Le 4ème art en danger à Béjaïa Le licenciement de comédiens et autres travailleurs contractuels du théâtre régional de Béjaïa, l'antique Bgayet, prendra effet à partir de la fin du mois en cours. Après une première action de protestation observée le 10 janvier dernier, les travailleurs du théâtre régional Malek-Bouguermouh de Béjaïa sont revenus à la charge avant-hier samedi dans l'après-midi pour exiger la réintégration de tous les contractuels, l'effacement de toutes les dettes contractées par le TRB auprès de la Cnas et des fournisseurs, de revoir à la hausse le budget annuel réduit de 58% en 2016 et reconduit en baisse cette nouvelle année. Le budget annuel octroyé par le ministère de la Culture pour le TRB, une structure qui emploie 60 travailleurs, entre artistes et assimilés, était de 7,9 milliards de centimes en 2015, avant de le revoir à la baisse, mesure d'austérité oblige, de 58% soit à 3,6 milliards de centimes en 2016. Un budget qui se voit amputé de pas moins de 1,4 milliard de centimes de moins de la masse salariale annuelle, estimée à près de 5 milliards de centimes. Afin de faire face à cette situation et intégrer les dépenses du TRB dans la fourchette allouée par le ministère de tutelle, il a été décidé de licencier 25 travailleurs contractuels, dont huit comédiens et des techniciens indispensables à tout montage de production théâtrale. «Du coup, c'est la mise à mort de la production théâtrale et de la créativité, enfin de l'art tout simplement. Sinon comment voulez-vous que notre théâtre continue de fonctionner», nous indique avec beaucoup d'amertume Farouk Mebarki, technicien lumière et syndicaliste en fin de contrat du TRB. En outre, le retard dans le versement de la deuxième tranche du budget 2016 (appelée communément la contribution du ministère de la Culture) a engendré un gel des salaires des travailleurs du TRB depuis trois mois déjà. A cet effet, lors de cette deuxième protestation, laquelle a eu le soutien de la société civile, dont des militants du MDS, du PST, du RCD, de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme, du Café littéraire et de journalistes, les protestataires ont exigé aussi le payement de tous les salaires gelés et surtout la désignation d'un nouveau directeur à la tête du TRB, resté sans depuis le départ à la retraite de Omar Fetmouche. Cette deuxième manifestation a été ponctuée, comme fut la première d'ailleurs, par plusieurs séquences de pièces théâtrales produites par le TRB ou plutôt improvisées sur le champ. Des séquences qui se voulaient revendicatives à la manière des femmes et des hommes de théâtre, pour alerter l'autorité centrale sur la situation qui perdure au mythique théâtre régional de Béjaïa. «Un fleuron de l'activité théâtrale qui meurt à petit feu. Car en réduisant son budget de plus de la moitié et en s'attaquant à des postes clés dans la production théâtrale, c'est l'histoire de ce théâtre mythique qu'on veut réduire à néant», nous indique le maître musicien Bazou qui a intégré la structure depuis son jeune âge. A travers ses actions qui interviennent après l'épuisement des procédures réglementaires, les travailleurs du TRB veulent alerter toute la société civile car l'avenir du TRB, qui est aussi le sien, est devenu incertain. «Toutes ces manoeuvres ne tendent que vers un seul but, celui de nous priver de cet espace de culture et de liberté, dernier rempart contre l'ignorance et l'obscurantisme», nous indique la talentueuse et l'incontournable comédienne Mounia Ait Meddour.