Le tribunal criminel près la cour de Tizi Ouzou a connu, ce lundi, un cas dur, difficile et tragique. Une vieille mère de famille a, sous la pression du qu'en-dira-t-on et, de la dure loi de l'honneur, assassiné sa fille et par voie de conséquence, le bébé que cette dernière portait. Les faits remontent au 9 décembre 2002 quand la vieille H.Fetta a cru pouvoir faire avorter sa fille enceinte de six mois afin d'échapper à la montre et à la honte. H. Fetta donna, ce jour-là, à sa fille un liquide à boire. En fait, un produit toxique, apparemment de l'insecticide. La fille au lieu d'avorter succomba et alors la vieille Fetta ne savait plus quoi faire. Elle eut la triste idée de cacher ce «meurtre» et de le déguiser en suicide. Aussi, et après avoir enroulé une corde autour du cou de la victime, elle dépose près du corps une bouteille d'insecticide, cette bouteille d'où provenait justement le liquide avalé par la malheureuse. Puis elle expliqua avec l'appui de la famille que sa fille s'était suicidée. Aux policiers ayant mené l'enquête, tout le monde dira qu'il s'agissait de suicide. Cependant, et devant le juge d'instruction, la soeur de la victime parla d'un fait troublant. Sa mère lui avait demandé de donner à sa soeur un verre du liquide toxique, ce qu'elle refusa. Alors les faits remontent à la surface et pressée de toutes parts, la vieille Fetta avoua son double crime. A la barre, elle ne savait plus quoi faire et encore plus quelle attitude prendre. Le monde s'écroulait autour d'elle. Toutes les valeurs auxquelles elle croyait dur comme fer se sont écroulées et sa propre fille est la victime et le sujet de scandale ! Pour la vieille Fetta, son geste est un geste d'honneur et elle affirme surtout ne pas avoir voulu donner la mort mais plutôt sauver sa fille et sa famille du déshonneur. L'arrêt de renvoi souligne que l'accusée a reconnu les faits devant le juge d'instruction. Dans son réquisitoire, le procureur de la République a été des plus durs. Il a requis la peine de mort contre la vieille Fetta qui ne broncha d'ailleurs pas comme si elle était étrangère au procès. Les yeux fixant le sol, elle se remémore certainement les faits de ce tragique 9 décembre! Et le procureur d'asséner: «Le but n'était pas de faire avorter mais de tuer car sinon comment expliquer la corde autour du cou de la victime?» La défense intervient et plaide brillamment l'intention de faire avorter sans donner la mort. Et d'expliquer aussi la tension sociale qui pesait sur la mère gardienne des traditions et du foyer. La défense ajoute que «la chambre d'accusation se devait d'instruire à charge et à décharge». De même, s'appuyant sur le rapport du médecin légiste, elle démontre qu'il n'y pas a eu strangulation donc pas de suicide. Pour la défense, l'accusée n'a fait qu'essayer de cacher «cette honte de la famille au regard des autres». En fait, l'accusée s'est sacrifiée pour sauver l'honneur de la famille et du village! Après délibération, les juges reviennent avec le verdict: sept années de réclusion criminelle pour H. Fetta. Avant de sortir pour rejoindre la maison d'arrêt, H.Fetta ose un regard vers l'assistance, un regard plein de tristesse et aussi de... honte!