La Cour de cassation a annulé leur condamnation prononcée par le tribunal militaire de Rabat en 2010 pour qu'ils soient rejugés par un tribunal civil. Six longues années derrière les barreaux à dénoncer l'injustice. Les prisonniers sahraouis de Gdeim Izik ont fini par faire entendre leurs voix. Le président de la République sahraouie a tenu à leur rendre hommage et salué leur combat caractérisé par une résistance à toute épreuve. «Vous avez affirmé à travers votre résistance incomparable et votre défi à l'arrogance et à la tyrannie de la force d'occupation marocaine, vos grèves de la faim, ainsi que votre refus de se soumettre au colonisateur, malgré les formes d'abus, de torture et de harcèlement», a écrit Brahim Ghali dans une lettre qu'il leur a adressée. «La légalité de la cause, votre résistance et celle de vos compagnons dans les prisons marocaines et le soutien des masses de l'Intifadha de l'indépendance et du peuple sahraoui dans son ensemble, les efforts des organisations et associations des droits de l'homme et des amis de la juste cause sahraouie dans le monde ont imposé aux autorités marocaines de revoir le procès illégal des prisonniers politiques sahraouis», a tenu à souligné le successeur de feu Mohamed Abdelaziz. Des mots percutants qui mettent en exergue la dignité et le courage à toute épreuve qu'ont opposés les condamnés de Gdeim Izik face à leurs bourreaux qui ont tenté en vain de les faire plier sous la torture et à des juges impitoyables aux ordres du Palais royal. Un procès inique fustigé par l'Organisation des Nation unies. Le Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme (Hcdh) s'était dit «inquiet des rapports selon lesquels la plupart des accusés sahraouis ont été torturés ou maltraités pendant leur détention provisoire». Lors d'un point de presse qu'il avait tenu le 19 février 2013, le porte-parole du Haut Commissariat de l'Organisation des Nations unies aux droits de l'homme avait déclaré que: «Le recours aux tribunaux militaires ou d'exception pour juger des civils soulève de sérieux problèmes quant à l'équité, l'impartialité et l'indépendance de l'appareil de justice.» Des inquiétudes confirmées par les rapports d'organisations de défense des droits de l'homme (Fondation Robert Kennedy, Human Rights Watch...). Malgré les déclarations des 24 Sahraouis de Gdeim Izik qui avaient affirmé avoir été torturés, la justice marocaine n'avait pas jugé utile d'enquêter. «S'il était important que justice soit faite suite aux événements du camp de Gdeim Izik, il était également important que les procédures judiciaires soient scrupuleusement respectées selon les normes internationales d'équité des procès», avait relevé le porte-parole du Hcdh, Rupert Colville. Il aura fallu attendre 2016 pour que la justice marocaine daigne «corriger» l'iniquité caractérisée dont elle a fait preuve. «La Cour de cassation marocaine a annoncé, mercredi 27 juillet 2016, la cassation du jugement des 23 condamnés du groupe de Gdeim Izik et le renvoi de l'affaire devant une juridiction pénale de droit commun, la cour d'appel de Rabat», a indiqué dans un communiqué l'Association des Amis de la République arabe sahraouie démocratique dans un communiqué. Il aura fallu attendre plus de trois années pour que la requête aboutisse. Les pourvois en cassation ont été déposés au lendemain même du jugement qui est tombé le 17 février 2013. Il a «fallu presque 6 ans depuis leur incarcération à Rabat-Salé (en 2010, Ndlr), à plus de 1000 km de leur pays, le Sahara occidental occupé par le Maroc, (et) plus de 3 ans depuis leur condamnation à de très lourdes peines (de 20 ans à perpétuité) par un tribunal militaire, au cours d'un procès qui les a condamnés sans preuve, si ce n'est des aveux extorqués sous la torture», a précisé l'Aarasd. Reste à savoir maintenant jusqu'où le pouvoir marocain peut aller pour faire amende honorable. Le discours que vient de tenir le souverain marocain lors de la célébration du 17 ème anniversaire de son accession au trône indique qu'il ne se montrera pas indulgent avec ceux qui luttent pour l'indépendance du Sahara occidental. Une ligne de démarcation qui fixe les limites de la clémence de Sa Majesté et tout le chemin qui reste à parcourir à la justice marocaine pour qu'elle soit souveraine.