«J'ai décidé de revenir pour chanter en Algérie, car j'ai vu qu'il y a réellement une volonté de reconnaître la langue et l'identité amazighes» L'absence d'Idir est seulement au plan professionnel. «Je suis un Algérien à part entière. Je n'ai que le passeport et la carte d'identité algériens. Je n'ai jamais quitté réellement l'Algérie. Je viens quatre à cinq fois chaque année.» C'est avec ces phrases lourdes de sens que le monstre de la chanson kabyle, Idir, a répondu hier, lors d'une conférence de presse qu'il a animée au complexe sportif Mohamed-Boudiaf avant son concert d'aujourd'hui et demain à une question d'un confrère, portant sur son émotion en retournant en Algérie après 39 ans d'absence. «Le retour d'Idir est ainsi uniquement professionnel»,a -t-il expliqué. Pourquoi l'auteur de la chanson universelle Avava Inouva a refusé de chanter en Algérie durant toute cette période? L'enfant prodige de Beni Yenni a fait savoir que ce n'est pas un choix qu'il a fait, mais il a été poussé à agir ainsi. «J'ai refusé de chanter en Algérie, car j'ai ressenti que j'étais indésirable et que le régime me voyait comme un Algérien à part. Ceci m'a fait beaucoup de peine et m'a blessé au plus profond de moi-même», a ajouté Idir, avec un pincement dans la voix. A la question: «Est-ce que c'est la seule raison pour laquelle Idir a boudé la scène artistique algérienne?», le chanteur mondialement connu a indiqué qu'il y a aussi d'autres raisons qui sont malheureusement plus graves. «J'ai décidé de ne plus chanter en Algérie, car j'ai vu aussi que ma langue a été opprimée et que mon identité a été spoliée», a poursuivi Idir, indiquant que l'Algérie sans tamazight n'est pas l'Algérie. Pour étayer davantage ses propos et enlever toute équivoque, quant à ses raisons de se retirer de la scène artistique, l'icône de la chanson kabyle a signifié que la meilleure preuve pouvant justifier ses propos réside dans son retour, maintenant, après l'officialisation de la langue amazighe. Et d'ajouter: «J'ai décidé de revenir pour chanter en Algérie, car j'ai vu qu'il y a réellement une volonté de reconnaître la langue et l'identité amazighes.» «Est-ce que l'officialisation de tamazight et la reconnaissance de Yennayer suffisent pour se réconcilier avec l'identité algérienne?», Idir a répondu par la négative. «La langue amazighe a besoin davantage d'intérêt et d'attention. Elle doit bénéficier de la même attention que celle accordée à la langue arabe. L'autre raison qui a poussé Idir à revenir en Algérie est le travail important que fait l'Onda et le dynamisme de son directeur, a indiqué le conférencier. Abordant ensuite son concert d'aujourd'hui et demain, Idir a fait savoir qu'il fera de son mieux pour satisfaire son public qu'il a hâte de rencontrer. «On a pratiquement tout préparé. Je serai accompagné par un orchestre composé de 40 musiciens qui seront sous la houlette du maestro Mehdi Zeouiche. J'ai tenu à ce que tous les instruments musicaux utilisés dans mes chansons soient présents», a souligné Idir. Sur la question de savoir est-ce qu'il a prévu des duos durant ses concerts. le chantre de la chanson kabyle a précisé que le seul duos qui pourrait avoir lieu est celui avec Lounis Ait Menguellet. Ce duo pour Idir, n'est pas confirmé, car aux dernières nouvelles Lounis souffrirait d'une grippe aiguë. La chanteuse Kabyle, Thanina, sera présente sur scène. Quant à la présence des chanteurs français, à l'image de Gérard Lenorman et Maxime Le Forestier, Idir a tenu à préciser que Le Forestier sera présent, tandis que Gérard Lenorman s'est excusé de ne pouvoir venir pour des raisons ayant trait à la réaction du public algérien par rapport à ses origines. Pour en revenir à la présence des chanteurs français, l'auteur de la fameuse chanson Sendou, a fait savoir que ce n'est pas lui qui les a invités, mais ce sont eux qui se sont portés volontaires. Le concert d'aujourd'hui verra aussi la tenue d'un vibrant hommage au grand écrivain Mouloud Mammeri. Une chorale de Ath Yenni viendra spécialement pour chanter une chanson à sa mémoire. A la question de savoir si Idir va rendre un hommage à Matoub Lounès, le conférencier a indiqué qu'il a déjà rendu un hommage à ce dernier à travers la chanson Tizi Ouzou. Sollicité par ailleurs sur la possibilité de chanter en arabe, Idir a indiqué que ce n'est pas impossible, dès lors qu'il a déjà chanté avec beaucoup d'artistes arabophones. Sur son avis quant à l'état de la chanson kabyle, le conférencier a indiqué en toute modestie qu'il est mal placé pour le faire. Néanmoins, au vu de ce qu'il écoute la chanson kabyle a perdu beaucoup de son âme. «Elle ne véhicule plus de messages. Elle est loin de la réalité», dira-t-il. Interrogé en outre, sur l'éventualité de le voir s'intéresser à l'avenir aux questions politiques en Algérie, le conférencier a rétorqué, en disant qu'il n'est point un homme politique et que la politique est un métier. Sur la question de savoir si les commentaires de certains militants appartenant au mouvement MAK le dérangent, quand ils disent que Idir a changé de veste et qu'il a tourné le dos à son combat pour l'identité, Idir a déclaré que ces derniers sont libres dans leurs pensées, néanmoins, ils n'ont pas le droit de l'empêcher de faire ce dont il est convaincu. Et de s'adresser à eux: «Idir que vous aimiez hier, est le même que celui d'aujourd'hui.» Le concert de la Coupole ne sera pas le dernier, a fait savoir Idir. Je chanterai en Algérie tant que je pourrai. Et d'annoncer que beaucoup de concerts auront lieu vers la mi-juin dans beaucoup de wilayas (Tizi Ouzou, Béjaïa, Bouira, Constantine et Batna.