La délégation, qui s'est rendue dans cinq wilayas, affirme avoir effectué sa mission «sans aucun problème». «Le gouvernement algérien doit garantir l'indépendance de la justice et éviter tout projet d'amnistie qui consacrerait l'impunité». C'est la principale conclusion du rapport préliminaire, élaboré par la délégation de Human Rights Watch (HRW) qui séjourne en Algérie depuis le 13 du mois en cours. Cette organisation américaine des droits de l'homme «a fait entorse à la règle», en rendant publics, à travers une conférence de presse, organisée hier à l'hôtel Es Safir, les principaux volets de ce rapport. Une démarche qui est loin d'être fortuite. «Habituellement on revient dans le pays visité après avoir élaboré le rapport final. Mais dans le cas de l'Algérie, l'expérience nous a démontré qu'il n'est pas toujours facile d'avoir l'appui des autorités. Preuve en est, ajoute-t-il, depuis le mois de janvier 2003, les demandes régulières de délivrance de visas déposées par notre organisation n'avaient pas reçu d'approbation et ceci, jusqu'au mois de juin 2005», précise M.Eric Goldstein directeur de recherche pour le Proche-Orient et l'Afrique du Nord. Les appréhensions de Human Rights Watch persistent donc malgré les «assurances» des autorités algériennes. La mission de cette ONG a focalisé sur deux principaux volets: le premier concerne l'amnistie générale et le second a trait au fonctionnement de la justice. Sur le premier point, le conférencier a tenu à préciser d'emblée être «contre ce processus ne veut pas dire qu'on est contre la paix». «Nous ne demandons pas aux autorités algériennes de faire de la poursuite des bourreaux, le procès du siècle, mais il est important, note-t-il, de constater que l'amnistie doit passer inéluctablement par la vérité et la justice». Dans son rapport préliminaire, Human Rights Watch affirme que «si le gouvernement algérien veut sincèrement aboutir à une réconciliation nationale, il doit enquêter sérieusement sur les crimes atroces dont ont été victimes les Algériens et poursuivre en justice les responsables». En fait, la crainte des militants des droits de l'homme étant de voir le sort du projet emboîté le pas à celui de la concorde civile qui a «blanchi des militants dont la main est tachée de sang». Une responsabilité qui incombe entre autres aux commissions d'approbation mises en place pour enquêter sur le passé des repentis, «lesquels n'ont jamais fonctionné». HRW s'est également intéressée au fonctionnement de l'appareil judiciaire. Sur ce chapitre, le rapport souligne que malgré quelques changements introduits dans le cadre de la réforme de la justice initiée par le président M.Abdelaziz Bouteflika, «les tribunaux continuent de montrer un manque d'indépendance dans le traitement des affaires politiques». C'est le cas des plaintes déposées par les familles des disparus n'ayant reçu aucune suite. Eric Goldstein est revenu sur la détention provisoire qui «est devenue la règle et non l'exception», ainsi que «sur le refus d'enquêter lorsque des détenus affirment avoir subi des tortures pour leur faire avouer leurs supposés crimes». L'organisation a déclaré que «la réforme de l'appareil judiciaire ne suffit pas sans une volonté politique inflexible». Enfin, la délégation qui s'est rendue dans cinq wilayas, en l'occurrence, Alger, Oran, Blida et Laghouat, affirme avoir effectué sa mission «sans aucun problème», excepté dans la wilaya de Relizane où des agents de sécurité en civil ont suivi de près leurs déplacements. En outre, par crainte beaucoup de personnes interrogées ont préféré témoigner sous le seau de l'anonymat, note Eric Goldstein.