Le phénomène ne cesse de prendre de l'ampleur Sur le fleuve Internet, on n'arrête pas le progrès. Il charrie tout, y compris une nouvelle faune d'escrocs, du genre 2.0. Si le payement électronique n'a pas fait encore son apparition en Algérie, des sites comme Ouedkniss ont vulgarisé ce type de commerce dans le pays. Vente de véhicules, de brocante, de friperie et produits cosmétiques, de téléphones portables, etc. Il suffit d'un clic pour avoir un large choix et, cerise sur le gâteau, avec des prix défiant toute concurrence. Sauf que le tableau n'est pas si rose que ce qu'il en a l'air. Les arnaques sont légion et souvent bien plus subtiles qu'on ne le croit. Sur le fleuve Internet, on n'arrête pas le progrès. Il charrie tout, y compris des escrocs virtuels. Cette nouvelle faune pullule sur le monde du Web où elle peut sévir plus facilement et avec moins de risques. Pour vous déplumer, il y mettent tout leur savoir-faire: un faux compte électronique, une annonce alléchante, une belle photo, les méthodes et les approches sont imparables. Tenez, il y a par exemple «l'homme au caniche» qui a fait de nombreuses victimes sur la Toile algérienne. Lui ne propose rien à vendre, mais vous offre plutôt son beau caniche, car «il ne peut plus s'en occuper». Il met son annonce sur les sites de ventes ou les pages Facebook spécialisées accompagnée de belles photos du petit animal. Les internautes tombent sous le charme de cette irrésistible bête et se précipitent pour être les premiers à l'adopter. Il choisit les «proies» les plus intéressées et qui paraissent les plus faciles à berner. Il les a informés qu'il se trouve à l'étranger et qu'il fallait que la future victime paye pour qu'il le lui fasse parvenir par un taxi. C'est la moindre des choses pour avoir un chien qui coûte plus de 50 000 dinars! Le numéro d'un compte bancaire est donné. Bien évidemment, ceux qui tombent dans le piège ne reçoivent jamais leur chien qui se «perd» en cours de route avec leur argent et le «généreux» donateur. Ce sont des petites sommes qui sont prélevées, les victimes ne se cassent pas la tête pour le dénoncer aux autorités. Ce qui permet à «l'homme au caniche» de se faire un bon pactole en multipliant les victimes... Et l'escroc s'évapora dans la «nature» «L'homme au caniche» sort de l'ordinaire. Il fourvoie ses victimes en poussant l'arnaque à son paroxysme. Ils sont certes beaucoup comme lui à trouver des arnaques «sophistiquées» pour piéger les acheteurs, mais selon de nombreux témoignages la grande majorité qui succombe à ce péché lucratif utilise des méthodes plus classiques. L'arnaque la plus répandue est la vente de smartphones de contrefaçon en les faisant passer pour des vrais. Les contrefaçons de smartphones sont extrêmement dures à déceler! Tout est copié à l'identique jusque dans les boîtes, logos, accessoires et modes d'emploi. Même ceux qui se définissent comme étant des spécialistes tombent dans le panneau. Salim est l'un deux. «Tout content, je pensais avoir fait une bonne affaire en achetant un Galaxy S5 tout neuf, et à très bon prix», raconte-t-il. «Moi qui suis connaisseur, j'étais sûr que c'était un téléphone original. Quelques semaines après, il a commencé a déconner et j'ai vite compris que je m'étais fait arnaquer. C'était un téléphone rénové», avoue-t-il d'un air des plus confus. «Evidemment, celui qui me l'a vendu avait filtré mes appels. Comme je l'ai acheté sur Internet, je n'avais pas son adresse et je ne connaissais pas son nom», lâche Salim désespéré. Il n'est pas le seul à succomber à cet appât. Houari lui a carrément acheté un téléphone de contrefaçon chinoise pratiquement au même prix que le neuf. «Pour quelques centaines de dinars en moins, j'ai joué au plus malin. Sur Ouedkniss on proposait une dizaine d'Iphone à vendre un peu moins chers que leur prix sur le marché», se souvient-il. «J'ai sauté sur l'annonce de peur de me faire devancer. En rencontrant l'escroc, j'ai bien scruté l'appareil et je n'y ai vu que du feu. Deux mois après il était HS. Le réparateur m'a dit que c'était un modèle chinois...Et bien sûr ni garantie ni moyen de recontacter le vendeur dont le compte Facebook était temporaire», poursuit-il. Les vêtements, parfums et produits cosmétiques de contrefaçon sont également sujets aux arnaques. Comme les téléphones, ils font partie des produits les plus vendus sur la Toile, et de ce fait les plus sujets aux dérives malsaines. Contrefaçon et piège des produits miracles «Ils vous les montrent sur les photos, garantissent qu'ils sont originaux et viennent d'Europe. Ils vous promettent même la livraison à domicile. Quand vous recevez le produit, vous n'avez pas trop le temps de bien l'étudier. Ces escrocs ont en plus l'art et la manière de vous le faire voir comme eux le veulent», rapporte Nassima qui a acheté des parfums de Dubaï aux prix des originaux. «Ils ont failli me brûler la peau. J'ai fait une allergie pour me rendre à l'évidence que je me suis fait berner», a-t-elle pesté en témoignant toutefois que certaines de ses amis ont failli se retrouver à l'hôpital après avoir ingurgité des produits «miracles». «Il y en a qui se sont spécialisés dans la vente de ces produits qui sont censés vous blanchir la peau, la rendre plus belle et soyeuse et surtout vous faire maigrir. Ils vous font certes maigrir mais en vous faisant flirter avec la mort...», rétorque-t-elle en colère. Nous avons retrouvé certaines de ces annonces. Elles vous promettent monts et merveilles. Elles sont écrites de façon approximative. Les photos des produits sont téléchargées du Net. Il n'y a pas d'adresse locale de l'entreprise. Même les numéros de téléphones fournis, sont des numéros Viber. Croyez-le ou non, mais beaucoup tombent dans le panneau et constatent trop tard qu'on leur a vendu de la «dope». Le vendeur une fois parti est évidemment impossible à retrouver! Attention à la trop bonne affaire! Parmi les autres arnaques fréquentes sur le Web, on trouve également celles liées à l'automobile. La vente de voiture d'occasion fait partie des produits qu'on s'échange le plus sur la Toile. Les escrocs et autres margoulins ont donc trouvé le filon idéal. Selon les spécialistes du domaine, les arnaques les plus fréquentes concernent les annonces fictives. «Les plus belles arnaques commencent avec les prix les plus bas. Par exemple une Audi A3 2.0 TDI de 2014 proposée à 170 millions, alors qu'elle coûte le double. C'est un grand classique. La tentation est grande de réaliser l'affaire du siècle. On a du mal à y résister même si on sent l'entourloupe», fait savoir Nounou, un jeune qui s'est spécialisé dans la recherche de bonnes affaires sur le Web. «Le prétexte le plus utilisé est le besoin urgent d'argent. L'escroc vous donne rendez-vous. Il vous montre une belle voiture, vous la scrutez et voyez que rien ne manque. Pour ne pas rater la bonne affaire vous lui donnez un «aârboune», un acompte. Il essaye de la négocier avec vous pour tirer le maximum. Et dès qu'il prend cet argent, vous pouvez être sûr de ne jamais le revoir», rapporte-t-il en avouant par la suite à demi-mot qu'il était déjà tombé dans ce piège. La voiture non-conforme au descriptif est aussi une arnaque bien connue sur le Web. C'est un type d'arnaque qui se développe depuis que les constructeurs multiplient les motorisations et les finitions sur un même modèle. Par exemple, le moteur 1.9 TDI de chez Volkswagen existe en huit puissances: 90,...160 Ch. Il est donc facile pour un vendeur d'embrouiller un acheteur peu au fait de tout cela, et de faire passer un TDI 115 pour un 130...De même, la multiplication des finitions rend difficile de savoir si un équipement est de série ou en option, ce qui change évidemment la cote. Néanmoins, c'est le trafic du kilométrage du compteur qui prend de plus en plus d'ampleur. Si on peut contrôler l'état général du véhicule après un passage chez un tôlier et un mécanicien de confiance, le trafic du compteur kilométrique reste difficile à déceler. «Il vous montre une voiture en bon état, mais le kilométrage est en total décalage avec l'année. L'acheteur se montre sceptique mais le vendeur sort automatiquement des phrases toutes faites: le propriétaire est décédé, un médecin la conduisait, le propriétaire l'a laissée au garage et est parti s'installer à l'étranger... certains vendeurs ont une imagination débordante», fait savoir encore Nounou qui souligne qu'il est très difficile de détecter la fraude. «C'est certes une arnaque sur laquelle on peut tomber en dehors de l'Internet, mais elles sont fréquentes sur le Web car il permet d'être anonyme et disparaître sans laisser de trace», estime-t-il. Arnaques à... l'africaine Eux ce sont les premières arnaques à avoir fait leur apparition dans la Toile algérienne. Vous avez sûrement déjà reçu l'un de ces mails où vous avez gagné une super cagnotte, un SOS ou vous avez été choisi pour hériter d'une forte somme d'argent. Les «arnaques à l'africaine» sont matérialisées par des «spams» ou des échanges sur les réseaux sociaux et les sites de rencontre, ou tout autre moyen d'entrer en contact avec une future victime (un pigeon, appelé «Mugu»). Des SMS ou des messages sur Viber sont aussi envoyés avec un numéro de téléphone pour pouvoir récupérer son cadeau. On est renvoyé vers des numéros surtaxés qui nous bouffent notre crédit ou font exploser notre facture téléphonique. Ce type d'arnaque relève souvent de techniques de manipulations psychologiques mettant en oeuvre de l'ingénierie sociale (l'art du tirer les vers du nez afin de nuire, arnaquer, convaincre, etc...). Les «arnaques à l'africaine» sont massivement utilisées par l'Afrique noire visant à faire croire à une grosse part d'une énorme cagnotte, si vous aidez à transférer (à sortir de son pays d'origine) cette cagnotte (compte bancaire, argent liquide, coffre plein de lingots d'or ou de sacs de diamants, titres de sociétés, etc.). L'aide que croit apporter le pigeon («Mugu») au transfert de la cagnotte va bien engendrer quelques «menus frais à payer d'avance à l'escroc» (frais de dossier, frais de gestion, frais d'avocat, frais d'huissier, nécessité de corrompre un employé de banque, frais de déplacement, taxes, n'importe quoi d'autre qui peut sembler crédible, etc....), mais qu'est-ce que des frais lorsque l'on rêve d'encaisser plusieurs millions d'euros. L'escroc va multiplier les preuves et mises en confiance avec des noms, adresses, titres, sociétés, banques, cabinets d'expertise, notaire, diplomates, numéros de téléphones, adresses e-mail, etc. qui vont, si besoin est, vous confirmer que tout est exact et que tout n'attend que votre paiement des avances pour débloquer l'histoire. Tous ces «contacts», à qui il faut avancer leurs frais, émoluments et honoraires, ne sont, évidemment, que le même et unique escroc. Il finit par vous convaincre comme ça été le cas de Nabil qui raconte avoir transféré près de 900 euros via Western-Union à l'un de ces escrocs. Naturellement, son rêve est resté au stade de...rêve! Amour, storm et chantage Les escrocs du Web ne sévissent pas seulement dans la vente et l'achat. Ils trouvent toujours des moyens pour soutirer du «fric» à leurs victimes. Certains volent des photos de belles filles, les utilisent pour créer de faux comptes, et se font passer pour des demoiselles à la recherche de l'amour ou de bonne compagnie. «Ce genre de procédé n'est pas seulement utilisé que par les hommes, mais même les femmes y ont recours», atteste Djamel qui dirige une entreprise de création de sites Web. Les arnaqueurs se contentent souvent de «storm», un peu de crédit téléphonique. Ils font croire à leurs victimes qu'ils sont en train de vivre une belle histoire d'amour et se font pomper du crédit jusqu'au jour où ils découvrent le pot aux roses après que l'escroc refuse leurs insistantes invitations à un rendez-vous galant. Si certains se satisfont de ces petites sommes d'argent, d'autres vont plus loin! Ils franchissent carrément la porte du chantage. Ils menacent de publier sur des sites pornographiques les photos volées ou de les envoyer à tous les amis de la victime. Ils s'amusent même à jouer aux apprentis sorciers en les «photoshopant», et ce afin de lui faire encore plus peur. Ils réclament en échange des sommes d'argents importantes. Les services de sécurité ont traité plusieurs affaires du genre. On donne l'exemple de cette affaire l'été dernier à Mostaganem. Dans cette petite ville de l'ouest du pays deux jeunes personnes, un garçon âgé de 26 ans et une jeune fille âgée de 24 ans ont été arrêtés par la police pour chantage et extorsion de fonds. Les deux maîtres chanteurs ont subtilisé des photos d'une jeune fille, leur amie sur Facebook, avant de les retoucher pour en faire des photos pornographiques et ainsi la faire chanter. Ils lui ont demandé de «racheter» ces photos. La victime a eu le courage de déposer plainte, mais elles sont plusieurs centaines, voire des milliers à céder à la pression. Fini donc les vols à l'arraché ou les cambriolages. Les nouveaux voleurs sont beaucoup plus malins. Ils utilisent les TIC pour leur sale besogne. Internet, ce monde virtuel où l'on peut rester anonyme est donc devenu le terrain de chasse des escrocs. Ils y sévissent sans risque, et ils n'ont pratiquement pas besoin de bouger de derrière leur ordinateur. Attention donc, l'arnaque vous guette à chaque connection... Des sites électroniques fictifs créés pour fourvoyer les souscripteurs Même l'Aadl a eu son arnaque A la fin du mois de mars dernier, le ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme a pondu un communiqué pour mettre en garde les souscripteurs Aadl 2013 contre de faux sites Internet créés au nom de cette agence publique de promotion immobilière. Ces derniers proposaient à ces souscripteurs le choix des sites dans le cadre du programme location-vente 2013.Ils avaient demandé aux souscripteurs de mentionner le code d'inscription et le mot de passe. Selon les premiers éléments de l'enquête, les auteurs voulaient récupérer les données des souscripteurs pour les utiliser par la suite dans diverses arnaques. Ils sont près de 2000 souscripteurs à avoir été tentés, avant l'intervention des services de l'Aadl. Un autre exemple de ces arnaques des temps modernes...