François Fillon, très net vainqueur dimanche de la primaire de la droite face à Alain Juppé, sera le champion de son camp à l'élection présidentielle de 2017. Il a de bonnes chances de l'emporter face au FN et à une gauche atomisée. "C'est une victoire de fond, bâtie sur des convictions", une "vague qui a brisé tous les scénarios écrits d'avance", et "les électeurs ont trouvé en moi les valeurs françaises", a lancé cet ancien chef du gouvernement à son QG de campagne parisien, entre hurlements de joie et cris "Fillon président". Sur 10'008 des 10'229 bureaux dépouillés, selon les chiffres disponibles à 03h00 sur le site de la Haute autorité, François Fillon recueillait 66,5% des suffrages contre 33,5% pour le maire de Bordeaux. François Fillon a réussi un double exploit. Il est arrivé largement en tête au premier tour (44,2%) et il a écarté les deux favoris des sondages, Alain Juppé mais aussi Nicolas Sarkozy dont il fut pendant cinq ans le Premier ministre (2007-2012). L'ancien président a été sèchement éliminé il y a une semaine. François Fillon a, une nouvelle fois, eu une "pensée particulière" pour Nicolas Sarkozy, hommage qui a déclenché des huées parmi les partisans d'Alain Juppé. Il a aussi adressé "un message d'amitié, d'estime et de respect" à son adversaire, un "homme d'Etat". A moins de six mois de la présidentielle, le champion de la droite a assuré qu'il aurait "besoin de tout le monde" dans son camp pour "vaincre" la gauche et le Front national et attirer "ces électeurs qui ne sont aujourd'hui pas des nôtres". Son programme, d'inspiration libérale, prévoit notamment 500'000 suppressions d'emplois publics, la fin de l'ISF, une hausse de TVA, l'abrogation des 35 heures, la retraite à 65 ans. Nicolas Sarkozy lui a souhaité "bonne chance pour le combat politique qui l'attend". Longtemps favori et lourdement battu à l'arrivée après une campagne d'entre-deux-tours très tendue, Alain Juppé a souhaité à François Fillon "bonne chance pour sa campagne présidentielle et pour la victoire en mai prochain". Les deux hommes se sont brièvement serré la main devant cameramen et photographes au siège de la Haute Autorité. "Je termine cette campagne comme je l'ai commencée, en homme libre qui n'aura transigé ni avec ce qu'il est, ni avec ce qu'il pense", a poursuivi avec émotion Alain Juppé, 71 ans. Il s'est exprimé dans une sorte de testament de politique nationale, mêlé de quelques avertissements au vainqueur, notamment que "pour apaiser et réconcilier, il faut aussi donner une espérance, mettre sa force au service de la générosité, du respect mutuel, de la justice". Il se consacrera "pleinement à (sa) tâche de maire de Bordeaux". Pour ce second tour, les électeurs se sont rendus encore plus nombreux dans les 10'228 bureaux de vote qu'il y a une semaine. Selon des chiffres provisoires, plus de 4,2 millions de votants se sont déplacés dimanche. En 2011, 2,9 millions d'électeurs avaient participé à la primaire initiée par le PS, qui retente l'exercice les 22 et 29 janvier. Dans les prochaines semaines, François Fillon entend notamment dévoiler la liste resserrée des ministres de son futur gouvernement. Les discussions avec les centristes devraient également figurer au programme, en vue des élections législatives. Avec dans les inconnues la stratégie de François Bayrou, qui n'excluait pas de concourir une quatrième fois à l'Elysée en cas de défaite de son champion, Alain Juppé. Le programme de François Fillon "pose de nombreuses questions aux citoyens et à notre société" qui devront "trouver réponse", a-t-il glissé dans un communiqué dimanche soir. Avec une gauche en miettes, le champion de la droite paraît en position de force pour la présidentielle (23 avril et 7 mai). Il sera donc un des principaux adversaires du Front national de Marine Le Pen, un "bon candidat" selon elle. Selon un sondage Harris Interactive diffusé dimanche, François Fillon devancerait Marine Le Pen au premier tour de la présidentielle avec 26% contre 24%, loin devant notamment François Hollande ou Manuel Valls (9%). A gauche, tous les regards sont tournés vers François Hollande. Le président de la République doit annoncer très prochainement s'il brigue ou non un second mandat dans une ambiance électrique avec Manuel Valls, qui n'exclut pas d'être candidat contre lui à la primaire organisée par le PS. Soulignant le "triomphe par KO" (Le Parisien) de François Fillon baptisé "leader maximo" par Libération, la presse de lundi, à l'instar du quotidien économique Les Echos, dresse d'ailleurs un parallèle ravageur : "une fusée décolle, l'autre s'autodétruit. Jamais la droite et la gauche n'auront paru autant aux antipodes qu'en cette journée du dimanche 27 novembre 2016".