Les chaînes de télévision publiques et privées dévoilent déjà ce que sera leur programme pour les soirées du Ramadhan. Ce sont des bandes annonces qu'elles diffusent à longueur de journée. Une bande annonce, ce sont des morceaux choisis, le meilleur, quoi, pour attirer le téléspectateur, car la réalité est tout autre, nous le savons par expérience. La télévision durant le Ramadhan, a le goût du Ramadhan, avec d'abord, de la pub à ne plus en finir. Nous avons l'impression qu'il n'y a que la pub dans les grilles des programmes. De la pub pour le café! Toutes les marques y passent. Le créneau est porteur. Et puis, il y a les marques de pâtes, du couscous, aux vermicelles, des spaghettis aux différentes marques de pâtes. Pub aussi pour les limonades et les jus, enfin de la pub avant et pendant un programme. Mais la star des stars du mois de Ramadhan, c'est le commissariat, le décor préféré des concepteurs de feuilletons made in Ramadhan. C'est dans ce décor que se déroule la majeure partie des feuilletons. Les principaux acteurs campent des personnages de flics et les plans de coupe montrent Alger by night, ses ruelles et ses beaux monuments. Affaires de meurtres, mais aussi d'escroqueries, de vols et de détournements. Des séquences destinées à changer un peu la tendance policière des feuilletons se déroulent d'abord dans un salon de thé puis plus tard dans un restaurant, souvent presque vide. Les producteurs n'ont pas de quoi payer les figurants. Deux ou trois répliques et puis les clients passent au dessert, généralement un café comme si les Algériens n'aiment pas les fruits et les glaces. Les personnages des feuilletons ne sont pas tous des bandits et des escrocs mais ils habitent tous des villas, certains avec piscine qui bizarrement ne sert que de décor dans un pays où il fait chaud 11 mois sur 12. Et puis, il y a les caméras cachées où les concepteurs sont logiquement estés en justice, tant les piégés font face à des situations où ils risquent gros en matière de santé avec des histoires de terrorisme et de kidnapping. Hadj Rahim, pionnier en la matière en Algérie, nous faisait rire sans mettre en péril la santé des piégés. Mais connaissent-ils Hadj Rahim, ceux-là qui après quelques mètres de pellicule tournés se prennent déjà pour des stars de la réalisation? Quant aux émissions culinaires, toutes les chaînes de télévision s'y mettent, aussi bien les chaînes publiques que privées. Si seulement nous devions suivre à la lettre les recettes proposées, il faudrait multiplier par cinq le budget de Ramadhan et si nous suivions scrupuleusement le contenu, nous découvrions qu'un «m'touem» ou une «hrira» se présente sous plusieurs recettes. Le chaâbi reprend enfin sa place dans la grille des programmes, pas de suite après le «Adhan», comme par le passé, mais souvent comme bouche-trou. Les émissions culturelles et les documentaires sur le Ramadhan dans les autres pays meublent les interminables heures de programmes diffusés avant la rupture du jeûne, le meilleur est laissé pour la soirée. Sacré mois de Ramadhan où l'Algérien enfin vit, vit en famille et en société. Il sort en soirée et se paye des promenades, mange enfin en famille où la table est toujours bien garnie quitte à s'endetter. Ce ne sont pas les malheureux 5000 DA qui vont aider ou améliorer la table des démunis, mais peut-être la charité des voisins. Les Algériens se découvrent une âme charitable durant le mois de Ramadhan, certains par calcul. Ils vont à la quête des «hassanette» comme on va dans une grande surface acheter ce qui nous manque. Ils se mettent aussi au «kamiss» et à la prière. Ce sont là les couleurs du mois de Ramadhan avec le délicieux «kalbelouz» accompagné d'un thé à la menthe de préférence.