Le risque est grand de voir tout le royaume en proie à un foyer d'émeutes. Rabat, la capitale marocaine, a sombré ce jeudi dans la spirale de la violence au rythme d'une journée de protestation «réprimée par des policiers qui ont usé de matraques contre des jeunes manifestants», a rapporté la presse locale dans son édition d'hier. Laquelle protestation, indique-t-on, a été initiée sous forme d'un sit-in organisé par le collectif des diplômés-chômeurs devant le siège du Parlement marocain pour faire montre de sa désapprobation quant «à la politique gouvernementale qui n'apporte rien sur la politique de l'emploi», a souligné M. Abdelkader Oulaïch, membre dudit collectif dans les colonnes du quotidien marocain Rissulat El Oumma. Et d'ajouter: «Le gouvernement est seulement préoccupé par le maintien des équilibres économiques, alors que le citoyen reste le dernier de ses soucis.» Toujours est-il que la réplique des forces de police à l'encontre de cette manifestation pourtant décrétée pacifique et ayant pour objectif d'amener le gouvernement à ouvrir des postes de travail dans la Fonction publique, a été des plus violentes. C'est une véritable bastonnade, en effet, qui a été «orchestrée» par les agents de l'ordre du Royaume chérifien à l'égard des protestataires. Le quotidien Rissulat El Oumma parle «d'environ 150 manifestants qui ont été roués de coups, dont 80 ont été dirigés vers les structures hospitalières de la ville». Outre ce nombre effarant de blessés, l'on dénombre pas moins de trois arrestations dans les rangs des manifestants. Il semblerait, par ailleurs, que cette méthode de brutalité a laquelle ont eu recours les autorités marocaines est loin d'infléchir le collectif des diplômés-chômeurs qui par la voix de M.Oulaïch indique que «la politique du bâton ne nous fait pas peur. Nous continuerons à sortir dans les rues de Rabat pour faire prévaloir notre droit constitutionnel au travail». Le collectif des diplômés-chômeurs, composé d'un millier de membres organise depuis plusieurs mois des sit-in de protestation généralement violemment réprimés par la police. Celui de jeudi dernier, tenu devant le siège du Parlement marocain, est intervenu au moment où plusieurs députés issus de différentes formations politiques avaient mis en évidence, dans leurs questions au chef du gouvernement, M.Driss Jettou, l'échec des réformes économiques et les difficultés du gouvernement à améliorer autant l'offre de l'emploi, la situation sociale que l'amélioration des conditions de vie des Marocains. Soulignons en ce sens que la journée d'émeutes qu'a connue jeudi dernier Rabat, vient s'ajouter à celle signalée la semaine écoulée dans la localité d'Al Hoceïmia en raison du retard cumulé dans la prise en charge des sinistrés du séisme entassés depuis plusieurs mois dans les chalets implantés dans cette commune. Soulignons également que selon le Haut commissariat au plan, le chômage a progressé de 0,8% au premier trimestre 2005 au Maroc. La même source confirme qu'environ 325.000 diplômés des universités marocaines sont actuellement au chômage, soit un accroissement de 27,7¨% par rapport au 1er trimestre 2004. Le fléau du chômage au Maroc, s'il a pris de l'ampleur, ceci est dû au recul de l'emploi dans certains secteurs d'activités économiques, notamment les secteurs industriel et agricole. La situation sociale au Maroc est, croit-on savoir, en perpétuelle déperdition et le risque est grand de voir tout le royaume en proie à un foyer d'émeutes devant se généraliser sur l'ensemble de son territoire. Pour éluder ce genre de catastrophe, la Banque mondiale (BM) s'est empressée, rappelle-t-on, à débloquer le montant de 400 millions de dollars en faveur du gouvernement marocain pour permettre à celui-ci de redresser la barre sur le plan social. La situation économique au Maroc n'est pas également des plus reluisantes. Alors que le gouvernement émet des réserves s'agissant de la dévaluation du dirham (monnaie marocaine), celle-ci est de plus en plus souhaitée dans les milieux industriels et des exportateurs pour contrer les effets désastreux d'une crise économique qui affecte plusieurs secteurs. Le gouvernement marocain, quant à lui, est «face à un dilemme qui l'oblige à examiner la solution d'une dévaluation du dirham qui renchérirait le coût de la dette extérieure et la facture pétrolière, mais tenterait de rendre les exportations plus compétitives», estime l'hebdomadaire marocain La Tribune. Face à une crise sociale et économique aiguë, le Maroc ose faire dans la critique des propos tenus par le président algérien Abdelaziz Boutelika, s'agissant du dossier du Sahara occidental dont le règlement est du ressort de l'ONU. Le Maroc aurait-il omis qu'avant d'agir de la sorte, il ferait mieux de procéder d'abord à laver son linge sale.