«La décision de lever l'état d'urgence n'est pas entre les mains de l'armée mais dépend du gouvernement». La levée de l'état d'urgence ne constituerait pas un problème pour l'armée -quand bien même elle interviendrait dès demain-, avait ajouté le général Lamari mettant ainsi fin à une énigmatique confusion dans les prérogatives. D'où la pertinente question de savoir qui a le droit d'abroger cet arsenal juridique d'exception. Autant la question est pertinente, autant la réponse est simple. L'état d'urgence étant un décret législatif, donc une loi, il ne peut être abrogé que par une autre loi. Pour rappel, l'état d'urgence avait été proclamé par le défunt Haut comité d'Etat (HCE), en vertu du décret présidentiel n°92-44 du 9 février 1992, pour une durée d'une année avant d'être transformé en décret législatif, une année après, soit le 6 février 1993, lorsque le même Haut comité d'Etat avait décidé de proroger l'état d'urgence pour une durée qui n'a jamais été précisée. Dès lors qu'elle fait force de loi, cette ordonnance ne relève plus des compétences du président de la République. De ce fait, le problème ne peut être résolu qu'au niveau du Parlement, seul habilité à légiférer. Selon les juristes, trois cas se présentent aux parlementaires. Dans le premier cas, l'instance législative (APN) peut adopter un nouveau décret annulant celui instituant l'état d'urgence. Mais pour ce faire, il faut au moins qu'une vingtaine de députés proposent cet amendement pour qu'intervienne le vote de la majorité. Pour cela Ali Benflis, secrétaire général du FLN, parti majoritaire, qui s'est prononcé pour la levée de l'état d'urgence, ne devrait pas rencontrer de difficultés à faire voter ce décret. Le second cas ne peut être mis à exécution que dans le cas d'intersession du parlement. A ce moment, le président peut légiférer par ordonnance en vertu de ses prérogatives constitutionnelles (Art. 124). Sa proposition sera adoptée par le parlement lors de sa prochaine session. Enfin le dernier cas, le gouvernement peut proposer un projet de loi dans ce sens en vue de son adoption par le parlement. Telles sont les trois voies réglementaires aboutissant à la levée du décret législatif portant institution de l'état d'urgence. De ce point de vue juridique, on voit qu'il suffit simplement d'appliquer la loi et uniquement la loi mais faudrait-il que la volonté politique existe? Il reste, aujourd'hui, à savoir quelle position adopteront les décideurs, sachant qu'ils sont les seuls à même de proposer un terme à cette situation qui prévaut depuis douze ans.