L'amitié turco-israélienne met dans la gêne les islamistes algériens qui voient en Erdogan l'exemple «de l'islamiste qui a réussi». L'échec de la tentative de coup d'Etat contre Erdogan en Turquie a fait sortir tous les partis islamistes algériens de leur silence. Au pouvoir depuis plusieurs années, Recep Tayipp Erdogan a pu faire émerger son pays en construisant notamment une économie assez performante et au rythme de croissance appréciable. Ces éléments font passer l'actuel président turc pour «un islamiste qui a réussi». De ce fait, les islamistes algériens, tentent de s'aligner sur les réalisations du parti islamiste turc AKP et de s'approprier ses visions en affirmant, pour la plupart, leur soutien indéfectible au sultan de Turquie. Mais, sur les plans régional et international, la Turquie a choisi son camp: celui de l'Otan et Israël. En effet, le plus grand parti islamiste algérien qui, de surcroît, entretient de très bonnes relations avec l'AKP d'Erdogan, à savoir le MSP, a, sitôt la tentative de coup d'Etat rendue publique, condamné l'atteinte à la souveraineté du peuple turc», en saluant ce dernier pour s'être mis du coté du «Président élu». «La position du peuple turc en faveur du président est une leçon pour les régimes arabes concernés car elle démontre que les pouvoirs légitimes peuvent toujours compter sur leurs peuples», estime en effet le MSP qui «réaffirme son soutien au peuple turc et à ses droits légitimes pour la construction d'un Etat moderne». Ce faisant, le MSP fait sciemment l'impasse sur les choix stratégiques de la Turquie dont les positions sur les dossiers régionaux et internationaux sont aux antipodes des choix de l'Algérie. Du côté du FJD de Djaballah, le soutien à Erdogan est également inconditionnel. «Ce qui s'est passé en Turquie est un coup d'Etat qui a échoué grâce à la vigilance du peuple turc qui a répondu prestement à l'appel du président.. Il y a une grande leçon à tirer de cet épisode: un pouvoir légitimé peut toujours compter sur le soutien du peuple», nous a déclaré Lakhdar Benkhalef, numéro deux du parti, en soulignant que le FJD soutient résolument le système Erdogan. «Au FJD, nous soutenons le pouvoir turc et nous soutenons la version qu'il a donnée de la tentative de putsch perpétrée par un groupuscule de l'armée. La Turquie enregistre des performances très soutenues dans tous les secteurs. Le taux de croissance de l'économie turque est de 6% et ses réserves de changes sont de 250 milliards de dollars», a-t-il expliqué. Interrogé sur la normalisation avec Israël que la société civile des pays musulmans reproche à l'Etat turc, M.Benkhalef estime que, sur ce point, son parti n'est pas d'accord avec le pouvoir d'Erdogan. «Nous ne sommes pas d'accord avec la Turquie sur le sujet de la normalisation avec Israël. Nous aurions aimé que la Turquie ne reconnaisse pas l'Etat d'Israël. Mais, dans tous les cas, pour nous, la question palestinienne et l'indépendance de la Palestine sont des causes sacrées. Nous sommes conscients que c'est délicat de soutenir un pouvoir qui reconnaît Israël. Mais nous allons faire de notre mieux pour convaincre nos militants et sympathisants que ce sont les processus démocratique et économique en cours en Turquie que nous soutenons et point la relation de l'Etat turc avec l'Etat sioniste», s'est-il expliqué, gêné. Le président du FAN, Djamel Benabdesslam, a, pour sa part, condamné le coup d'Etat ayant attenté au régime d'Erdogan. «Nous dénonçons et condamnons le coup d'Etat qui a touché au pouvoir d'Erdogan. Mais nous le condamnons non pas par soutien au président turc, mais par principe et par respect à la souveraineté du peuple turc», a-t-il dit. En effet, M. Benabdessllam tient le système Erdogan pour responsable de toute la situation d'instabilité qui prévaut en Turquie. «Erdogan a créé un climat favorable à la confrontation en Turquie. Il est vrai que, sur les plans économique et social, bien des choses ont été faites. Néanmoins, bien des problèmes sont posés dans le pays: l'exclusion de l'opposition et sa répression, la question kurde, etc. De plus, sur les plans régional et international, la Turquie d'Erdogan est impliquée dans tous les conflits, notamment en Syrie, en Irak, au Yémen et en Libye, sans oublier le fait que la Turquie soit en bons termes avec l'Etat sioniste, ce qui lui vaut la désaffection d'une bonne partie de l'opinion publique nationale et, plus globalement, musulmane», a-t-il expliqué.