En pleine crise diplomatique entre Mexico et Washington, les Mexicains ont été appelés hier à manifester contre le président américain Donald Trump et son projet de construire un mur à la frontière. Sous le mot-clé îVibraMéxico (Vibre, Mexique), largement relayé sur les réseaux sociaux, les habitants d'une vingtaine de villes étaient invités à défiler à la mi-journée, vêtus de blanc ou arborant le drapeau rouge, blanc et vert du Mexique. «Il est temps que nous les citoyens nous unissions nos forces et nos voix pour manifester notre rejet et notre indignation face aux intentions du président Trump, tout en cherchant des solutions concrètes au défi que celles-ci impliquent», clament dans un communiqué les organisateurs, près de 80 associations civiles, entreprises et universités. Cet appel survient au moment où les Etats-Unis et le Mexique traversent leur plus grave crise diplomatique depuis des décennies. Montée en puissance pendant la campagne du candidat républicain, qui avait traité certains Mexicains de «criminels», de «violeurs» ou de «bad hombres» (mauvais hommes) et accusé d'autres de voler les emplois des Américains, cette crise a éclaté au grand jour peu après la prise de fonction de M. Trump, le 20 janvier. Son décret en vue de faire construire un mur à la frontière, censé freiner l'immigration illégale, et son intention de le faire financer par Mexico ont poussé le président mexicain Enrique Peña Nieto à annuler sa visite à Washington alors prévue pour le 31 janvier dernier. Le président républicain veut également renégocier, voire abroger, l'Accord nord-américain de libre-échange (Aléna), trop favorable selon lui aux intérêts mexicains. Depuis, les deux hommes se sont parlés au téléphone et ont convenu que leurs équipes se réuniraient pour sortir de l'impasse. Le chef de la diplomatie mexicaine, Luis Videgaray, s'est d'ailleurs rendu à Washington mercredi. Il s'est félicité d'une «bonne première réunion (...) cordiale (...) respectueuse et (...) constructive» avec le nouveau secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson, annonçant à des médias hispanophones que le ministre américain irait «au Mexique dans les prochaines semaines». Mais dans le pays, la colère persiste et ces dernières semaines, les appels à boycotter les produits américains comme Starbucks, McDonalds et Coca-Cola et à manifester un patriotisme fervent, par exemple en mettant le drapeau mexicain comme photo de profil sur Internet, se sont multipliés. Alors que l'administration Trump s'est engagée à accélérer l'expulsion des immigrants illégaux, elle en a fait la démonstration cette semaine: Guadalupe Garcia de Rayos a été renvoyée au Mexique jeudi, au lendemain d'une visite de routine qu'elle avait effectuée auprès des autorités migratoires à Phoenix, dans l'Arizona. L'expulsion de cette femme de 35 ans, mère de deux enfants nés aux Etats-Unis, a déclenché des manifestations devant les bureaux de l'immigration, selon des médias américains. En réaction, le gouvernement mexicain a invité ses ressortissants à «prendre des précautions et à rester en contact avec le consulat le plus proche pour recevoir l'aide nécessaire face à une situation de ce type». «Le cas de Mme Garcia de Rayos met en lumière la nouvelle réalité que vit la communauté mexicaine sur le territoire américain avec des mesures de contrôle migratoire plus strictes», a souligné le ministère mexicain des Affaires étrangères dans un communiqué. Le président Peña Nieto s'est engagé à verser 50 millions de dollars aux consulats mexicains aux Etats-Unis afin d'apporter une aide juridique à ses concitoyens vivant dans ce pays. Les Etats-Unis sont le premier partenaire commercial du Mexique, dont plus de 80% des exportations leur sont destinées, et on estime que 11 millions d'immigrants sans papiers qui vivent sur le territoire américain, en majorité des Mexicains.