Abdelkader Messahel, Khmaies Djihnaoui et Samah Choukri se réuniront à Alger les 5 et 6 juin Le fait que les trois pays discutent, se concertent et travaillent dans une harmonie relative, parfois tributaire des divergences d'appréciation, rassure quant à leur détermination à sortir du bourbier libyen. Les ministres des Affaires étrangères algérien, tunisien et égyptien tiendront les 5 et 6 juin une réunion consultative sur la Libye pour examiner les récents évènements intervenus dans ce pays où la tension est montée de plusieurs crans, aussi bien à Tripoli où des affrontements ont opposé les milices de Khalifa Ghweil, l'ancien chef du Congrès national général, aux forces loyales au GNA de Fayez al Serraj, que du côté de Derna, théâtre de violents combats entre l'armée nationale libyenne du maréchal Khalifa Haftar et les éléments de la 3ème force. Annoncée la semaine dernière, cette réunion aura lieu alors qu'on observe une accalmie, certes relative, sur le terrain et elle s'inscrit dans le cadre du suivi des initiatives du Groupe des pays voisins conduit par l'Algérie. Il s'agira d'abord de dresser une sorte de bilan des résultats obtenus grâce aux efforts consentis par les trois pays participants, afin de concilier les positions des diverses parties prenantes du conflit. Ainsi, sera-t-il question des tentatives d'approfondissement du dialogue inter-libyen menées des mois durant, dans le cadre de l'accord politique de décembre 2015 et de la Déclaration commune adoptée à Tunis fin février. Sur cette base, seront évalués les aspects positifs, comme la récente rencontre entre le Premier ministre Fayez al Serraj et le maréchal Haftar, et les aspects négatifs comme les affrontements intervenus voici une quinzaine de jours à Tripoli, Derna et dans le Sud libyen. De toute évidence, le «rôle crucial» qui incombe aux trois pays voisins de la Libye doit être réaffirmé, dans le respect du processus de résolution de la crise mené sous l'égide de l'ONU. Hors de ce cadre, il sera difficile de rétablir la stabilité de la Libye, d'améliorer la situation socio-économique de son peuple et de garantir son intégrité territoriale ainsi que sa souveraineté. Surtout que l'enjeu n'est pas seulement libyen et que la menace induite par une aggravation de la crise pèse sur les pays voisins eux-mêmes. La région est en proie à plusieurs défis, allant de la menace terroriste aux multiples activités de contrebande. Les trois pays réunis demain à Alger partagent une ambition commune, malgré quelque variante due au contexte sécuritaire que chacun d'eux connaît. C'est pourquoi ils entendent oeuvrer d'un commun accord à la «poursuite des efforts de réconciliation dans le cadre du Dialogue inter-libyen, sans aucune exclusion». Démarche parrainée par l'ONU, elle souligne que «le dialogue doit englober l'ensemble des protagonistes libyens, toutes orientations et toutes appartenances confondues (...) disposés à trouver des solutions politiques et aucunement impliqués dans des actes terroristes». Un des soucis majeurs des pays voisins est d'éloigner le spectre d'une «option militaire ou d'une ingérence étrangère dans les affaires internes de la Libye. Un an et demi après l'accord du 17 décembre 2015, le temps est venu de passer à la seconde étape qui prévoit la mise en place d'un gouvernement d'union nationale et l'organisation d'élections législatives puis présidentielle, courant 2018. Le Conseil de sécurité de l'ONU qui a condamné la semaine dernière l'escalade de la violence à Tripoli a encore appelé à s'impliquer de manière constructive dans le processus de dialogue inclusif. Cette réunion qui intervient avec Abdelkader Messahel comme unique patron de la diplomatie algérienne dans le nouveau gouvernement représente une chance et une gageure, en même temps. Le fait que les trois pays discutent, se concertent et travaillent dans une harmonie relative, parfois tributaire de divergences d'appréciation, rassure quant à leur détermination à sortir du bourbier libyen. Que leur rencontre ait été programmée de longue date ou qu'elle résulte des combats de Tripoli et de Derna, qu'importe. Seules comptent les concertations continues et la volonté commune de gérer de concert la crise et c'est bien ce qui apparaît dans cette réunion. Reste que le jeu trouble et parfois dangereux des factions, tantôt favorables au Dialogue et tantôt hostiles, selon qu'il y ait des interférences ou un travail de sape étranger, constitue un vrai problème qui mine, s'il ne le dynamite pas encore, le processus. C'est pourquoi un jeu de rôles semble écrit qui pousse ces factions à jouer la carte du temps, rejetant l'option d'un agenda contraignant, avec le risque patent d'une brutale aggravation de la crise.