La mesure, croit-on savoir, serait prise après la proclamation de la réconciliation nationale et de l'amnistie générale. «Il faudra s'attendre à du nouveau concernant la levée de l'état d'urgence dès la reprise de la session de printemps du Parlement algérien.» C'est en ces termes, on ne peut plus explicites, que le président de la commission de défense nationale au niveau de l'APN, Nordine Benzaïme, un élu du FLN, nous a annoncé que ce sujet fera de nouveau parler de lui dans un très proche avenir. D'ores et déjà, notre interlocuteur, que nous avons joint hier par téléphone, nous a confirmé que «la commission (qu'il préside) a tenu plusieurs séances de travail à propos de la proposition de loi abondant en ce sens, déposée par le Msp il y a de cela environ une année». Le représentant du parti de Bouguerra Soltani a, contre toute attente, maintenu sa proposition de loi, ce qui contredit les déclarations faites par le président de ce parti, notamment celles qui avaient été récemment faites à notre journal dans le cadre de sa rubrique «A coeur ouvert avec L'Expression». Toujours est-il qu'avant la clôture de sa session d'automne, le Parlement a bien avancé dans ses travaux puisque le texte du MSP, déposé sur le bureau de l'APN, a été transmis à la commission de défense nationale. Celle-ci, à la suite de plusieurs rencontres, nous apprend encore notre interlocuteur, «a fini par demander à Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur, de venir débattre de cette question, comme le prévoient les statuts de l'APN». Celui-ci, qui fait office de ministre de la Défense depuis la visite en Algérie, durant l'été dernier, de la ministre française, Me. Michèle Alliot-Marie, «a répondu favorablement à cette invitation». Or, de fâcheux et nombreux contretemps ont empêché cette rencontre de se tenir avant que ne soit clôturée la session d'automne du Parlement. Il y a eu d'abord la rencontre, à Paris, des ministres de la Défense des 10 pays représentant les deux rives de la Méditerranée, à laquelle avait pris part Yazid Zerhouni. Par la suite, les préparatifs pour la tenue du congrès du FLN, dit rassembleur, a accaparé le plus clair du temps de notre interlocuteur, dont la commission qu'il préside a été en quelque sorte forcée de faire relâche. Celle-ci a également «souhaité la venue d'Ali Tounsi, directeur général de la Sûreté nationale ainsi que le général-major Ahmed Boustila, commandant en chef de la Gendarmerie nationale». «Ces derniers, nous dit encore notre source, n'ont pas encore donné de réponse par rapport à cette invitation». M.Benzaïme s'empresse toutefois d'ajouter que «cette sollicitation est strictement technique puisque ces deux responsables ne sont invités que pour exprimer leur point de vue, technique, basé sur les constats du terrain, sur l'état véritable de la situation sécuritaire dans le pays». Cela étant, notre interlocuteur, qui se base sur les termes très explicites de la Constitution, insiste pour dire que «la prérogative qui permet la levée de l'état d'urgence est du seul ressort du président de la République». Il ajoute, prenant pour exemple le décret présidentiel de 1998, que « le Parlement est juste habilité à en proroger la durée ». Il convient, cependant, de mettre en avant «l'inconstitutionnalité» de ce décret en question puisque la durée en a été illimitée. Même si un grand vide juridique continue d'entourer cette question, des sources juridiques s'accordent à dire que « le mieux aurait été que cette prorogation se fasse annuellement à travers des décrets successifs jusqu'à ce que la nécessité ne se fasse plus sentir ». Or, dans l'état actuel des choses, l'on assiste à une sorte de reconduction tacite de cette mesure, au moment où les pouvoirs publics oeuvrent à en faire oublier jusqu'à l'existence. Yazid Zerhouni, lors de ses déplacements à l'intérieur du pays, dans le cadre des passations de consignes entre les walis partants et leurs remplaçants, avait maintes fois exprimé sa position sur le sujet en réponse aux nombreuses questions posées par les journalistes. Pour lui, en effet, « le maintien de l'état d'urgence ne gêne en rien la vie quotidienne des citoyens ». Il est vrai que cette déclaration n'est pas dénuée de fondements. Les atteintes aux libertés collectives et individuelles, toutefois, demeurent présentes à cause de cette loi puisque les marches et les rassemblements en plein air sont interdits, alors que ceux qui doivent se dérouler dans des salles fermées doivent obéir systématiquement à des demandes préalables, ce qui s'inscrit en faux contre les règles usitées du pluralisme politique tel que pratiqué de par le monde. Ce n'est pas tout. Des observateurs avertis de la scène politique algérienne s'accordent à dire que « tant que l'état d'urgence sera maintenu, les éventuels investisseurs étrangers auront encore peur de s'aventurer dans le pays, même s'ils constatent de visu une amélioration plus que notable de la situation sécuritaire en Algérie ». Aussi, les prévisions vont bon train qui disent que «le président Bouteflika, constitutionnellement compétent, devrait ordonner la levée de cette mesure dès que se feront sentir les premiers résultats de la réconciliation nationale et de l'amnistie générale». La mesure, dès lors, a toutes les chances d'être prise d'ici à la fin de cette année puisque Bouteflika, fort d'un programme chargé, disposera de très peu de temps pour remettre en marche la machine économique, une fois définitivement et durablement rétablie la paix civile.