Geda et Chanakya II avaient prévu la victoire du candidat populiste états-unien Donald Trump. «Geda» est un singe chinois et «Chanakya II» un poisson indien, tous deux avaient désigné sans hésiter le très controversé milliardaire, mettant en échec les sondages et les analystes les plus expérimentés, qui ne donnaient pas un kopeck pour la victoire de l'entrepreneur new-yorkais. Or, Donald Trump a gagné haut la main - une victoire large et incontestable - démentant tous les pronostics en faveur de la démocrate, Hillary Clinton. D'ailleurs, cette dernière, très fair-play, avait reconnu sa défaite et félicité le nouveau président des Etats-Unis, quarante-cinquième du nom. De fait, malgré tous les handicaps qu'il accumulait, dont les moindres ne sont pas son franc-parler ou sa méconnaissance «crasse» de la politique internationale, Donald Trump a mis tout le monde d'accord, en remportant contre toute attente le duel pour la Maison-Blanche. Il faut admettre que la première qualité du futur président est d'abord sa pugnacité, ce dernier ne lâchant rien. Il a, d'ailleurs, été le candidat républicain par défaut, étant prêt à se présenter en candidat indépendant. Lors de primaires républicaines épiques, il a défait 16 concurrents parmi lesquels Jebb Bush fils et frère de présidents des Etats-Unis. De fait, l'establishment républicain était dans tous ses états, après l'émergence d'un personnage haut en couleur, brutal, dépourvu du «vernis» qui fait les grands leaders politiques. Cette ténacité, M. Trump la fit encore valoir lors de la campagne contre son adversaire démocrate. Outre ces qualités du républicain, il faut aussi noter que les Etats-Unis n'étaient pas prêts à élire une femme à la tête de l'Etat. Le score final du scrutin (218 délégués pour Mme Clinton et 279 pour Donald Trump) reflète bien ce fait, ne donne pas raison à l'acharnement qui marqua une bataille électorale sans précédent aux Etats-Unis. Analystes et experts prédisaient un résultat très serré entre les deux postulants à la présidence des Etats-Unis. Ils ont fait tout faux! La victoire d'un amateur quasi inconnu au plan politique - qui n'a jamais eu de mandat d'élu, mais a laminé une pléiade de professionnels de la politique états-unienne - semble être d'abord celle d'un électorat fatigué par une noria qui accapara le pouvoir états-unien depuis des décennies. Mme Clinton est dans les affaires depuis plus de 25 ans. Elle a été Première Dame des Etats-Unis [épouse du président Bill Clinton], sénatrice, secrétaire d'Etat lors du premier mandat d'Obama. Ce sont donc les électeurs qui ont formaté Donald Trump, ce sont eux qui l'ont encouragé dans cette descente aberrante dans le trivial que le candidat républicain ne s'est pas fait faute d'accentuer, affirmant: «C'est ce que veut le peuple.» Donald Trump a d'ailleurs fortement joué sur ce rejet par le «peuple» d'un monde politique washingtonien corrompu, selon lui, promettant de «nettoyer le marigot». Reste maintenant l'inconnu Trump! Le voici à la Maison-Blanche [il sera investi le 20 janvier 2017] que va-t-il faire? Comment va-t-il réagir à la réalité de l'exercice du pouvoir? Ses déclarations à l'emporte-pièce tous azimuts contre tout et tous, resteront-elles un fait de campagne anecdotique ou constitueront-elles la base de son itinéraire? Toutefois, ce qu'il faut relever est qu'hier matin - après confirmation de sa victoire - le nouveau président conciliant s'est empressé d'assurer qu'il sera le «président» de tous les Etats-Uniens et qu'il aura des «relations loyales» avec les autres pays du monde. C'est peut-être de bon augure que le nouveau président mette un peu d'eau dans son vin. Toutefois, ce sont ses actions futures et, en filigrane, la désignation de l'équipe qui va l'assister, qui dessineront ce que sera le mandat du successeur de Barack Obama. Il sera surtout attendu sur la politique officielle qu'il va étrenner en tant que président des Etats-Unis. Son prédécesseur va lui laisser un lourd héritage: détérioration des relations avec la Fédération de Russie, des conflits où les Etats-Unis prennent une part prépondérante, singulièrement en Syrie, en Libye et au Yémen [par Arabie saoudite interposée], qui ont induit une course aux armes effrénée. Cependant, étant donné que le pouvoir aux Etats-Unis n'appartient pas au seul président, il est patent que le nouveau locataire de la Maison-Blanche, très encadré et recadré'', n'aura pas les mains aussi libres qu'il l'aurait souhaité. Cela, tout nouveau arrivant au Bureau ovale, l'apprend très rapidement. L'exemple de Barack Obama est édifiant. Un fossé insurmontable s'est creusé entre le candidat Obama et le président Obama, qui a renié toute la fraîcheur et tous les serments d'une autre manière de gouverner qu'il promettait en 2008. Attendons donc les premiers pas de Donald Trump pour apprécier quel président il sera, et quelles seront ses priorités au regard d'un monde très malade impacté par la politique étrangère des Etats-Unis.