La Palestine est devenue formellement mercredi le 123 membre de la Cour pénale internationale (CPI), un pas fondamentale pour les Palestiniens qui pourront désormais juger les dirigeants israéliens pour crimes de guerre ou crimes liés à l'occupation. Lors d'une cérémonie à huis clos au siège du tribunal à La Haye, le ministre palestinien des Affaires étrangères, Ryad al-Malki, a reçu une copie symbolique du Statut de Rome, fondateur de la CPI. "La Palestine recherche la justice, pas la vengeance", a assuré le ministre aux journalistes après la cérémonie, appelant Israël à adhérer également à la CPI. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, "ne devrait pas avoir peur (...), si Israël a des plaintes (contre les Palestiniens, NDLR) il devrait les présenter à la CPI", a dit le ministre. Exaspérés par des décennies de vaines négociations, sans aucune perspective de voir naître prochainement l'Etat auquel ils aspirent depuis longtemps, les Palestiniens ont fait le choix d'internationaliser leur cause. Fin 2014, les Palestiniens ont décidé de rejoindre la CPI, qui a pour vocation de poursuivre les auteurs de génocides, crimes contre l'humanité et crimes de guerre, après avoir vu rejeter par le Conseil de sécurité un projet de résolution mettant fin à l'occupation sous trois ans. La première plainte que la direction palestinienne entend déposer auprès de la CPI portera sur des crimes perpétrés après le 13 juin 2014, quand l'occupant israélien à lancé une vaste campagne d'arrestations suivie de la guerre à Ghaza. Durant 50 jours d'agression, Israël a tué près de 2.200 Palestiniens, en grande majorité des civils. M. Malki a cependant indiqué que son gouvernement attendrait le résultat de l'enquête préliminaire de la procureure. "Nous ne sommes pas dans une logique de menaces. Nous voulons attendre et donner à la Cour suffisamment de temps pour compléter l'examen préliminaire", a-t-il dit. Le recours à la CPI était brandi de longue date comme l'une des armes ultimes des Palestiniens. En représailles, Israël a cessé de reverser à l'Autorité palestinienne les plus de 100 millions d'euros de taxes qu'il prélève chaque mois pour son compte. Lors de sa campagne électorale, M. Netanyahu, qui a été réélu, avait enterré l'idée d'un Etat palestinien. Depuis, le Premier ministre israélien a accepté de débloquer les sommes dues à l'Autorité palestinienne, essentielle aux finances d'une institution aux abois qui fait vivre des dizaines de milliers de Palestiniens. L'adhésion à la CPI, une garantie des droits des Palestiniens Le dirigeant palestinien Saëb Erakat a indiqué que la Palestine "emploie et continuera employer tous les moyens légitimes à sa disposition pour se défendre contre la colonisation israélienne et les autres violations du droit international". "Aujourd'hui est une journée historique dans la vie des Palestiniens, elle marquera un changement qualitatif stratégique dans la lutte palestinienne pour garantir la sécurité au peuple Palestinien", a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse. Pour sa part, la présidence du conseil législatif palestinien, a affirmé que l'"adhésion de la Palestine à la CPI est un premier pas qui va lever cette immunité sur le colonisateur israélien", estimant, dans un communiqué que, "c'est une victoire pour tous les sacrifices des Palestiniens". Le mouvement de résistance Hamas a estimé que "cette victoire historique de la Palestine va nous permettre de juger les forces d'occupation israéliennes pour leurs crimes de guerre". La Ligue arabe s'est également félicitée de l'adhésion de la Palestine à la CPI, la qualifiant de droit légitime. Le secrétaire général adjoint de la Ligue arabe aux affaires de la Palestine et des territoires arabes occupés, Mohamed Sbih, a souligné, dans une déclaration à la presse mercredi, que l'adhésion de la Palestine à la CPI était un "droit légitime". "La Palestine peut désormais poursuivre les auteurs de crimes de guerre", a-t-il dit, précisant que "la question des colonies et celle des crimes perpétrés lors de la dernière guerre israélienne contre Ghaza figuraient parmi les dossiers les plus importants à soumettre à la CPI". Pour M. Sbih, "l'adhésion de la Palestine à la CPI permet de préserver les droits du peuple palestinien et de l'Etat palestinien par la solution des deux Etats prônée par l'initiative arabe de paix". Quant à l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch s'est également félicitée de cette adhésion, et affirmé qu'Israël et les Etats-Unis, qui y sont opposés, devraient "immédiatement mettre un terme à leurs pressions" sur les Palestiniens. La Haut-commissaire adjointe des Nations Unies aux droits de l'homme, Flavia Pansieri, a indiqué récemment lors d'un exposé devant le Conseil des droits de l'homme à Genève, que la perspective de l'implication de la CPI pourrait susciter des améliorations en matière de mécanismes de lutte contre l'impunité.