A Retford, comme ailleurs au Royaume-Uni, les Britanniques sont de retour aux urnes jeudi, pour la première fois depuis le référendum sur le Brexit, à l'occasion d'élections locales à valeur de test avant les législatives anticipées du 8 juin. D ans cette ville historique de 20 000 habitants située dans le centre mi-rural, mi-industriel de l'Angleterre, l'électorat est partagé entre le Parti conservateur de la Première ministre Theresa May et les travaillistes. Généralement, ce type de scrutin favorise l'opposition. Mais la proximité inédite des législatives et l'enjeu dominant du Brexit brouillent la donne. Les analystes préviennent que les enseignements de ces élections locales, où près de 5 000 sièges sont en jeu, seront à prendre avec des pincettes dans la perspective du 8 juin, où Theresa May espère conforter sa majorité au Parlement. Mais ils s'attendent à ce que la faiblesse actuelle du parti travailliste sur le plan national ait des répercussions sur le plan local, au profit notamment des Tories mais aussi des libéraux-démocrates et de leur ligne pro-UE. «Les conservateurs et les libéraux-démocrates devraient progresser en termes de sièges alors que le Labour et (le parti anti-UE) Ukip risquent de souffrir», estime le professeur Michael Thrasher de l'université de Plymouth. Cela refléterait l'humeur du paysage politique britannique actuel. Avec des conservateurs au plus haut dans les sondages. Un Labour à la dérive sous la tutelle de son leader radical Jeremy Corbyn. Des Lib-Dems qui reprennent des couleurs après avoir payé cher leur participation au gouvernement tory entre 2010 et 2015. Et un parti Ukip privé de sa raison d'être, maintenant que la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne est sur les rails. Les ressorts d'une élection locale sont multiples, mais «le Brexit joue un rôle parce qu'il est au coeur de la campagne pour les législatives», note Roger Scully, professeur de sciences politiques à l'université de Cardiff. A Retford, où le Labour est majoritaire au Conseil local après avoir détrôné les conservateurs en 2013, le candidat conservateur Mike Quigley compte sur cette dynamique pour renverser la vapeur. «Normalement, les élections locales servent à punir le gouvernement en place, mais j'entends un son de cloche différent cette année», dit-il devant la mairie datant du 19e siècle, non loin de la rivière Idle. Darrell Pulk, son adversaire travailliste, admet que «le combat s'annonce serré». «Les conservateurs insistent sur la question du Brexit, mais moi j'ai l'impression que les électeurs voient d'abord les enjeux locaux», explique-t-il. Dans cette ville du Nottinghamshire, non loin de la forêt de Sherwood célèbre pour Robin Hood, les habitants semblent pourtant bien avoir le Brexit à l'esprit. «J'étais pour le maintien dans l'UE. Mais le pays en a décidé autrement et on devrait s'unir derrière Theresa May», déclare John Townsend, 64 ans, un ancien analyste financier désormais retraité. D'autres semblent définitivement désabusés par la politique. «On n'entend que des mensonges. On nous disait qu'avec le Brexit on n'aurait plus rien à voir avec eux (l'Europe). Et maintenant ils nous réclament 50 milliards de livres, c'est une blague», peste John Maguire, 67 ans. John Hess, politologue à l'université de Nottingham, estime que la région offrira un indicateur clair du résultat final, d'autant que Theresa May a «clairement décidé de viser spécifiquement les fiefs traditionnels du Labour». Une analyse que semblent confirmer les récentes visites de la Première ministre et de Jeremy Corbyn, qui ont justement choisi le Nottinghamshire pour lancer leur campagne pour les législatives.