Ce qui devait arriver... arriva! Deux pays africains ont annoncé leur retrait de la CPI. La Cour pénale internationale (CPI) a tant tiré sur le fil qu'il a fini par casser. Il est évident que la justice africaine, n'est ni équipée ni ne dispose [juridiquement] d'une indépendance de fait lui permettant d'appliquer la loi dans toute sa rigueur, y compris pour juger des députés, ministres, ou même un chef d'Etat, afin d'assurer l'Etat de droit. Nous n'en sommes pas là. Il ne sert à rien d'ignorer ou de minimiser cet état de fait de la justice africaine. Cela étant, la CPI n'est pas non plus un tribunal caractéristique créé spécialement pour juger les notabilités africaines. Cependant, c'est l'impression que donne la CPI qui s'acharne - à tort selon ses critiques - sur l'Afrique, jusqu'à soulever le courroux des dirigeants africains et de leur organisation, l'Union africaine (UA), qui commencent à douter sérieusement de son impartialité. En effet, huit enquêtes sur les dix que mène la CPI, concernent des pays africains [RD du Congo, Ouganda, Kenya, Mali, Libye, Centrafrique, Côte d'Ivoire et Soudan] ou ministres et/ou chefs d'Etat sont dans son collimateur. C'est dans ce contexte que des pays africains avaient menacé de quitter l'institution. Cette menace a été mise à exécution. Ainsi, en moins de cinq jours, deux pays africains, le Burundi - mardi dernier - et l'Afrique du Sud - vendredi - ont annoncé leur départ de la CPI envoyant un préavis de retrait au secrétariat général de l'ONU. L'annonce du Burundi, passa inaperçue soulevant peu de vagues. Avec l'Afrique du Sud, qui officialisa son départ vendredi, c'est plus sérieux. Le retrait du mastodonte africain, est ressenti comme un sévère échec pour l'institution de La Haye. Elle remet en cause la raison d'être d'une instance devenue au fil des ans un vrai boulet pour l'Afrique. En effet, les Africains reprochent à l'institution de La Haye, la mise en danger de [et la] stabilité même des institutions africaines. Cela a été le cas notamment en Afrique du Sud où le président soudanais, Omar el-Bechir, - «recherché» par la CPI - avait échappé de peu à l'arrestation sur instruction d'un juge sud-africain à la demande de la CPI, mettant en porte-à-faux le gouvernement sud-africain. Ce dernier s'est ainsi vu contraint d'exfiltrer du pays son encombrant visiteur, ouvrant une crise entre la diplomatie et la justice sud-africaines, la première s'en tenant à l'immunité diplomatique des responsables étrangers, la seconde s'estimant en droit d'appliquer la décision de la CPI. De fait, le ministre sud-africain de la Justice, Michael Masutha qui annonça le retrait de son pays, le justifia par le fait que la Cour «entrave l'aptitude de l'Afrique du Sud à honorer ses obligations en matière de respect de l'immunité diplomatique». Ce n'est là que l'un des aspects du malaise que les Africains ressentent vis-à-vis de la CPI, estimant que l'instance de La Haye se concentre trop sur la seule Afrique. Ce que souligne M.Masutha, accusant la CPI de «préférer de toute évidence viser des dirigeants en Afrique, et exclure les autres qui sont connus pour avoir commis ces atrocités ailleurs». C'est le noeud gordien du problème si l'on excipe du fait que la Cour n'a à son calendrier que des pays africains, arabes et asiatiques, avec l'exception de l'Etat européen de Georgie. Or, outre les enquêtes déjà en cours, le programme de travail de la CPI, prévoit des examens préliminaires exploratoires avant l'éventuelle ouverture d'une enquête. Les pays concernés par ces préalables sont l'Afghanistan, l'Irak, l'Ukraine, la Colombie, le Burundi, le Gabon, la Guinée, le Nigeria, et la...Palestine. La CPI [en incluant les territoires palestiniens] n'a-t-elle pas oublié par omission - c'est un euphémisme - un Etat criminel entre tous: Israël? On peut en effet estimer, que le mot «Palestine» ne recouvre pas l'entité sioniste. Bien sûr, Israël - contrairement à la Palestine qui adhéra fraîchement à cette institution - n'est pas membre de la CPI. Les ONG de défense des droits de l'homme ont durement critiqué Pretoria, dénonçant une «profonde trahison (...)» qui «sape le système judiciaire international». Certes! Or, la «justice internationale» c'est du pipeau, dès lors qu'elle punit les uns, absout les autres. Plus, des pays se sont donné les moyens pour que leurs crimes (ou ceux de leurs nationaux militaires ou civils) ne soient pas jugés par le tribunal international. Sidiki Kaba, président de l'Assemblée des Etats parties au Statut de Rome, avait averti: «le retrait d'un Etat partie constituerait un recul dans la lutte contre l'impunité». Ce que M.Kaba feint d'ignorer est que la CPI a été vidée de sa raison d'être dès lors que les «grandes» démocraties [cf; les Etats-Unis] se sont assurées de cette «impunité» dont il déplore le recul. L'Afrique ne peut, ni ne doit, justifier à elle seule, l'existence de la Cour pénale internationale.