Les dizaines de syndicalistes ayant répondu favorablement à l'appel de l'intersyndicale A chaque arrestation opérée, les manifestants criaient: «à bas la hogra''! à bas l'injustice!» Le sit-in de protestation auquel a appelé l'intersyndicale pour hier devant le palais Zighoud-Youcef, afin de dénoncer la nouvelle loi sur la retraite n'a pas eu lieu comme prévu. Le déploiement massif des forces de l'ordre et des brigades antiémeute dès l'aube de la journée d'hier aux alentours du siège du Parlement et aux accès qui y mènent a eu les résultats escomptés. La direction générale de la Sûreté nationale (Dgsn) s'en serait certainement félicitée! Se sentant impuissants devant ce cordon impressionnant des forces de l'ordre, les dizaines de syndicalistes ayant répondu favorablement à l'appel de l'intersyndicale se sont contentés d'un rassemblement sur l'esplanade de la Grande-Poste en plein centre d'Alger. Désemparés pendant quelque temps, les syndicalistes ont décidé finalement, aux environs de 10h20, d'interpeller les pouvoirs publics à partir de cette esplanade hautement symbolique. Usant de haut-parleurs dont ils étaient munis, les représentants des syndicats autonomes, à l'image du Cnapest, Snte, Unpef, Snpsp ont commencé à lancer des slogans hostiles au gouvernement et à l'Ugta. «Ya li laâr, ya li laâr, el houkouma bila karar. C'est honteux, le gouvernement est incapable de prendre la bonne décision!». «Samidoune,Samidoune, lil kanoune etakaoud rafidhoune. Nous sommes résistants et nous le resterons jusqu'à l'abrogation de la nouvelle loi sur la retraite.» «Sidhoum Sidi Saïd, el oumal machi aâbid.Les travailleurs ne sont pas des esclaves M.Sidi Saïd!». «Ya Sellal Ya Sellal, el setine rahi mohal. Le départ obligatoire à l'âge de 60 ans est inconcevable M.Sellal!». «Ulach smah Ulach, Pas de pardon.». La foule à laquelle se sont joints certains députés de formations politiques de l'opposition, telles que le PT, le FFS et l'Alliance verte et des dizaines de curieux parmi les passants, répétait à gorge déployée les slogans clamés. Les forces de l'ordre qui allaient laisser le sit-in avoir lieu, ont commencé à être inquiétés par les cris des syndicalistes qui ont tenté par moment de briser les chaînes entourant l'esplanade de la Grande-Poste pour rejoindre la voie publique. Pour dissuader la foule, des policiers ont procédé à des arrestations au pif parmi les manifestants, des passants même parmi des journalistes. A chaque arrestation opérée, les manifestants criaient: «à bas la hogra''! à bas l'injustice!». Rencontrant de la résistance de la part des manifestants qui se solidarisaient à chaque fois que des policiers voulaient arrêter l'un des leurs, des policiers en civil ont fait leur apparition et se sont mêlés à la foule. Sans retenue aucune, certains s'en sont pris aux manifestants qui tenaient des banderoles pour les leur arracher de force et les déchirer. D'autres ont commencé à disperser la foule par petits groupes pour les affaiblir et pouvoir les contenir. Les femmes syndicalistes qui ont tenu à marquer de leur présence en force ce jour-là n'ont pas hésité à traiter les agents de l'ordre de tous les noms d'oiseaux. Nadia Chouitem, députée PT, qui a été elle aussi malmenée ne s'est pas empêchée de crier sa colère. «C'est quoi cette façon d'agir?. Pourquoi autant de violence? Les syndicalistes dont des médecins et des enseignants méritent quand même un minimum de respect! De plus, ils sont dans leur droit de refuser une loi qui va a contrario de leurs intérêts.» Pas loin de la députée du PT, une autre députée du FFS cette fois-ci, Karima Tayane, a tenu, elle aussi, à déplorer la violence avec laquelle les forces de l'ordre s'en sont pris aux manifestants. «C'est désolant d'assister à de telles scènes. Nous allons le dénoncer publiquement au Parlement», a-t-elle ajouté sur un ton coléreux. De son côté, Chafaâ Bouiche, chef du groupe parlementaire de la même formation, a rejoint sa collègue pour dire que son parti qui a boycotté hier la séance de débat sur la nouvelle loi sur la retraite, va voter contre celle-là après-demain «le 30 novembre, Ndlr». Les mots de dénonciation ont été exprimés aussi par des parlementaires du groupe Alliance verte. Ces derniers ont promis à l'unanimité de voter contre cette loi. Méziane Mériane, porte- parole du Snapest qui a été surveillé de très près par des policiers en civil s'est contenté de faire des déclarations aux journalistes. Pour lui, malgré la répression le sit-in d'hier a été réussi. «Nous avons promis de le dénoncer et nous avons tenu parole. Nous sommes contents de la mobilisation d'aujourd'hui. Le combat va continuer.» Sabah Ziri de l'Unpef et Mohamed Ouadah du Snte, qui ont été malmenés par les policiers, ont tenu à se féliciter de la réussite du rassemblement d'hier. «Nous avons atteint notre objectif. Malgré la répression, malgré l'empêchement de nos collègues d'accéder à la capitale. Nous avons réussi à tenir notre sit-in. Nous n'allons pas baisser les bras. Nous restons mobilisés jusqu'à la satisfaction de notre plate-forme.». Pour ce qui est de l'empêchement des syndicalistes d'accéder à la capitale, il faut souligner que de nombreux syndicalistes venus de Sétif, Batna, Boumerdès, Médéa, nous ont indiqué que beaucoup de leurs collègues ont été empêchés d'accéder à la capitale qui au niveau de la gare routière de Kharrouba, qui au niveau de l'autoroute. Certains syndicalistes nous ont confié qu'ils se sont vu confisquer leur permis de conduire, leur carte grise au niveau des barrages dont le nombre a doublé hier à Alger. Ils ont pu joindre le sit-in via le métro et le tramway. Les manifestants se sont dispersés, rappelons-le dans le calme vers 11h30.Beaucoup parmi les manifestants arrêtés ont été libérés, a-t-on appris sur place aux environs de midi.