Les feux de la rampe seront braqués sur la vie, les oeuvres de ce grand musicologue universaliste. L'Association Etoile culturelle d'Akbou organise à partir d'aujourd'hui à la Maison de la culture de Béjaïa et ce, jusqu'au 08 juillet, la 7e édition du Festival musical de la Soummam. Cette fois-ci, les feux de la rampe seront braqués sur la vie, les oeuvres du grand musicologue universaliste, si peu connu chez nous et paradoxalement pas du tout ignoré dans l'Europe entière. Il s'agit de ce grand polyglotte Mohamed Iguerbouchène, dont le parcours et l'ensemble de ses oeuvres seront présentés par l'Etoile culturelle tout au long de cette semaine. Et par là même réhabiliter la mémoire de toutes les richesses culturelles du pays que sont les fils éclairés de l'Algérie entière. Lancé lors d'une rencontre musicale, au niveau de la Soummam en 1995, pour clore une année pleine d'activités le carrefour de notes musicales rassemblant des jeunes de diverses wilayas du pays, a pris son envol dès 1996. Après quatre années d'absence due aux événements qu'a connus la région, le Festival musical de la Soummam revient, donnant naissance au carrefour musical de la Soummam, avec les mêmes objectifs, à savoir la consécration d'une année de travail en direction des jeunes, l'hommage à une personnalité intellectuelle et artistique du pays et l'union dans la diversité socioculturelle. Dans un élan d'innovation, l'Etoile culturelle d'Akbou veut inscrire le carrefour dans la durée et dans l'espace. Cette manifestation culturelle rassemblera une vingtaine de délégations des wilayas, constituant la «petite Algérie», au contact d'autres groupes des pays d'outre- mer. Mohamed Iguerbouchène est né le 13 novembre 1907 à Aït Ouchen. Il était originaire des Agribs, près d'Azzefoun, wilaya de Tizi-Ouzou. Adolescent, il découvre les concerts publics au square Bresson (Alger). Surtout, il accompagnait à la flûte, les airs qu'entonnait sa mère. C'est là, sur le seuil de la porte de son domicile, à La Casbah, qu'il fut remarqué par un peintre, Frazer Ross, qui pria le comte Roth, riche anglais, de solliciter le père de Mohamed pour une prise en charge des études approfondies en musique, en Angleterre, de notre flûtiste. Ainsi, Mohamed quitte l'école primaire «Sidi M'hamed Chérif» pour la «Royal Academy of Music» où il suit des cours sur l'harmonie musicale sous la houlette d'un certain Levingston. Encadré par le professeur Alfred Grimfeld, Mohamed se perfectionne à Vienne, en Autriche. A 18 ans, il donne son premier concert, au cachet typiquement algérien, au niveau du Conservatoire national supérieur de Vienne, à Bregenez, sur le lac Constance. Son perfectionnement se poursuit encore en France, en Italie, en Allemagne et en Suisse. A partir de là, son chemin est tracé. Il est sollicité de toutes parts. Il se lance dans la composition des symphonies, de chansons, de musiques pour films, opérettes et pièces théâtrales. Il a même été sollicité par la colossale MGM et était à la tête de l'orchestre symphonique de la BBC (Angleterre) avec la 3e Rhapsodie mauresque. Il est l'auteur de 350 oeuvres, dont les musiques de films tels que Dzaïr, Pépé le Moko, Terre idéale, Kaddour à Paris, La Casbah, Alger pour André Serrouy. Des musiques pour Fort de la solitude, Ecole foraine, Renégate pour Jean Savanac. Chant d'amour de l'Islam, d'Orient et cabaret. Il composa pour les Algériens en France comme Salim Hellali, Meziani Ahcène, Mohamed Hamel, Cheikh Nourredine, Mohamed Zinet (Aziza), Naguib Soraya, Cheikh El Hasnaoui, Farid Ali (yemma s'ber ouratsrou). Pour le théâtre, Mohamed a composé pour La mort d'Abou Nouas avec Max Derieux et pour le compte de la RTF avec Jacques Bertheaux. A la SACEM, où il était admis et à la Société des Arts dramatiques, il compose une centaine de mélodies pour les poèmes de Robin Dranah Tagor et obtient le 1er prix de piano à Vienne en 1926. Parmi ses oeuvres, on compte Rhapsodies kabyles, Une nuit à Grenade en hommage à Mohammed V. Il assura la direction de «Paris Mondial» en 1940 et en 1956, il crée la chaîne «Paris Inter». Il fut aussi chef d'orchestre aux Elak (Emissions en langue arabe et kabyle) à Alger. Après 1962, il composa des mélodies pour la RTA. Après ses débuts à l'école primaire, il fît un chemin extraordinaire. Il est devenu, à force d'études, de volonté et d'amour, le musicien universel, peu connu chez lui. Il parlait couramment l'allemand, l'espagnol, l'anglais, le français, l'arabe et le kabyle. Il meurt, emporté par le diabète, le 23 août 1966, dans le triste anonymat.