Le prince héritier Mohammed ben Salmane trace son chemin Plus de 200 personnes ont été arrêtées en Arabie saoudite dans le cadre d'une purge anticorruption sans précédent. Cette annonce intervient dans un climat de plus en plus tendu avec l'Iran et après la démission du Premier ministre libanais Saâd Hariri - proche de Riyadh -, un an après avoir formé un gouvernement avec le Hezbollah. «Un total de 208 personnes ont été convoquées pour interrogatoire jusqu'à présent. Sur ces 208 personnes, sept ont été relâchées sans être inculpées. L'ampleur potentielle des actes de corruption révélés est très grande», a indiqué le procureur général du royaume dans un communiqué. Les sommes concernées par ces malversations atteignent 100 milliards de dollars (86,1 milliards d'euros) «sur quelques dizaines d'années», selon la même source, qui parle d'une enquête sur trois ans. Les autorités ont gelé les comptes bancaires des suspects et prévenu que tout actif qui serait lié à des affaires de corruption serait saisi au profit de l'Etat. Les personnalités arrêtées - et détenues dans un lieu non précisé par les autorités - vont être jugées devant un tribunal, a indiqué lundi dernier le procureur général. Mais cette vague d'arrestations pourrait aussi faire partie d'une lutte pour le pouvoir, a souligné mercredi Human Rights Watch (HRW). Elle intervient en tout cas au moment où Mohammed ben Salmane consolide son pouvoir et tente d'introduire des réformes économiques et sociales inédites. Contrôlant les principaux leviers du gouvernement, de la défense à l'économie, le jeune prince héritier semble chercher à étouffer les contestations internes avant tout transfert formel du pouvoir par son père, le roi Salmane, âgé de 81 ans. Signe que c'est l'homme fort du pays, c'est lui qui a reçu jeudi soir à Riyadh le président français Emmanuel Macron, qui a annoncé cette visite surprise alors qu'il se trouvait aux Emirats arabes unis pour le lancement du Louvre Abu Dhabi. Cette purge anticorruption intervient dans un climat politique et diplomatique très tendu, avec des échanges de plus en plus vifs entre l'Arabie et son rival iranien, ces deux grandes puissances s'opposant sur de nombreux dossiers, dont les guerres en Syrie et au Yémen. Quelques jours plus tôt, le protégé de l'Arabie saoudite, Saâd Hariri, avait annoncé sa démission depuis le royaume en accusant le Hezbollah et son allié iranien de «mainmise» sur le Liban. Dimanche, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dont le mouvement était membre de la coalition gouvernementale de M. Hariri, a accusé Riyadh d'avoir contraint Saâd Hariri à la démission.Au Yémen, l'Arabie saoudite a lancé en mars 2015 une opération militaire à la tête d'une coalition pour empêcher des rebelles, accusés d'être appuyés par Téhéran, de prendre le contrôle de l'ensemble de ce pays voisin. Riyadh a accusé mercredi l'Iran «d'agression directe» après le tir d'un missile en direction de l'aéroport international de Riyadh par les rebelles.