«Nous exigeons la levée de l'interdiction de la projection de Vote off» peut-on lire sur la déclaration officielle signée suite au débat de jeudi dernier sur la liberté de création. La cinémathèque de Béjaïa a abrité jeudi un riche débat animé consacré à la loi sur le cinéma, la liberté de création et d'expression. Ce débat rappelons-le, devait avoir lieu en présence de Faycal Hammoum auteur de Votre off et de son producteur Yacine Bouaziz qui, au final ont choisi de ne pas venir. Ce film qui est censé nous plonger dans les coulisses de l'élection présidentielle de 2014 a fait l'objet d'un refus d'octroi d'un visa culturel de la part de la commission de visionnage ce qui a acculé l'association Project'heures, organisatrice des Rencontres cinématographique de Béjaïa à l'annuler. Dans notre précédente édition Faycal Hammoum avait réagi avec amertume, mais tout en gardant espoir sur la suite des événements alors qu'il venait d'affirmer que «le ministère de la Culture refuse de délivrer une autorisation de projection.» En réponse à ces déclarations le ministère de la Culture a tenu à apporter ses clarifications affirmant qu'il n'est «à aucun moment intervenu dans la programmation de ce film», soulignant que «cette décision relève des compétences et attributions exclusives de la commission de visionnage, seule habilitée à fournir des autorisations de tournage et de projection... cette commission composée d'experts et de professionnels du cinéma, a délibéré favorablement sur 23 films à l'exception du film Vote off qui comporte des contenus portant atteinte aux symboles de l'Etat et de sa souveraineté.» et de conclure: «La décision de la commission ne relève aucunement des considérations liées à l'art cinématographique, mais procède de l'application de la loi.» indiquant par ailleurs que «le ministère de la Culture a encouragé et soutenu l'organisation des Journées cinématographiques de Béjaïa et considère cet événement comme un important acquis dans le domaine du cinéma et de la culture en général». Dans leur allocation inaugurale au débat, Abdenour Hochiche président de l'association et Lilia Aoudj directrice artistique se sont interrogés quant à la nécessité de «manifester ses idées et son mécontentement dans un cadre légal tout en contestant l'arbitraire de manière apaisée», et ce en s'adressant au public d'abord qui a le droit de savoir ce qui se passe. «Le réalisateur n'a pas voulu venir et nous respectons son choix» dira Abdenour Hochiche qui relèvera le caractère «pas très clair» de ce «visa culturel» qui n'a rien à voir avec le visa d'exploitation commerciale des films comme cela existe au niveau de la loi sur le cinéma. Et de faire remarquer à propos des subventions du ministère de la Culture: «Nous allons continuer à nous battre comme toujours pour les avoir car l'argent qu'on reçoit est celui des Algériens qui servira à faire en sorte de montrer des films aux Algériens. On ne doit rien à personne.»Beaucoup de choses ont été dites lors du débat de la part de l'assistance, notamment qu'il aurait fallu projeter le documentaire malgré tout «et advienne que pourra». A cela, Abdenour Hochiche attestera que montrer le film dans ces conditions aurait eu des répercussions sur l'association et les rencontres. «Notre décision est motivée par l'envie de sauvegarder cet espace qui sert justement à ouvrir le débat. Pour nous c'était la meilleure décision.» Pour le jeune écrivain Anis Saâdoun, présent parmi le public «il faut trouver les moyens de contre-attaquer au lieu de pleurnicher. Il faut qu'on remue les méninges et ne pas rester passifs.» D'autres ont proposé comme solution de riposte de faire passer le film sur YouTube. A la fin de ce débat, une déclaration et une pétition ont circulé au niveau de la salle de la cinémathèque de Béjaïa afin de contester la décision de la commission de visionnage qui a interdit de faire diffuser le film Vote off aux 14es Rencontres cinématographiques de Béjaïa. Dans ce texte, où il est question de «soutenir le cinéaste Faycal Hamoum et les artistes», il est évoqué la «mobilisation continue» afin de «porter avec force et conviction la création artistique et à préserver les espaces de rencontres, de débat et de libertés» et de dénoncer «cette énième atteinte à la liberté de création et d'expression». «Nous exigeons la levée de l'interdiction de la projection de Vote off. Nous nous estimons suffisamment conscients et murs pour apprécier une oeuvre quelle qu'elle soit et refusons ce paternalisme désuet et absurde», pouvons- nous lire dans cette déclaration. Pour notre part, nous déplorons l'absence des principaux concernés, mais aussi le manque de solidarité de la «famille» ou corporation artistique et cinématographique qui brille souvent par son absence.