Fillon veut se battre jusqu'au bout L'affaire PenelopeGate risque fort d'être l'arbre qui cache la forêt. Et les électeurs français, abasourdis, ne savent plus vraiment à quel saint se vouer... Comme prévu, le Canard enchaîné n'a pas raté la seconde occasion, une semaine plus tard, d'enfoncer le candidat de la droite et du centre, François Fillon, apportant de nouvelles révélations sur les sommes exactes perçues par son épouse dans des affaires d'emplois fictifs. En réaction, le candidat s'en est pris à la gauche au pouvoir, coupable selon lui d'avoir organisé la fuite de ces informations dont il conteste toujours la véracité alors que la justice poursuit ses enquêtes pour démêler le vrai du faux. Toujours est-il que la crédibilité de François Fillon, apôtre de la rigueur et de l'intégrité durant la campagne de la primaire à droite, en a pris un sacré coup au sein de l'opinion en général et dans son propre camp en particulier. Le voilà désormais qui supplie les parlementaires de sa famille politique de «tenir 15 jours» derrière lui, persuadé que la bourrasque sera retombée d'ici là et qu'il pourra reprendre le cours normal de la campagne. Dénonçant un «coup d'Etat institutionnel» tenté par «le pouvoir» et par «la gauche», le candidat conservateur a prononcé une diatribe désespérée mardi soir pour marquer les esprits et convaincre qu'il fait face à «une opération professionnelle de déstabilisation» sans précédent, «à moins de trois mois d'une élection présidentielle». Lucide, il reconnaît cependant que «la crédibilité de (sa) candidature est remise en cause» par cette affaire. L'enquête qui porte sur les 900.000 euros perçus par Pénélope Fillon comme assistante parlementaire et collaboratrice d'une revue littéraire (La Revue des deux mondes) et sur les deux enfants du candidat payés 84.000 euros en qualité d'assistants juridiques alors qu'ils étaient étudiants, a sérieusement écorné l'image de François Fillon au point qu'on songe de plus en plus, au sein du parti Les Républicains, à lui trouver un remplaçant. Mais qui voudra se fourvoyer, dans une telle conjoncture, à jouer le candidat à la candidature, Alain Juppé ayant exclu catégoriquement cette éventualité? On parle de plus en plus de François Barouin, porte-parole de Nicolas Sarkozy durant la primaire, ancien ministre et proche de Jacques Chirac, c'est-à-dire d'Alain Juppé avec lequel il a quelques divergences, en principe surmontables. L'affaire PenelopeGate risque fort d'être l'arbre qui cache la forêt. Et les électeurs français, abasourdis, ne savent plus vraiment à quel saint se vouer...Des affaires, il y en a dans beaucoup d'officines, à commencer par celle qui affecte le FN de Marine Le Pen qui refuse de payer la facture exigée par le Parlement européen pour une assistante employée...en France, le Parlement ayant décidé de ponctionner son salaire. De quoi s'avouer «effondré» comme l'a dit François Bayrou, le leader centriste qui a d'emblée marqué sa distance avec le programme «brutal» de François Fillon et qui n'annoncera son éventuelle candidature qu'à la mi février. Bayrou a conscience de la profonde désaffection qui mine le paysage politique, avant même d'apprendre comme tout un chacun les nouvelles révélations de Médiapart sur Fillon «senior advisor depuis 2012 et membre du comité stratégique du groupe Ricol Lasteyrie, qui conseille de nombreuses sociétés du CAC 40 et des multinationales. Ce que le candidat à la présidentielle n'a jamais déclaré publiquement». Un «job (qui) lui a rapporté au moins 200.000 euros en quatre ans». De quoi «dégoûter» plus de trois Français sur quatre, selon un sondage Elabe, qui chiffre à 76% le nombre de sceptiques face aux arguments de défense du clan Fillon. En la circonstance, ce serait la candidate du FN qui viendrait en tête du 1er tour de la présidentielle, talonnée par le candidat incolore Emmanuel Macron devant François Fillon. Un vrai scénario d'épouvante que rend inéluctable le climat, affligeant et dévastateur, de scandales et de corruption dont sont gavés les électeurs français. «Jeu de massacre», «grande lessive», «chambardements»... Les éditoriaux et les commentaires pleuvent sans discontinuer, toutes tendances confondues, tant la France est assise sur un volcan qui peut se réveiller avec l'entrée de Marine Le Pen à l'Elysée. Un Trump à la française! Conséquence du marasme, tous les candidats plaident une rupture radicale «avec les vieilles recettes», affichent un programme «innovant» ou «antisystème». Et c'est le candidat de l'extrême gauche, ancien disciple de Mitterrand et de Lionel Jospin, Jean-Luc Mélenchon qui résume une ambiance presque morbide: «Peu de fois dans ma vie politique, j'ai senti autant d'exaspération (...) Et on devine que la tendance 'dégagiste'' de la société va s'amplifier», a-t-il averti sur sa page Facebook. Le mot de Cassandre.