La «guerre froide» algéro-marocaine avait alimenté une variété de «stratégies de nuisance». «L'ancien homme fort du Maroc, Driss Basri, a été un outil privilégié dans les mains du Palais royal dans ses coups tordus et ses opérations secrètes contre l'Algérie », affirme un hebdomadaire arabe à Londres, citant des révélations qu'avait faites l'ancien ministre de l'Intérieur marocain (1974-1999) aux quotidiens espagnols ABC et El Mundo. Le Maroc servait bel et bien de sanctuaire aux groupes armés algériens en insurrection contre les autorités de leur pays dès 1992, a confirmé Basri qui reprenait lui aussi la fameuse formule de Hassan II qui considérait alors l'Algérie comme un «laboratoire du Maroc», et scrutait avec intérêt et curiosité où aboutirait l'expérience islamiste, et si les insurgés pouvaient s'emparer du pouvoir par les armes. Basri dit aussi que cette prise de position marocaine avait abouti à une rupture des relations avec l'Algérie et à une «glaciation» des échanges entre les deux pays. Les accusations des services spéciaux marocains avaient atteint leur pic de tension avec les attentats de l'hôtel Hasni à Marrakech et l'expulsion des Algériens résidant au Maroc, qui ont quitté le pays les mains sur la tête et «délestés de leurs biens». Ce à quoi avait réagi l'Algérie en procédant à une fermeture des frontières. Toutefois, Basri ne s'attarde pas sur l'épisode de Layada, chef du groupe islamique armé, alors capturé au Maroc et objet, pendant de longues semaines, de manipulations de la part des services spéciaux marocains, qui voulaient l'investir de «nouvelles missions»: liquider tous les opposants du Polisario qui se trouvaient à Alger et intensifier les actes de terrorisme contre son pays. Alger semble suivre avec une certaine ironie les accusations de l'ancien homme fort du Palais royal contre les services spéciaux marocains. Après vingt-cinq ans au pouvoir, au centre du pouvoir, il est sûr que Basri n'a pas tout dit, mais «compte le faire un jour», assure-t-on dans son proche entourage.