Ce n'était pas Fayçal Cheffou, c'est Mohamed Abrini Les membres de la cellule terroriste de Bruxelles comptaient bien frapper de nouveau en France, avec comme cible les transports ferroviaires. Plus de 20 jours après les attentats de Bruxelles qui ont ciblé l'aéroport et le métro de la capitale belge, faisant 32 morts et des dizaines de blessés, les enquêtes se poursuivent sans relâche pour tenter de pister les filières jihadistes en relation avec les attaques commises en Belgique mais aussi en France, le 13 novembre 2015. Le parquet belge a annoncé hier deux nouvelles inculpations pour «assassinats terroristes» en rapport avec la planque utilisée par les auteurs de l'attentat-suicide qui a ciblé le métro. Les deux hommes, Smaïl et Ibrahim Farisi, âgés respectivement de 32 et 28 ans, sont inculpés sous les chefs de «participation aux activités d'un groupe terroriste, d'assassinats terroristes et de tentatives d'assassinats terroristes, comme auteur, coauteur ou complice». Ils auraient loué le logement sis rue des Casernes, à Etterbeek, une commune de Bruxelles, dont la perquisition n'a pour l'instant donné aucun résultat tangible. Pourtant, les conclusions des enquêteurs, relayées par les médias, laissent entendre que cette planque a bel et bien servi au kamikaze de la station du métro Malbeek, le 22 mars, Khalid el Bakraoui. Les deux frères auraient effacé ensuite toute trace de ce passage compromettant, en témoigneraient des images de surveillance vidéo les montrant en train d'évacuer «plusieurs sacs». Partant de ces assertions, les enquêteurs dissertent sur la disparition d'un sac à dos que portait l'un des jihadistes, Oussama Krayem, dont ils disent craindre qu'il ne soit bourré de Tatp, cet explosif très volatil systématiquement utilisé par les kamikazes de Daesh. Sitôt passée l'euphorie née de l'arrestation de Salah Abdeslam, suspect numéro un des attentats de Paris qui ont fait 130 morts, puis de son ami d'enfance Mohamed Abrini, l'homme au chapeau qui a alimenté les fantasmes durant trois semaines sur toutes les télévisions occidentales, le montrant poussant un chariot dans l'aéroport Bruxelles-Zaventem, aux côtés des deux kamikazes, qui ont déclenché les explosions meurtrières, le branle-bas de combat se poursuit, non seulement en France et en Belgique, mais également en Allemagne et dans les pays scandinaves où des liens auraient existé dans les milieux radicalisés. C'est ainsi qu'un individu «récupéré» en Allemagne par Salah Abdeslam, en octobre 2015, et identifié sous le nom de Amine Choukri fait l'objet de recherches d'autant plus intenses que les auditions des inculpés ont confirmé, ces dernières quarante-huit heures, que les membres de la cellule terroriste de Bruxelles comptaient bien frapper, de nouveau, en France, avec comme cible les transports ferroviaires. Selon les aveux de Salah Abdeslam, il s'agirait là de l'objectif initial que leur a assigné un commanditaire depuis la Syrie, mais qu'ils y ont renoncé du fait du durcissement du dispositif sécuritaire français et de la traque à laquelle se livraient les services de sécurité belges. Ainsi, disent les enquêteurs, les attentats qui ont frappé la Belgique figuraient dans le plan B des terroristes, même si le parquet fédéral du royaume se veut circonspect sur la question et refuse catégoriquement de communiquer à ce sujet, appelant à la prudence dans l'interprétation des aveux recueillis auprès des personnes arrêtées cette semaine. Grandi dans la commune de Molenbeek, une banlieue de Bruxelles, Salah Abdeslam, franco-marocain de 26 ans, est en phase d'extradition pour être entendu par les juges antiterroristes à Paris où il a pris part aux attentats de novembre. Mais il doit auparavant s'expliquer sur la fusillade de Forest où un Algérien, Mohamed Belkaïd, a été tué par la police dans l'assaut de l'appartement qui leur servait de refuge. C'est dans un tel contexte miné qu'une commission d'enquête parlementaire belge va se pencher sur les causes des attentats du 22 mars et les «sources» du développement du radicalisme islamiste en Belgique. Autant dire qu'elle va sûrement recenser les mêmes causes et conséquences que celles contre lesquelles les élus locaux et les associations n'ont cessé de mettre en garde, depuis des décennies. La marginalisation, la stigmatisation, l'islamophobie, la ghettoïsation et pour finir, le chômage par exclusion systématique, voilà le cocktail générateur d'une radicalisation rampante que les pouvoirs publics, de gauche comme de droite, n'ont jamais voulu combattre réellement.