Le président russe, depuis hier en Egypte, va tenter de rétablir avec le monde arabe des liens qui se sont effilochés. Largement distancée par les Etats-Unis, la Russie va tenter, dans le sillage de la première visite d'un chef d'Etat russe dans un pays du monde arabe depuis quarante ans, de retrouver un rôle digne de son statut au Proche-Orient, Moscou s'étant mise, à tout le moins, en décalage par rapport à l'importance stratégique de la région moyen-orientale. Aussi, son bref séjour d'une journée en Egypte, -suivi par une visite en Israël (aujourd'hui et demain) et en Palestine (Territoires palestiniens occupés, vendredi)- va-t-il donner au dirigeant russe de renouer avec les Arabes des liens qui se sont quelque peu dilués ces dernières années, devenant sans consistance notamment depuis la chute de l'ex-Union soviétique. En réalité, depuis une quinzaine d'année, la Russie est quasi absente dans cette région du monde et son influence dans les affaires moyen-orientales insignifiante, comme en témoigne le peu de poids de Moscou sur le dossier israélo-palestinien, notamment, au Conseil de sécurité de l'ONU, comme au sein du quartette (USA, UE, ONU, et Russie) ou les Etats-Unis, et à un degré moindre, l'Union européenne, imposent leur vision de la mise en application de la Feuille de route, plan de paix international, sabordée par les initiatives unilatérales du Premier ministre israélien, Ariel Sharon. Vladimir Poutine aura beaucoup à faire pour que la Russie retrouve le rang dont jouissait l'ex-URSS dans le monde arabe notamment en Egypte, première étape hier du périple proche-oriental du président russe. De fait, fait remarquer l'analyste russe Sergueï Kazennov, de l'Institut pour les relations économiques internationales de Moscou, «La Russie joue les seconds rôles au Moyen-Orient et ne peut prétendre à aucun autre rôle». C'est avec cette réalité que devra faire le dirigeant russe, qui sait que la Russie actuelle ne dispose pas des moyens lui permettant de retrouver les dimensions qui ont été celles de l'Union soviétique. Aussi, le président Poutine se veut-il pragmatique en jouant au coup par coup et selon les possibilités de son pays. En fait, Vladimir Poutine en faisant une visite d'Etat en Egypte, en Israël et en Palestine, va devoir s'adonner à un délicat jeu d'équilibre entre les pays arabes, avec lesquels Moscou veut renouer des liens solides, et Israël, dont les relations avec la Russie sont induits par le poids de la communauté juive russophone - plus d'un million de personnes - résultat de l'exode massif en Israël des juifs russes dans les années précédant et suivant l'effondrement de l'empire soviétique (entre 1989 et 1990). C'est évident, cela a créé des liens assez particuliers entre Israël et la Russie d'autant plus que la communauté juive russophone, qui constitue le sixième de la population israélienne, joue un rôle de plus en plus important dans la politique de l'Etat hébreu. De fait, le président Poutine qui arrive aujourd'hui en Israël, devra faire face au mécontentement des dirigeants israéliens, excédés par la coopération nucléaire de Moscou avec l'Iran (vente de centrales nucléaires et participation à la construction, controversée, de la centrale de Bouchehr que l'Occident soupçonne comme devant être la matrice de la bombe atomique iranienne) et militaire avec la Syrie (vente de missiles à Damas). Aussi, il ne fait pas de doute que le Premier ministre israélien tentera de profiter de la présence en Israël du président russe pour le dissuader de donner suite à la vente d'armes conclue récemment avec le président syrien Bachar Al Assad et de renoncer à la coopération avec l'Iran. A ce propos, le président russe dans des déclarations récentes, a estimé injustifiées les inquiétudes d'Israël affirmant que la coopération avec Téhéran avait un caractère strictement civil, indiquant: «Notre position sur la non-prolifération est constante et stricte. Nous sommes catégoriquement contre l´expansion des armes nucléaires sur la planète et contre des programmes nucléaires militaires en Iran.» Pour ce qui est des missiles vendus à la Syrie, Vladimir Poutine dira : «Ces missiles vont compliquer la possibilité de vol rasant au-dessus de la résidence du président syrien», faisant référence au survol du palais présidentiel de Bachar Al Assad par l'aviation militaire israélienne en 2003. Le président russe note par ailleurs que les armes vendues à la Syrie sont de courte portée, Moscou ayant refusé de vendre à Damas des missiles de longue portée afin, souligne M.Poutine, «de ne pas modifier le fragile équilibre des forces dans la région». Reste au président russe à en convaincre ses interlocuteurs israéliens.