Les Palestiniens attendent des Arabes un soutien autant actif que désintéressé. Mais la réunion, prévue demain au Caire, du Conseil ministériel arabe aura-t-elle lieu? Encore une fois les Palestiniens risquent de se retrouver seuls face à l'indécision et aux dissensions qui minent les rangs des Arabes. Dans un discours prononcé à l'occasion de l'Aïd el-Fitr, le président palestinien a eu le courage de prendre ses responsabilités dans un contexte qui est loin d'être favorable à la cause palestinienne. En appelant les résistants palestiniens à arrêter les opérations contre les Israéliens, il a fait le geste qui était attendu de lui par la communauté internationale. Mais pour que cet appel ait du répondant autant auprès des résistants palestiniens (notamment Hamas et le Djihad islamique) que de la partie israélienne, Yasser Arafat, - pratiquement assigné à résidence à Ramallah - avait besoin d'un solide soutien arabe. Ce soutien devrait se concrétiser lors de la réunion de demain au Caire du Conseil ministériel de la Ligue arabe (ministres des Affaires étrangères). Or, il semble, au vu des premières réactions au discours du président palestinien, que cette réunion peut aussi bien ne pas avoir lieu du fait des dissensions apparues entre ceux soutenant la démarche du président palestinien (l'Egypte et la Jordanie, ces deux pays ayant des relations diplomatiques avec l'Etat hébreu) et ceux qui y sont opposés (comme la Syrie). C'est un peu le syndrome arabe qui fait que les Arabes ne s'accordent que sur un seul point: ne jamais avoir un quelconque consensus leur permettant de parler d'une seule voix. Et ce sont encore les Palestiniens, qui n'ont jamais été aussi isolés, qui risquent de faire les frais de la pusillanimité des dirigeants arabes qui n'ont pas su être au niveau de leurs responsabilités historiques envers le peuple palestinien. Celui-ci se bat depuis plus d'une année à mains nues face à la seule (et véritable) puissance militaire du Proche-Orient, Israël, qui déploie contre les enfants et les adolescents palestiniens des chars d'assaut, des hélicoptères de combat et autres bombardiers F15 et F16. Rien que ça! Qu'ont fait les Arabes pour aider un peuple acculé, dont le pays est menacé d'être rayé de la carte politique régionale, et dont la résistance est assimilée par Israël, soutenue par les Etats-Unis, à du terrorisme? Qu'ont fait les Arabes pour dénoncer ce traitement inéquitable de la question palestinienne et la démission de l'ONU et de la communauté internationale de leurs responsabilités envers un peuple en danger de mort? Le Caire peut être (demain) un moment fort dans la prise en charge par les Etats arabes d'une véritable campagne diplomatique à même de rétablir, à tout le moins, les faits et faire un sort à cet étrange comportement de l'opinion publique internationale qui condamne la résistance de David dans le même temps où elle absout le s de Goliath. Et c'est bien de ce combat inégal qu'il s'agit: le David palestinien face au Goliath israélien qui use de toute sa puissance militaire pour amener à composition le peuple palestinien. Mais avant même que les ministres arabes des Affaires étrangères arrivent au Caire, les échos, qui parviennent de la capitale égyptienne, ne cessent de renforcer le pessimisme de ceux qui ne croient plus à une action arabe concertée et sans équivoque. Aussi, les surenchères des uns et des autres ne font-elles qu'embrouiller la donne sans pour autant conforter l'aide dont les Palestiniens ont le plus besoin en ces moments difficiles où ils sont à la merci de la furie criminelle du chef du gouvernement israélien. Dès lors, il est plus que probable que la réunion du Caire connaîtra le sort de toutes ses précédentes qui se sont achevées sans prise de décisions fermes pour soulager, un tant soit peu, les Palestiniens de la situation d'étranglement où ils se trouvent. A ce propos, combien d'Etats arabes se sont acquittés de leur quote-part (financière) arrêtée par le sommet d'Amman de mars 2000 en faveur de l'Autorité autonome palestinienne? C'est dire combien est complexe la position arabe où le discours (sans engagement) a toujours pris le pas sur l'action et la prise de décision tandis que les Palestiniens réclamaient de la part des Arabes un soutien sans calcul pour leur donner l'occasion d'avoir à exprimer leurs droits à l'autodétermination et à l'indépendance. Alors que l'incertitude plane sur la réunion du Caire du Conseil ministériel arabe, le président irakien, Saddam Hussein, appelle à un sommet «urgent» des chefs d'Etats arabes. Pour quoi faire, peut-on se demander, quand un soutien arabe sans marchandage au peuple martyr de Palestine n'a nul besoin de ces sommets marqués par les désolants spectacles où les Arabes ont plus étalé leurs divisions que leur solidarité effective envers un peuple qui se meurt!