Les députés britanniques ont voté mercredi sur la tenue d'élections législatives anticipées le 8 juin, élections demandées par la Première ministre conservatrice Theresa May au motif d'avoir "une main plus forte" pour négocier le Brexit. Le débat parlementaire devait démarrer aux alentours de 12H30 (11H30 GMT). Il ne devrait pas durer plus de 90 minutes avec un vote prévu vers 14H00. Mme May, qui a pris tout le monde de court mardi en appelant à des élections anticipées, a besoin de l'aval des deux tiers de la chambre basse du Parlement de Westminster pour appeler les Britanniques aux urnes avec trois ans d'avance. Un résultat qui paraît a priori acquis, Jeremy Corbyn, le chef du Parti travailliste, la principale formation d'opposition, ayant annoncé qu'il y était favorable, même s'il joue sa tête. Le Labour est en effet distancé de 21 points par les conservateurs dans les derniers sondages et s'il "subit une défaite sévère, Corbyn partira", pronostique Wyn Grant, professeur de sciences politiques à l'université de Warwick. Une faiblesse dont Mme May veut profiter pour conforter sa majorité, actuellement de 17 sièges. Les premières projections indiquent que les Tories pourraient renforcer leur majorité à plus de 100 députés, sur les 650 que compte la Chambre des Communes. "May en route vers une victoire électorale écrasante", titre le Times. Si les critiques accusaient mercredi Mme May, qui a démenti pendant des mois vouloir bouleverser le calendrier électoral, d'agir par pur opportunisme, elle a assuré que ses opposants ne lui avaient pas laissé le choix. Malgré le soutien apporté en mars par le Parlement au déclenchement de la procédure de divorce avec l'UE, elle dit craindre des blocages qui affaibliront la position de Londres dans les négociations avec Bruxelles qui doivent démarrer début juin. "Les partis d'opposition avaient l'intention d'entraver le processus du Brexit", a-t-elle déclaré mercredi à BBC Radio 4. Des élections anticipées "vont permettre d'avoir une main plus forte dans les négociations" avec l'UE, a-t-elle ajouté. Mais pour un diplomate européen, "la bonne nouvelle côté européen, c'est que du coup elle sera moins fragile pour encaisser toutes les concessions qu'elle devra faire". Le quotidien The Guardian estime qu'avec ce scrutin anticipé Mme May veut montrer que le Brexit est irréversible. Si elle obtient la large majorité qu'elle souhaite, cela "balaiera les derniers espoirs de voir la décision +aberrante+ de juin dernier être inversée".
Ecraser les saboteurs Tim Farron, le chef du parti libéral-démocrate, pro-UE, préfère y voir une "chance pour changer la direction" prise par le Royaume-Uni et "éviter le désastre d'un Brexit dur", impliquant une sortie du marché unique. En réponse, le tabloïd europhobe Daily Mail a appelé en Une à "écraser les saboteurs" pro-UE, alors que le Sun assure que Theresa May va "aussi clouer le bec aux députés conservateurs rebelles". Le quotidien Evening Standard souligne que le jeu n'est pourtant pas dénué de risques pour Mme May, en particulier en Ecosse où le Parti national écossais (SNP, au pouvoir), pro-UE, "pourrait maintenir et même accroître son avance", lui donnant davantage d'arguments pour obtenir le nouveau référendum d'indépendance qu'il réclame. Mme May pourrait aussi être confrontée à la lassitude des électeurs, qui vont connaître leur quatrième vote crucial pour l'avenir du Royaume-Uni en quatre ans, après le référendum sur l'indépendance de l'Ecosse en 2014, les législatives de 2015 et le référendum sur le Brexit en juin 2016. L'interview de Brenda, une habitante de Bristol, à la BBC est devenue le symbole de cette "élection-fatigue" et a enflammé les réseaux sociaux. "Vous plaisantez ? Encore une (élection)? C'est pas vrai, j'en peux plus", dit-elle au reporter. Alors que la campagne électorale n'est même pas encore lancée, Mme May a déjà provoqué la polémique en laissant entendre qu'elle ne prendrait pas part à un débat télévisé avec les autres chefs de partis, qui l'ont accusée de "déni démocratique".
Le "réel" des négociations du Brexit aura lieu après le 8 juin Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker estime que le début "réel" des négociations du Brexit aura lieu après les élections anticipées du 8 juin au Royaume-Uni, proposées par la Première ministre Theresa May, a indiqué mercredi un porte-parole de l'institution. M. Juncker, qui s'est entretenu au téléphone mardi soir avec Mme May, "considère que les réelles négociations politiques sur l'article 50 avec le Royaume-Uni débuteront après les élections prévues pour le 8 juin", a déclaré devant la presse Margaritis Schinas, porte-parole en chef de la Commission. Pour la Commission, ces élections inattendues ne modifient pas le calendrier. "Les négociations devaient commencer au mois de juin de toute façon", a assuré M. Schinas. Dans son calendrier, la Commission prévoit de présenter début mai son projet de "recommandation" aux Etats membres sur le mandat des négociateurs de l'UE, menés par le Français Michel Barnier. Ce mandat devrait ensuite être officiellement adopté le 22 mai par les ministres des 27 lors d'un Conseil des Affaires générales, en même temps que les "directives" des 27 pour les négociations avec le Royaume-Uni. Ces "directives" seront plus détaillées que les "orientations" de négociations, déjà proposées par le président du Conseil européen Donald Tusk, qui doivent être adoptées lors d'un sommet européen le 29 avril à Bruxelles. Le porte-parole de l'exécutif européen a par ailleurs exclu que Londres ait une influence sur le sort des deux agences européennes actuellement situées sur le territoire britannique, à savoir l'Autorité bancaire européenne et l'Agence européenne des médicaments. "Les agences de l'UE doivent être basées sur le territoire de l'UE. La décision concernant l'ABE et l'AEM ne fait pas partie des négociations du Brexit, c'est une conséquence du Brexit", a affirmé Margaritis Schinas. "Le Royaume-Uni n'aura pas son mot à dire dans la relocalisation des agences", a-t-il poursuivi.