«L'opposition est aujourd'hui en recul par rapport aux idéaux et aux objectifs qu'elle s'est fixés à Mazaffran. Elle est complètement déconnectée de la société» Une nouvelle race d'hommes politiques de l'opposition est en train de mettre en place un nouvel espace de concertation en prévision d'«une conférence nationale des libertés». Alors que l'Icso, qui regroupe plusieurs partis et personnalités politiques, tient sa réunion aujourd'hui pour passer en revue la situation du pays et se donner un cap, notamment en prévision des élections législatives d'avril 2017, certains de ses membres, de concert avec des opposants jusque-là hors circuit, sont en train de peaufiner un projet de conférence nationale des libertés qu'ils prévoient de tenir vers la mi-octobre. Autrement dit, l'opposition est en train de se faire pousser une nouvelle tête. En effet, cette conférence se veut, selon ses initiateurs, un espace de débat et de concertation entre tous les opposants qui militent sincèrement pour un changement pacifique du système. Mais pas seulement. Car, assure-t-on, elle est loin d'être une simple réédition de la Cltd et de l'Icso et compte aller bien au-delà des échanges entre partenaires politiques et des constats. «L'opposition est aujourd'hui en recul par rapport aux idéaux et aux objectifs qu'elle s'est fixés à Mazaffran. Elle est complètement déconnectée de la société dont elle est censée porter les aspirations et accompagner les luttes dans une perspective de transition démocratique. Certains de ses membres donnent l'impression de vouloir séduire le pouvoir et non pas les citoyens. De ce fait, malgré la bonne volonté de quelques partis, il est illusoire de croire en une redynamisation de l'Icso», nous a confié un des initiateurs de cette conférence nationale des libertés qui commence à prendre forme. «Nous avons pris contact avec plusieurs partis politiques dont certains sont agréés et d'autres non. Nous sommes également en contact avec des associations, des syndicats et des personnalités nationales qui ont affiché leur disponibilité à prendre part à l'initiative et à l'alimenter durablement. Des partis comme l'UDS, Nidaa El Watan, Jil Jadid, le PRA, l'UCP, des personnalités comme Saïd Morsi, Rachid Nekkaz, etc, sont partie prenante dans cette initiative qui commence à prendre sérieusement forme.», nous a-t-on confié également. Interrogé sur les éléments qui distinguent cette nouvelle instance politique de celles qui existent déjà, notre interlocuteur a indiqué qu'il «s'agit d'un regroupement non seulement des états-majors des partis comme c'est le cas pour l'Icso et la Cltd, mais de tous les citoyens désireux de militer pour un changement pacifique dans le pays». «La conférence nationale des libertés aura un prolongement dans toutes les wilayas et dans toutes les communes. Elle ne sera pas un espace de rencontre des états-majors des partis. Elle se veut au contraire une jonction avec les luttes populaires qui se font dans toutes les régions du pays», précise notre source avant d'ajouter «les partis doivent être la locomotive de la vie politique du pays. Ce sont les partis politiques qui suscitent des mouvements, qui les coachent et qui les orientent. Chez nous, c'est le contraire et, souvent, les partis se contentent d'adopter des positions de principe en affichant leur solidarité avec les syndicats, les associations de défense des droits de l'homme, les mouvements citoyens de mécontentement, etc. Il est questions pour nous de changer les donnes et d'être les porteurs des solutions et les acteurs principaux du changement». Cette initiative qui se met en branle et dont les principaux acteurs appartiennent à une nouvelle génération d'acteurs politiques peut créer la surprise d'autant plus qu'elle se veut ouverte, dynamique et qu'elle inscrit sa démarche dans le long terme. En effet, il est dit par certains de ses membres que le seul critère d'éligibilité à cette conférence reste l'engagement pour un changement pacifique et démocratique du système. Pour le reste, chacun des animateurs de cette conférence reste maître de sa démarche. Ainsi, Ali Benouari, Soufiane Djilali, Zoubida Assoul, Rachid Nekkaz, Karim Tabbou, tous représentants d'une nouvelle race de responsables politiques sont en train de se tracer un nouveau chemin et d'offrir une nouvelle perspective à l'opposition. L'espoir y est. Le risque aussi. La mise en place d'une nouvelle instance de l'opposition risque de fragiliser cette dernière. Car, bien que les uns comme les autres assurent que leurs travaux ne peuvent être que complémentaires, les luttes de leadership et les divergences idéologiques risquent d'installer l'opposition durablement dans la précarité organique et le flou politique.