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Atouts et pièges d'une relation
CONDITIONNEMENT DANS LA RELATION MANAGERIALE
Publié dans L'Expression le 21 - 09 - 2017

Qu'il soit collaborateur ou manager, la responsabilité des résultats dans l'entreprise est partagée
Le préalable à la question qui domine mes préoccupations dans la relation managériale, consiste à trouver le moyen de sensibiliser le personnel de l'entreprise (managers-collaborateurs) autour des enjeux de la communication interpersonnelle.
La communication à l'oral est souvent à l'origine de beaucoup de malentendus qui alimentent et transforment les tensions en conflits. L'aspect psychologique relatif au comportement de l'individu, et qui est faiblement appréhendé par les responsables de l'entreprise, semble la seule piste capable d'interpréter le fond du problème de la relation managériale et bien sûr, le seul recours plausible pouvant apporter un changement notable dans le comportement du personnel au sein de la société. Pour mettre fin à un conflit qui commençait à peser sur les résultats d'une société privée, un jour, j'ai été sollicité par ses responsables pour coacher l'adjoint du directeur des ressources humaines, à qui le manager reprochait son manque de confiance en lui et son comportement peu responsable.
Connaissant les parties adverses, j'ai commencé par élaborer un diagnostic sur la base des évènements déclencheurs du conflit et aussi sur la nature de la relation managériale. En établissant le constat, je me suis rendu compte que le principal problème était d'ordre psychologique et qu'il se manifestait sous forme de stimulus réciproque qui affectait la relation managériale de façon continue sans que nul ne se rende compte. En fait, le manager doté d'un fort ego et assez sûr de lui, avait toujours l'air renfrogné. Il manifestait un caractère trop autoritaire et semblait ne faire confiance à personne, sauf à son ego. Il ne savait pas partager l'information, il communiquait de façon à donner des ordres qu'il trouvait incontestables.
Remettre en cause sa perception des choses était synonyme d'une dévalorisation et d'ignominie. Son adjoint, intelligent et assez competent, semblait très affecté par l'attitude méprisante que développait son manager à son égard.
Expérience de Pavlov
Au cours de l'analyse du comportement de l'adjoint ou subordonné et sa réaction aux exactions déplorables de son responsable, j'ai pu intercepter beaucoup de méfiance à l'égard du manager, qu'il qualifie d'arrogant et maussade, se distinguant par les attitudes et comportements suivants: voix haute qui vient alerter les collègues de la gravité de la situation, regard méprisant et débordant de doutes, rotation de la tête pour témoigner son mépris, absence de sourires et d'encouragements, rappel des tâches à plusieurs reprises...Sans omettre de signaler les expressions purement négatives à l'égard des collaborateurs (tu ne sais pas faire, tu as encore oublié, tu es fatigué, t'es déjà fatigué, c'est trop te demander...). Le collaborateur affirme avec force, que le contact «face to face» ou par téléphone lui fait vivre la situation suivante: «Je suis automatiquement déstabilisé à la première apparition de mon manager. La peur et l'incertitude envahissent mon coeur, mon rythme cardiaque augmente vite et c'est tout mon corps qui commence à trembler. Je me retrouve perturbé et incapable de réussir quoi que ce soit. La seule chose dont je suis certain, c'est que je ne saurais jamais comment réussir à le satisfaire.» Son attitude bourrue et ses attaques incessantes finissent par provoquer un stress accablant du moral du subordonné et le poussent à perdre confiance en son manager et le plus alarmant dans cette situation, c'est en toute logique que le subordonné verra ses capacités mentales et techniques s'effriter parce qu'il a perdu confiance en lui. Le souhait de se faire encadrer et d'évoluer sur la voie de l'autonomie vient de s'envoler. C'est pour cette raison que les subordonnés considèrent les managers comme une source de stress, plutôt qu'un propulseur de motivation et de développement.
En faisant appel aux approches scientifiques. Pavlov, célèbre physiologiste russe a constaté lors de l'étude des secrétions salivaires chez le chien, que celui-ci commençait à saliver, en entendant les pas du garçon du laboratoire chargé de nourrir le chien. C'est ainsi que Pavlov parle de réflexe conditionnel. Par réflexe, il sous-entend réagir à son environnement (salivation: exemple du chien) et par conditionnel, il sous-entend le stimulus (les pas du garçon du laboratoire). Tout compte fait, le conditionnement classique est une forme d'apprentissage qui permet au chien de saliver à chaque fois qu'il entend les pas du garçon du laboratoire, parce qu'il sait que cette action annonce l'arrivée de la nourriture tant désirée. Cependant, quelles que soient ses capacités mentales et intellectuelles, l'individu réagit instinctivement par rapport aux «stimuli» de l'environnement. L'un des leaders des théories du gestalt, Watson, rapporte: «Donnez-moi une douzaine d'enfants en bonne santé, bien formés, et la possibilité de les éduquer dans un monde de mon choix et je garantis d'en choisir un au hasard et de le former à devenir un spécialiste quelconque, soit médecin, avocat, marchand général et même un voleur, sans égard à ses talents, ses penchants, ses tendances, ses aptitudes, sa vocation et même la race de ses ancêtres.»
L'apprentissage préconisé chez Watson suppose utiliser des «stimuli» qui peuvent guider ou encadrer l'individu en l'encourageant à apprendre et apprécier son apprentissage. En évitant d'imposer sa méthode et faire des reproches blessants, l'individu réagit positivement et consent tous ses efforts pour démontrer à son entourage qu'il est capable de réussir beaucoup de choses. L'individu est très sensible à son environnement. Le conditionnement classique n'est opérationnel que si l'action qui rattache le stimulus et la réaction de l'individu est répétée un bon nombre de fois.
Un souvenir amer
Je me souviens lorsque j'étais au lycée, j'avais un enseignant de chimie, qui avait pour vocation de traumatiser les élèves. Il ne se lassait jamais de nous lessiver et nous traiter de cons ou de bourriquots, il méprisait tout le monde et nous détestait à un point terrible. Comme à l'accoutumée, un jour, il nous demanda de corriger quelques exercices pratiques. Il demanda un volontaire pour monter au tableau, personne n'osait prendre le risque et lever la main. En prenant mon courage par mes dents, j'acceptai cette mission ô combien délicate, commençai à traiter l'exercice et avançai, jusqu'à ce que j'arrivai à un point délicat qui résista à mes capacités intellectuelles. Bref, je ne pus avancer! En remarquant,mon immobilité, l'enseignant se mit à avancer vers ma position, sans doute, pour me donner des détails capables de débloquer la situation. Au fur et à mesure qu'il se rapprochait de moi, je tendis l'oreille de façon active pour bien capter la réponse qu'il allait me souffler. En fin de compte, il m'envoya en bloc ceci: «Tu attends quoi pauvre con? Bien que nous eûmes pris l'habitude d'entendre toutes sortes d'injures provenant de l'enseignant, je me souviens, j'ai mis un laps de temps pour prendre conscience de cette insulte, qui est allée échouer au fond de mon subconscient. C'est comme ça, que je suis resté conditionné, pendant longtemps, pour détester et rejeter tout ce qui se rapportait à la chimie, parce qu'au fond de moi-même, la chimie me rappelait à quel point mon niveau d'intellect était faible.
Malheureusement, je ne suis pas la seule victime de notre système éducatif, qui passait, pendant des années pour un excellent système de conditionnement négatif, qui avait la capacité de convertir un très bon élève en un élément médiocre. Le conditionnement est en fait un moyen d'apprentissage très important, dans la mesure, où il permet de revoir sa façon de communiquer, de faire très attention aux micro-expressions de son corps pour programmer positivement son environnement et éviter les malentendus et mauvaises interprétations qui empoisonnent la relation sociale et empêchent l'humanité entière de s'épanouir.
En revenant à la relation managériale, citée plus haut, la responsabilité du manager ne peut se soustraire aux résultats parfois catastrophiques des collaborateurs. Qu'il soit positif ou négatif, le stimulus du manager renferme tous ses comportements, attitudes et sentiments développés à l'égard de l'assistant, qui sont traduits sous formes de micro-expressions du visage, ton de voix, gestes du corps, posture,...etc. Le stimulus est positif si le manager arrive à développer un feed-back motivateur chez le subordonné. Il est négatif à partir du moment où il déstabilise et diminue l'efficacité du comportement du subordonné. Dans ce cas, il est clair que le manager méprise le collaborateur et doute énormément de ses capacités. Et à force de répéter avec insistance et de rappeler les failles du collaborateur, celui-ci se verra réellement découragé, et inconsciemment, refusera de fournir le moindre effort. Parce qu'au fond, lui aussi, a fini par donner raison aux jugements de son manager. Seulement, qu'est-ce qu'il en est du comportement du collaborateur? Doit-on le considérer comme étant une victime expiatoire? A ce sujet, le docteur Ibrahim El Faki spécialiste dans la programmation neurolinguistique raconte: «Un jour, un homme de cirque ramène un petit éléphant pour l'entraîner et l'exploiter pour donner du spectacle au public. L'éléphant, installé dans son abri, ne supportait pas de se faire attacher avec cette solide chaîne de fer, qu'il tentât vainement de briser pour retrouver sa liberté. Il essaya à plusieurs reprises, mais il échoua. Au bout de quelque temps, parce que la chaîne donnait l'impression de résister, l'éléphant finit par abdiquer et abandonna l'idée de fuir devant une chaîne impossible à briser. Une année après, bien que l'éléphant ait pris du volume et de la force, il resta attaché à la même chaîne, parce qu'il fut convaincu qu'aucune force ne pouvait venir à bout de la chaîne en fer. «En réalité, l'éléphant resta prisonnier de sa pensée. A force de faire des reproches à son collaborateur et l'intimider de façon continue, celui-ci finit par perdre confiance en lui et c'est ainsi que son efficacité et ses performances diminuèrent au fur et à mesure pour devenir une sorte de machine à production qui n'a pas à chercher après l'affirmation de soi. Résultat de la situation: le comportement néfaste et méprisant du managera fini par conditionner négativement celui du collaborateur pour le rendre effectivement irresponsable et médiocre. Néanmoins le collaborateur, fort de son égo, assez sûr de lui, se doit d'affirmer sa personnalité en exprimant sérieusement son avis sur le projet que propose le manager.
La leçon de l'éléphant
Le collaborateur, dans l'obligation de réussir ses missions, se doit de trouver les arguments plausibles et les solutions capables de redresser les situations les plus délicates. Le collaborateur se doit de remplir ses missions dans les meilleures conditions qui soient. Il est aussi responsable que le manager, dans la mesure où sa part de travail dans le projet se constitue en condition sine qua non pour la réussite du projet du groupe. Le collaborateur devrait croire en ses capacités et savoir que personne ne peut mener aussi bien que lui sa mission. Un bon collaborateur, est supposé développer un état d'esprit, fait de responsabilité et de compétence, au même titre que son responsable. Un bon collaborateur doit inspirer confiance à ses collègues et ses responsable, sans toutefois toucher à leur sensibilité. Il ne fuit pas ses responsabilités, aide les autres à surmonter leurs difficultés, sans se vanter d'avoir fait quoi que ce soit. Un bon collaborateur n'attend pas les encouragements de ses responsables pour atteindre la performance, il s'auto-motive et dynamise son groupe, en donnant l'exemple. Un bon collaborateur est celui qui conditionne positivement son environnement.
En conclusion, qu'il soit collaborateur ou manager, la responsabilité des résultats dans l'entreprise est partagée. Seulement, développer un conditionnement positif tend à faciliter la relation interpersonnelle et crée un environnement fait de prédispositions à l'entente, l'entraide, l'échange et la créativité. L'objectif final est de créer un lieu de travail plaisant, où travailler est synonyme de progrès et de réussite, et c'est en rassemblant nos énergies que nous pouvons produire une société épanouie et pourquoi pas repousser les limites de l'impossible.
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