Ces révélations font suite au coup de filet antiterroriste et à l'inculpation du suspect-clé Mohamed Abrini dans le dossier des attentats. La cellule jihadiste de Bruxelles avait l'intention de frapper à nouveau Paris mais, se sentant traquée, a décidé précipitamment de viser plutôt la capitale belge, selon les premières révélations de l'enquête. «L'objectif du groupe terroriste était de frapper à nouveau la France», a annoncé le parquet fédéral belge hier, s'appuyant sur «plusieurs éléments de l'enquête», confirmant une information parue dans le quotidien belge L'Echo. Mais, «pris de court par l'enquête qui avançait à grands pas, ils ont finalement décidé dans l'urgence de frapper Bruxelles», poursuit le parquet, lors de la funeste journée du 22 mars, quand une série d'attentats suicides à l'aéroport international de Bruxelles-Zaventem et dans une station du métro avait fait 32 morts et des centaines de blessés. Fin mars, un jihadiste présumé, Reda Kriket, un Français de 34 ans, a été inculpé à Paris dans une enquête sur un projet d'attentat «imminent» déjoué en France. Les rebondissements se multiplient depuis l'arrestation vendredi dans la commune bruxelloise d'Anderlecht de Mohamed Abrini, un Belgo-Marocain de 31 ans, ami d'enfance de Salah Abdeslam, suspect-clé des attentats de Paris capturé le 18 mars à Bruxelles, et de trois autres individus. Lors de ses auditions, Abrini a reconnu être le troisième homme qui accompagnait les deux kamikazes de l'aérogare de Bruxelles, «l'homme au chapeau» que les enquêteurs cherchaient à identifier à l'aide d'images de vidéosurveillance. En conséquence, Mohamed Abrini n'est plus seulement inculpé dans le volet français mais l'est également désormais pour «participation aux activités d'un groupe terroriste, assassinats terroristes et tentatives d'assassinats terroristes» dans l'enquête sur les attentats de Bruxelles. Un mandat d'arrêt européen avait été publié à son encontre par les juges français: possible soutien logistique, Mohamed Abrini a été filmé en compagnie de Salah Abdeslam dans une station-service de l'Oise (nord de Paris) dans la voiture qui servira à convoyer les kamikazes au Stade de France deux jours plus tard. Des traces de son passage avaient été localisées dans deux logements de Schaerbeek, une commune de Bruxelles, qui pour l'un a pu servir de cachette à Salah Abdeslam en fuite et pour l'autre était le point de départ du commando de l'aéroport de Bruxelles. «Confronté aux résultats de diverses expertises, (il) a reconnu sa présence lors des faits», avait expliqué samedi soir le parquet fédéral belge. Il s'agit principalement des images de vidéosurveillance, selon une source proche du dossier. Les enquêteurs avaient pu retracer une partie du parcours de «l'homme au chapeau», de l'aérogare quittée à pied juste avant les explosions à sa disparition deux heures plus tard dans le centre de Bruxelles. Mais Mohamed Abrini a-t-il dit la vérité aux enquêteurs et au juge d'instruction? «Cela ne correspond au mode opératoire de l'EI», le groupe Etat islamique, qui a revendiqué les attentats, a déclaré un spécialiste belge de l'islamisme radical, Peter Van Ostaeyen, estimant qu'il a pu mentir pour protéger le reste du réseau. Trois autres hommes ont été arrêtés le même jour que Mohamed Abrini. Osama Krayem (dont l'identité complète n'est pas confirmée par le parquet), un Suédois de 23 ans qui s'est rendu en Syrie, a été identifié comme le deuxième homme du métro bruxellois, filmé avec Khalid El Bakraoui quelques minutes avant que celui-ci ne se fasse exploser à la station Maelbeek. Il est aussi soupçonné d'avoir acheté les sacs ayant contenu les explosifs de l'attaque de l'aérogare. Les enquêteurs soupçonnent Salah Abdeslam d'être allé le chercher, ainsi que le dénommé Amine Choukri, à Ulm (Allemagne), le 3 octobre quand ils sont, très probablement, rentrés de Syrie. Deux autres hommes, Hervé B. M., un Rwandais de 25 ans, et Bilal E. M., 27 ans, ont également été inculpé dans le volet belge pour avoir aidé Abrini et Krayem.