Elles sont victimes du séisme et... de l'erreur humaine Victimes du séisme du 21 mai 2003 et habitant la commune d'Hussein Dey, ces citoyens se sont rapprochés de notre rédaction pour dénoncer l'injustice et revendiquer leurs droits. Ils veulent recouvrer leur dignité. En effet, deux années après la catastrophe qui a frappé notre pays et causant d'incommensurables dégâts, notamment au niveau des habitations, et longtemps après, plusieurs familles victimes de cette catastrophe naturelle, ne sont toujours pas recasées et occupent des lieux dépourvus de toutes commodités. C'est le cas de ces dix familles d'Hussein Dey, qui vivent depuis la catastrophe sous les gradins du stade Zioui, faisant face à un quotidien dont le moins que l'on puisse dire est qu'il est cauchemardesque. Les faits remontent à l'année fatidique de 2003. Plusieurs bâtisses sises à Hussein Dey ont été gravement endommagées, ce qui représentait un véritable danger pour les locataires. Les autorités locales procédèrent tout de suite à la démolition de certains immeubles classés rouges par les experts. La bâtisse du 6, rue de Tripoli et celle du 2, rue Mohamed Hamlet, figuraient sur la liste de destruction. Les locataires de ces immeubles ont été évacués et relogés par la suite dans l'infrastructure sportive pour un délai maximal de quinze jours, avec une promesse de relogement n'excédant pas cette durée, juste le temps que prendra le recensement et préparer les chalets... Hélas ! Deux années après, la souffrance de ces citoyens demeure comme au premier jour du désastre, intacte. Lors de notre passage sur les lieux, nous avons constaté que ces familles vivent effectivement dans des conditions lamentables. Sous les gradins du stade Zioui, ces familles n'ont trouvé comme solution que de dresser des tentes de fortune confectionnées à l'aide de draps et de couvertures, afin de préserver ce qui leur reste d'intimité dans un espace ne dépassant guère les six mètres carrés. Hommes, et enfants y évoluent... Victime d'une erreur humaine Rencontrée sur les lieux, la famille Kheireddine est très connue au niveau de cette commune du fait du malheur qu'elle endure «par la faute d'un haut responsable». Jadis, cette famille vivait dans une grande maison au 6, rue de Tripoli, Hussein Dey. Elle s'est retrouvée du jour au lendemain sans toit. En effet, après avoir perdu son fils, égorgé par des terroristes en 1995 dans leur ancien quartier Diar El Djemaâ, cette famille s'est réfugiée à Hussein Dey après avoir bénéficié d'un lot de terrain. Ainsi, elle a pu construire une maison pour abriter enfants et belles-filles. Mais, suite au séisme, plusieurs bâtisses ont été gravement touchées, dont la leur. Les autorités locales ont procédé à la démolition des bâtiments vétustes et classés rouges. «Quand nous avons constaté que l'opération de démolition allait nous toucher, nous avons pris attache avec l'ancien wali délégué pour lui faire comprendre que la bâtisse qui se trouve à proximité de notre maison risque de s'effondrer sur nous. Cependant ce responsable nous a assurés que nous ne serons pas du tout touchés... et la catastrophe arriva. Nous avons perdu notre maison et toutes nos affaires. Depuis, nous vivons les conséquences d'une décision irresponsable, d'une médiocre gestion», nous déclare Fatah, l'un des fils. Celui-ci ajoute que ce même responsable leur a promis des chalets provisoires pour recaser 16 personnes. «Quand nous avons visité le chalet qui se trouvait à Bordj El Kiffan, nous avons été surpris par son exiguïté, il était sur un espace de 4 m²», nous révèle amèrement le grand fils, déjà père de trois enfants et qui a perdu son travail pour qu'il puisse protéger sa famille. Le malheur ne cesse de prendre de l'ampleur «Je veux rentrer chez moi, j'ai peur de rester ici ! Tous les enfants ont une maison sauf nous», ne cesse de crier un petit enfant, accroché à sa mère, qui venait de nous montrer les photos de leur ancienne maison. Effectivement, la vie sous les gradins d'un stade n'est pas du tout facile, notamment en hiver, où le froid et l'humidité aggravent leur situation dans cet endroit invivable. Ce qui a rendu la plupart de leurs enfants asthmatiques, nécessitant des médicaments et des évacuations en urgence vers l'hôpital. Ici l'hygiène laisse à désirer car ces familles utilisent les sanitaires du stade. L'eau est disponible mais les tuyaux de canalisation sont dans un état lamentable et surtout un refuge pour les rats. «La misère a tué notre mère» Subissant désespoir et malheur, la mère de la famille Kheireddine est décédée la semaine dernière suite à un arrêt cardiaque. Elle ne pouvait plus supporter de vivre dans ces conditions qui ont duré plus de deux ans . Un voisin, sinistré lui-même, nous apporte son témoignage, expliquant que la défunte a été fragilisée par cette situation. Ce qui a causé sa mort. Ainsi, cette famille se sent aujourd'hui dépourvue de sa citoyenneté et de ses droits de vivre sous un toit convenable. «Notre père est traumatisé. D'ailleurs, il a eu une dépression nerveuse nécessitant son hospitalisation. Si la situation continue à persister, nous risquons de le perdre comme cela a été le cas pour notre mère», nous déclare amèrement un autre fils. Voulant avoir plus de détails sur le sort de ces familles, nous avons pris attache avec le wali délégué. Ce dernier nous informe que les sinistrés de Zioui sont recensés et qu'ils bénéficieront de chalets dans le prochain programme. Ces déclarations sont loin de rassurer ces familles qui les ont qualifiées de fausses promesses. «Nous avons été déjà victimes de négligence et de mépris et ce, pour longtemps. L'accueil qui nous été a réservé par ce nouveau wali ressemble à ceux des ex-responsables. Notre espoir reste mince pour nous recaser», s'insurge Mlle S. K., qui ajoute qu'ils feront appel à la justice s'ils ne recouvrent pas leur dignité et leurs droits.