Tenu de respecter à la fois ses promesses électorales et ses engagements budgétaires européens, le président français Emmanuel Macron prévoit d'économiser 4,5 milliards d'euros cette année en mettant l'Etat à la diète, tout en promettant des baisses d'impôts l'an prochain. «N ous avons trouvé 4,5 milliards d'euros d'économies (...) sur le seul budget de l'Etat», a annoncé hier le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin dans un entretien au journal Le Parisien. «Nous tiendrons la parole de la France», assure-t-il alors que le nouveau gouvernement commence à mettre en oeuvre les différentes réformes promises. Paris s'est engagée à ramener cette année le déficit public sous la barre fatidique des 3% du PIB, exigée par les traités européens, pour la première fois depuis dix ans. Mais entre 4 et 5 milliards d'euros manquent à l'appel, selon la Cour des comptes, qui prévenait fin juin que la France essuierait 3,2% de déficit en l'absence de «mesures fortes de redressement». Or respecter cet engagement est un gage crucial de crédibilité pour Emmanuel Macron, élu le 7 mai sur un programme libéral social. Pendant sa campagne, il a répété qu'il comptait restaurer la «crédibilité» de la France en Europe, en particulier auprès de son partenaire allemand, en faisant preuve de sérieux dans ses finances publiques. La France, dernier pays de la zone euro avec l'Espagne a être encore sous le coup d'un procédure pour déficit excessif, a déjà bénéficié de deux délais de deux ans, en 2013 et 2015, pour repasser sous la barre fatidique des 3%, inscrite dans les traités européens. La Commission européenne a d'ores et déjà exclu tout nouveau délai. Pour maintenir le budget dans les clous européens, tous les ministères français sont ainsi priés de revoir leur «train de vie» à la baisse, a détaillé M. Darmanin. Selon le ministre, ces économies seront réalisées sans baisse des minima sociaux ni suppressions de postes de fonctionnaires. Parmi les économies envisagées: 268 millions d'euros au ministère des Finances, ou encore 282 millions d'euros aux Affaires étrangères dont la moitié provenant d'un recul de l'aide publique au développement. Une décision vertement critiquée par plusieurs ONG. «A peine deux mois après son élection, Emmanuel Macron enterre ses promesses électorales en opérant la plus importante coupe budgétaire de l'aide publique au développement jamais connue», s'est ainsi indigné Oxfam. La Défense, elle, devra respecter une réduction de dépenses prévue de 850 millions d'euros. L'Intérieur devra réaliser 526 millions d'euros d'économies, sans toucher aux effectifs de policiers ou de gendarmes. «La technique n'a vraiment pas changé. On est au rabot au lieu de se poser des questions de structure», a réagi le président du Sénat Gérard Larcher (Les Républicains, droite). Interrogé sur RTL, Gérald Darmanin a promis de «faire des réformes de structure» dès l'an prochain, citant notamment «la politique de formation et d'aide à l'emploi» ou «la question du logement». 2018 promet une équation budgétaire complexe. La France s'est engagée à stabiliser l'an prochain ses dépenses publiques hors inflation, ce qui, selon les experts, implique d'économiser près de 20 milliards d'euros. Et cette facture pourrait être revue à la hausse, au vu des dernières annonces du gouvernement. Emmanuel Macron a confirmé lundi l'entrée en vigueur dès 2018 de deux mesures fiscales: la suppression de la taxe d'habitation pour 80% des Français et la transformation de l'impôt sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI). Début juillet, le Premier ministre Edouard Philippe avait pourtant annoncé le report de ces mesures à 2019, pour contenir le déficit public. Un gel finalement annulé après avoir été mal accueilli, alors que ces baisses d'impôts étaient des promesses clés du candidat Macron. «C'est le premier revirement du chef de l'Etat même si l'Elysée préfère parler de 'précision de calendrier''», commente le journal Le Parisien. Cette correction exige entre 4 et 6 milliards d'euros d'économie supplémentaires, à moins que le gouvernement ne corrige sa trajectoire budgétaire. Pendant la campagne, Emmanuel Macron avait évoqué le chiffre de 2,8% de déficit en 2018. Mais il pourrait être tenté désormais de s'en tenir au strict minimum, à savoir 3%.