Les combats ont fait au moins dix morts La milice armée qui a ciblé la base de Mitiga, une infrastructure jadis réservée aux importations de matériels sensibles, a justifié son action par la volonté de libérer un certain nombre de ses militants détenus avec les 2500 personnes présentes dans cette prison... C'est maintenant un cycle habituel que de voir, tous les deux ou trois mois, une des nombreuses milices réparties entre Misrata, Tripoli et d'autres villes de moindre importance, lancer des attaques meurtrières sur l'aéroport de Mitiga, dans les environs de la capitale, sachant que l'ancien aéroport international a été gravement endommagé par les bombardements de l'Otan en 2011. Au moins neuf personnes sont mortes hier dans de nouveaux combats qui ont éclaté dans ce secteur stratégique pour la survie du processus de réconciliation nationale engagé sous la férule de l'ONU. L'attaque a été annoncée par le gouvernement d'union que préside Fayez al Serraj, ce qui montre à quel point les autorités intérimaires libyennes prennent au sérieux ce nouvel incident, à l'heure où d'intenses efforts sont déployés pour concrétiser la feuille de route présentée au Conseil de sécurité de l'ONU par l'envoyé spécial Ghassan Salamé, selon laquelle des élections législatives et présidentielle devraient avoir lieu au cours de cette année. «Le premier bilan à la suite des combats dans le périmètre de l'aéroport de Mitiga est de cinq morts (transportés) à l'hôpital de Mitiga et quatre autres à l'hôpital (...) de Tajoura», a indiqué sur sa page Facebook le ministère de la Santé du GNA, sans pour autant indiquer s'il s'agit de civils ou de militaires aussi bien pour les morts que pour les blessés. Echaudée par les attaques précédentes, la direction de l'unique infrastructure aéroportuaire disponible a procédé immédiatement à la fermeture de l'aéroport et elle a annoncé la suspension totale du trafic pour cause de risques graves. La milice armée qui a ciblé la base de Mitiga, une infrastructure jadis réservée aux importations de matériels sensibles, a justifié son action par la volonté de libérer un certain nombre de ses militants détenus avec les 2500 personnes présentes dans cette prison pour des affaires diverses. Se justifiant sur sa page Facebook, le groupe armé qui se nomme Al Radaa a expliqué sobrement que son objectif vise à «sécuriser» le site de Mitiga. De son côté, le GNA n'a pas tardé à réagir en condamnant dans un communiqué cette «attaque préméditée mettant en péril la vie des passagers et la sécurité de l'aviation civile». «Cette attaque visait la libération de terroristes appartenant aux organisations Etat islamique (EI) et Al-Qaïda et d'autres groupes du centre de détention géré par la Force de dissuasion al-Radaa qui dépend du ministère de l'Intérieur», a précisé le GNA. «Le personnel de l'aéroport et les passagers ont été évacués» lorsque les combats ont commencé, a confirmé un témoin qui a évoqué «des chars en train d'investir l'intérieur du périmètre aéroportuaire». Depuis la fin des combats à Syrte où Daesh a été vaincu, l'ensemble de la Tripolitaine bénéficie d'une accalmie relative, même si sporadiquement des combats éclatent dans le site particulièrement sensible de Mitiga, objet d'une rivalité et d'un bras de fer permanent entre les différentes milices qui souhaitent chacune le contrôler pour son bénéfice exclusif. La Force de dissuasion al-Radaa qui agit sous le mandat du GNA auquel elle a affirmé sa loyauté est constituée essentiellement par des salafistes, dont la base se trouve à l'est de la capitale. Son rôle est crucial dans la mesure où il lui revient de pourchasser les trafiquants et de prévenir la création éventuelle de cellules favorables à Daesh. Hier matin, les échanges de tirs à l'arme lourde pouvaient être entendus jusqu'à Tajoura, une bourgade située à 30 kilomètres à l'est de Tripoli. Les informations concordent pour dire que l'ensemble des voies d'accès vers et depuis Mitiga ont été fermées. C'est dans ce contexte préoccupant que la Haute Commission nationale électorale «Hcne» vient d'annoncer que le nombre des électeurs inscrits entre le 8 et le 18 décembre 2017 a atteint 2005 814 électeurs, ce qui témoigne d'un réel progrès dans la préparation effective des élections prévues par la feuille de route de l'envoyé spécial de l'ONU. Dans son rapport quotidien publié sur sa page électronique, la Hcne avance ce nombre des inscrits, tout en précisant que les femmes sont au nombre de 7 070. Depuis que le maréchal Khalifa Haftar a dû, contraint et forcé, se résoudre à adhérer au processus, il faut espérer que toutes les milices consentent à jouer le jeu de la démocratie. Un pari audacieux, sans aucun doute.