L'Amérique et le monde retenaient leur souffle hier, au début du dernier week-end de la campagne présidentielle US, Hillary Clinton et Donald Trump proposant aux Américains deux voies radicalement opposées. A trois jours du scrutin, les sondages ne sont guère d'utilité pour prédire avec certitude l'issue du vote. La démocrate de 69 ans conserve un mince avantage de 2,3 points en moyenne sur le milliardaire populiste de 70 ans, mais Donald Trump est porté par un rebond soudain dans les Etats-clés où se jouera véritablement l'élection, et qui lui font croire qu'une surprise est possible mardi soir. Les deux candidats quadrillent donc inlassablement le pays, enchaînant les meetings pour lancer un dernier appel à la mobilisation, avec un même message: chaque voix compte dans cette élection décrite par les deux camps comme une chance historique. Hillary Clinton commencera la journée à Miami et la terminera à Philadelphie, avec un concert de la chanteuse Katy Perry. Donald Trump traversera le pays, de Tampa, en Floride, au Colorado, en passant par la Caroline du Nord et le Nevada. Côté démocrate, ce sont les superstars Beyoncé et Jay Z qui ont donné le coup d'envoi du week-end, dans un grand concert avec d'autres rappeurs à Cleveland, bastion démocrate de l'Ohio. «Le monde attend de nous que nous restions un pays progressiste à la pointe du changement», a lancé Beyoncé, acclamée par une foule déchaînée de 10 000 personnes, très majoritairement noires. «Je veux que ma fille grandisse dans un pays présidé par une femme», a dit la chanteuse, qui a chanté son tube «Run the World (Girls)». Clin d'oeil aux tenues de l'ancienne Première dame, les six danseuses de Beyoncé portaient des tailleurs-pantalons... Dans cette atmosphère survoltée et inédite pour la grand-mère de deux petits-enfants, Hillary Clinton a pris la parole quelques minutes, sans épiloguer sur son programme mais en rappelant les horaires et l'adresse du bureau de vote le plus proche, déjà ouvert. «Nous avons un travail à terminer, plus d'obstacles à abattre, et avec votre aide, un plafond de verre à briser une fois pour toutes», a lancé la démocrate. Plus tôt, elle avait méthodiquement tâché de démolir le message populiste de son adversaire, dénonçant des promesses creuses. «Le 20 janvier, l'Amérique aura un nouveau président», a-t-elle dit à Detroit, dans le Michigan industriel. «Le changement est inévitable. Les choses vont changer. La question est: quel changement choisirons-nous?» Et à ceux à qui la virulence de cette campagne donnent des migraines, elle a lancé: «Tout dépend de vous.» A 450 km à l'est de Cleveland, à un autre bout de la «Rust Belt», région industrielle en déclin, Donald Trump a rempli à nouveau une salle de 13.000 personnes. Depuis l'année dernière, l'homme d'affaires est le seul à rassembler des foules aussi importantes. «Et au fait, je n'ai pas eu besoin d'amener Jennifer Lopez ou Jay Z, je suis ici tout seul!» a-t-il ironisé à Hershey, en Pennsylvanie, où il tente de percer le «pare-feu» d'Hillary Clinton, qui a mené jusqu'ici dans les sondages de ce grand Etat. Hier, et pour la première fois, il a été convié à prononcer l'allocution hebdomadaire du parti républicain dont de nombreux cadres l'ont pourtant récemment lâché. «Il est temps de fermer les livres d'histoire sur les Clinton (...) J'en appelle à vos votes (...) pour aider à élire une majorité républicaine au Congrès, pour que nous puissions enfin changer ce système qui ne fonctionne pas (...)», a déclaré le magnat de l'immobilier. Jamais candidat populiste n'était allé aussi loin que Donald Trump dans l'histoire récente des Etats-Unis. Son coeur d'électorat est composé de Blancs, notamment ceux qui n'ont pas fait d'études universitaires, un groupe démographique gagné par la peur du déclassement.«Je veux que l'establishment corrompu de Washington entende les mots suivants: quand nous l'emporterons le 8 novembre, nous allons curer le marigot», a-t-il lancé, reprenant une formule devenue un slogan de campagne.