Le suicide d'un jeune Français, il y a quelques semaines suite à une menace de diffusion d'une vidéo de lui très embarrassante contre le paiement de la somme de 200 euros, est un exemple supplémentaire du caractère grave des escroqueries sur l'internet et de l'ampleur prise par le phénomène des arnaques sur Internet qui prend des formes et des tournures de plus e plus diverses, sophistiquées, dans le même dessein d'arracher le maximum de gains faciles possibles. A Marseille, le 7 janvier 2011, le jeune Cédric, 17 ans, s'est pendu dans sa chambre quatre mois après s'être fait piéger sur un site de Chat. Au Canada, Amanda, 15 ans, s'est suicidée après la diffusion sur les réseaux sociaux d'une vidéo où elle apparaissait nue. La multiplication des situations de détresse dans lesquelles se trouvent les personnes victimes d'escroquerie sur le réseau ravive le débat sur les formes de lutte à déployer pour assurer au maximum la sécurité des usagers de l'internet. Concernant ce jeune Français originaire de la ville de Brest, âgé de 18 ans, celui-ci avait rencontré une jeune fille sur un site de rencontre et en réponse à un spectacle intime qu'elle avait effectué, il s'était également montré dans une situation compromettante. La jeune-fille a alors décidé d'utiliser cette vidéo pour le faire chanter et le menacer de partager la vidéo avec tous ses amis Facebook à moins qu'il ne lui fasse parvenir la somme de 200 euros. La situation, devenue insoutenable pour le jeune homme, l'a conduit à mettre fin à ses jours. L'enquête révélera que l'escroc s'est connecté avec une adresse IP localisée dans un cybercafé d'Abidjan, en Côte d'Ivoire. A l'origine, le phénomène a commencé à prendre de l'ampleur avec les fameuses escroqueries dites « arnaques à la nigériane » ou « scams ». Ces escroqueries prennent la forme de courrier ou courriel dans lesquels un inconnu propose à son destinataire une transaction financière. Généralement une somme importante est en jeu (héritage, message d'une fausse autorité de régulation de l'internet, pot-de-vin, fonds à placer à l'étranger...) et l'aide de la future victime est sollicitée pour réaliser le transfert en échange d'un pourcentage de la somme. L'escroc demande alors à sa victime de lui envoyer une avance afin de payer certains frais (notaires, entreprises de sécurité, pots-de-vin...) et bien évidemment il ne donnera plus aucun signe de vie une fois l'argent reçu. Si les histoires mises en scène par ces scammers sont souvent invraisemblables et les messages truffés de fautes d'orthographe, il n'en demeure pas moins que les personnes les plus crédules sont souvent prises au piège. Le phénomène se développe et prend de nouvelles formes, comme l'apprendront à leurs dépens des usagers français tentés par l'attrait de l'activité commerciale sur le Net. Tout a commencé, selon le journal français Le Télégramme, dans le Var, au sud de la France, en octobre dernier, avec une plainte déposée par une habituée du site web dédié aux bonnes affaires entre particuliers. En effet, après avoir envoyé une tablette numérique par colis à une acheteuse résidant à Brest, elle avait obtenu un reçu Paypal lui indiquant que les fonds avaient bien été débloqués et virés sur ce site réputé inviolable. Or, la vendeuse n'a jamais touché l'argent de la transaction. Immédiatement prévenue, la police s'est aperçue rapidement qu'une trentaine de colis, arrivant des quatre coins de la France et contenant systématiquement du matériel numérique vendu sur le site, devaient tous être réceptionnés par une Brestoise de 29 ans. Après être intervenus au domicile de cette dernière, les enquêteurs ont découvert qu'elle-même est victime de ce qui s'apparente à une escroquerie d'ampleur internationale. Deux semaines avant le début de l'arnaque, celle-ci a cru avoir été recrutée sur internet par une prétendue entreprise anglaise lui demandant de réceptionner les colis avant de les redistribuer au Ghana. Pour cette activité, elle devait, comme stipulé sur un contrat de travail signé, recevoir un salaire brut de 1.400 euros. Problème : l'entreprise n'a jamais existé, le contrat est un faux, au même titre que le reçu Paypal envoyé à la vendeuse varoise... depuis le Ghana. Sur l'enquête internationale, les policiers ont peu d'espoir de retrouver les responsables de l'arnaque. Le Télégramme explique qu'un nom et une adresse ont certes été identifiés au Ghana, mais que la coopération avec la police locale est inexistante, empêchant ainsi tous relais des investigations. Peu de colis ont eu le temps d'être expédiés en Afrique. La majorité des vendeurs arnaqués ont retrouvé leur bien, un stock de marchandises total évalué à 20.000 euros. Un montant qui peut faire sourire comparé aux résultats obtenus par les escrocs à la carte bancaire ou cette nouvelle arnaque dénommée Phising. Une astuce qui consiste à imaginer un stratagème pour soutirer des coordonnées bancaires de clients, généralement fortunés, pour aller sitôt pomper de l'argent de leurs comptes bancaires. Pays de la finance bancaire, la Suisse connaît bien ce phénomène et l'observe, à travers une Centrale d'enregistrement et d'analyse pour la sûreté de l'information (Meliani) qui relève que « des escrocs essaient de plus en plus souvent, par téléphone également, de duper les utilisateurs d'internet et d'obtenir les codes et les données de leurs cartes de crédit. Dans le « Voice Phishing » (hameçonnage vocal), un escroc fait croire au téléphone à une victime qu'il est employé dans une grande entreprise informatique, par exemple Microsoft ou Swisscom. Grâce à cette manœuvre, l'escroc réussit à accéder complètement à l'ordinateur de la victime, ainsi que l'a révélé Meliani dans son rapport semestriel publié en novembre. Le « Voice Phishing » s'ajoute aux formes traditionnelles d'arnaques au phishing sur Internet, qui consistent à envoyer de faux courriels demandant des mots de passe ou invitant à se connecter à des sites bancaires fictifs. Des courriels portant le logo de l'Administration fédérale des contributions ont aussi circulé cet été, relève l'organisme suisse. D'après Meliani, en se présentant sous une couverture tout à fait crédible, l'escroc au téléphone réussit à amener l'utilisateur de l'ordinateur à télécharger un programme permettant d'accéder à son ordinateur à distance. Souvent, les escrocs vendent aussi à la victime un « programme de nettoyage » ou une licence de logiciel, payables par carte de crédit. La victime de ce genre d'escroquerie doit immédiatement faire bloquer sa carte de crédit, recommande Meliani. De plus, il est judicieux de faire contrôler l'ordinateur par un spécialiste et de réinstaller tout le système. Si pour les formes d'arnaques évoquées, l'impact semble limité, du moins à des pertes matérielles ou financières il est une autre forme d'arnaque plus récente, plus répandue, mais dont les conséquences peuvent aller très loin comme ce fut le cas pour le jeune qui s'est suicidé. Il s'agit du piège de l'amour, ou comme certains blogueurs aiment à le nommer « le piège à filles ». Que ce soit pour vivre quelques moments de loisir, trouver l'amour, le Net donne la possibilité d'avoir une vie sociable plus ouverte, diversifiée et développée La rencontre en ligne enregistre un bond important et le succès est universel. En effet, de nombreux sites sont à la portée des dizaines de millions d'internautes. Ils ont diverses alternatives ; se faire inscrire sur des portails de rencontre thématiques, sur des plateformes de discussion sur Internet ou encore sur des sites de petites annonces. Avec ces portails, l'internaute peut désormais nouer contact avec des personnes charmantes et qui pourront, qui sait, transformer sa vie. Il existe néanmoins un usage malhonnête de ce procédé technologique que des escrocs utilisent pour assouvir leurs soif de gain facile. « C'est un phénomène récent estime l'adjudant-chef Vincent Lemoine chargé de recenser les cas déclarés en France. « Dans le cadre d'une rencontre en ligne, la victime est amenée par son interlocuteur à se dévêtir devant une webcam », explique le gendarme. Une vidéo est enregistrée puis le chantage commence : de l'argent ou une diffusion mondiale des images sur Internet. M. Lemoine a déjà répertorié des dizaines de plaintes. Le numéro d'urgence de la police judiciaire gère, lui « 2 à 3 cas par jour » estime Adeline Champagnat, chef adjoint de l'office cyber de la police judiciaire française. Mais la plupart des victimes, honteuses, restent silencieuses. Les effets sont dévastateurs. « En France, deux cas de suicide à la suite de type de chantage sont avérés, explique M. Lemoine. L'extorsion de fonds peut atteindre plusieurs dizaines de milliers d'euros. « Apparemment, nombre d'auteurs se trouvent en Afrique. Le gouvernement de Côte d'Ivoire a ouvert, en septembre 2011, un site de prévention, détaillant le modus operandi des criminels (cybercrime.interieur.gouv.ci). En parallèle, Interpol assure la coordination entre les polices, les maîtres chanteurs opérant internationalement en français ou en anglais. Tout cela sans grands résultats pour l'heure, en raison d'une part de la complexité d'une éventuelle poursuite et, d'autre part de l'ingéniosité des arnaqueurs difficilement repérables.