri pour le 20 août. Avec cette action, le mouvement citoyen vient de démontrer, sur le terrain et puissamment son ancrage populaire. Ce qui va, très certainement, remettre bien des «pendules à l'heure». La balle est désormais dans le camp du pouvoir, l'essoufflement attendu n'ayant pas eu lieu. Tel Atlas se requinquant à chaque fois qu'il touche terre, le mouvement se fortifie à chaque action... Ce qui est sûr, c'est qu'il pèsera de tout son poids sur la rentrée social, un poids que l'on peut mesurer et à l'aune de ces dizaines, voire de ces centaines de milliers de personnes qui ont répondu à l'appel d'Ifri, et aussi à ces soutiens de toutes les forces démocratiques.