Il y a, incontestablement, de grands rêveurs parmi les joueurs algériens. «Je sais que Bourahli n'a pas joué les deux derniers matches de championnat avec son équipe, mais nous manquons d'attaquants et nous ne pouvions pas nous passer de lui». C'est ainsi que Ali Fergani, l'entraîneur de l'équipe nationale, a répondu à une question de l'un de nos confrères au sujet de l'avant-centre de l'USM Alger retenu dans l'effectif des joueurs sélectionnés pour le match Algérie-Rwanda de dimanche prochain. A bien comprendre l'entraîneur national, le football algérien souffre tellement d'un manque d'attaquants qu'il s'est cru obligé de faire appel à un joueur qui ne joue même pas avec son club. Concédons à Fergani que ce n'est pas la première fois qu'un tel cas se produit. Des joueurs qui ne jouent pas avec leurs clubs et qui sont, malgré tout, pris en équipe nationale, il y en a toujours eu et même lui, Fergani, avait agi de la sorte par le passé. C'est l'un des très gros paradoxes du football algérien qui montre bien que nos entraîneurs ne sont jamais sur la même longueur d'onde. Bourahli, négligé à l'USMA, a, malgré tout, la confiance de l'entraîneur national. Comprenne qui pourra. En tout cas, l'affaire Bourahli démontre crûment le drame qui sévit dans cette discipline à savoir qu'un joueur, même s'il n'est pas aligné dans son club, devient indispensable en équipe nationale. C'est Menad, l'entraîneur de l'USMA, qui doit se sentir marri, voire quelque part humilié parce que le joueur en question n'a pas eu la langue dans sa poche lorsqu'il s'est agi de le critiquer. On a, d'ailleurs, touché au ridicule dans cette histoire, le joueur estimant que si Menad ne le faisait pas jouer c'est parce qu'il était jaloux de lui. On aurait compris que l'entraîneur de l'USMA puisse nourrir de la jalousie envers un joueur étranger bardé de titres et de couronnes mais envers un joueur de notre championnat national, il y aurait de quoi se taper la tête contre un mur. Bourahli doit, certainement, être un grand rêveur pour croire que Menad puisse l'envier. Car au jeu de la comparaison entre ces deux personnages, y a vraiment, pas photo, l'avantage tournant, bien évidemment, en faveur de l'entraîneur de l'USMA. Celui-ci, lorsqu'il était joueur à la JSK, n'en finissait pas de truster les titres continentaux, nationaux et les coupes d'Algérie sans compter celui de meilleur buteur de la compétition. Avec l'équipe nationale, il a participé à la Coupe du monde de 1986 au Mexique, il a remporté la CAN en 1990 et la Coupe afro-asiatique des nations en 1991. A côté de lui, Bourahli, qui est loin de le valoir sur le plan du talent, n'a que un ou deux titres remportés avec l'USMA. Un misérable palmarès dont il se targue au point de penser que Menad puisse le jalouser. Bourahli profite de l'avantage qu'il a d'évoluer dans un des championnats les plus médiocres de la planète pour se faire entendre. N'a-t-il pas la saison dernière abandonné en plein championnat son équipe de l'ESS pour aller effectuer une Omra et retrouver, malgré tout, une place de titulaire à son retour? Fergani ferait mieux de faire attention parce que, s'il venait à ne pas le faire jouer, il pourrait à son tour être suspecté de jalousie à son encontre, lui le capitaine emblématique de la grande JSK des années 80 et de l'équipe nationale de 1982. L'entraîneur national a, par contre, décidé de tirer un trait sur Nasser Ouadah qui n'a pas répondu à la convocation qui lui a été envoyée pour ce match Algérie-Rwanda. Un Ouadah qui aurait dit à l'un de nos confrères que «l'équipe nationale était le dernier de mes soucis». En cela, il ne fait que rejoindre Bourahli dans la liste des rêveurs. Ouadah, vous vous rendez compte? C'est à croire que l'on parle d'un joueur qui émarge dans l'effectif d'un Milan AC, d'une Juventus de Turin, d'un Chelsea, d'un FC Barcelone ou d'un Real Madrid. Ouadah, c'est ce joueur qui évolue dans le plus qu'anonyme AC Ajaccio, presque dernier de la classe d'un championnat de France auquel il ne faudrait pas accorder plus d'importance qu'il n'en faut. Il se permet aujourd'hui de rabaisser le niveau de l'équipe nationale du pays de ses parents à cause du vide sidéral en joueurs de bon niveau chez nous. Tout cela n'est que la faute à toutes les années d'errements imposées au football algérien incapable de renouveler son élite. C'est pourquoi le premier venu se permet de donner à l'équipe nationale le statut d'un faire -valoir qui devient le dernier de ses soucis. Il y a de quoi méditer sur cet épisode comme sur celui de Hemdani, de Marseille, qui, lui aussi, s'est pris pour plus grand qu'il n'est lorsqu'on a évoqué l'éventualité de sa sélection en équipe nationale.