Des opérations d'identification des corps sont engagées dans l'espoir de retrouver ceux des deux diplomates. Après la consternation, les condamnations, les messages de solidarité exprimés ici et là, l'heure était, hier, à la prière et au recueillement. Vêtus de gandouras blanches, d'autres, en tenue civile, proches et voisins de la victime s'empressent à rejoindre la mosquée pour la prière «d'el ghaïb» (l'Absent) décidée, dit-on ici dans le quartier Armaf de Chevalley à Alger - où réside la famille Belaroussi - par le ministère des Affaires religieuses sur l'ensemble des mosquées du pays. Dans son prêche, si l'imam ne s'est pas exprimé de façon formelle sur l'assassinat des deux diplomates, il n'a pas manqué toutefois, du haut de son minbar (la tribune) d'appeler les gens à la patience «notamment dans les moments les plus douloureux de la vie» et «surtout éviter de nourrir les polémiques et verser dans les fausses interprétations», a-t-il poursuivi. Mais à vrai dire, la patience a bien des limites. Les proches du défunt ne cachent pas leur angoisse quant à la restitution par les terroristes de Zarkaoui des dépouilles mortelles à leurs familles respectives et craignent le même scénario que celui de l'ambassadeur égyptien assassiné par le même groupe et dont le corps n'a pas été, à ce jour, retrouvé. Tous les regards sont tournés depuis mercredi soir vers la capitale irakienne où, selon certains proches de la victime, des opérations d'identification des corps sont menées au niveau de l'aéroport de Bagdad: «Pas plus tard qu'hier deux corps ont été identifiés mais hélas ce ne sont pas ceux des nôtres», confie un neveu du défunt pour qui la mort certaine et officielle des deux diplomates n'a pas de sens ni même de crédit sans le rapatriement des dépouilles au pays. Garde-t-on pour autant l'espoir de retrouver vivants les deux diplomates? A cette question aussi hâtive qu'hasardeuse nos interlocuteurs répondent par l'affirmative: «Et si c'était une ruse fomentée par les terroristes?» s'interroge le neveu. «Tant que les corps ne sont pas rapatriés, toutes les hypothèses restent plausibles» assure-t-il. Jeudi, le fils et l'une des trois filles Belaroussi se sont envolés pour la capitale jordanienne où ils devaient rejoindre leur mère et tous les représentants diplomatiques évacués de Bagdad depuis jeudi dernier. «Ils sont partis soutenir leur mère dans un contexte extrêmement difficile.» Depuis Amman, les enfants Belaroussi auront éventuellement à apporter une quelconque assistance aux efforts déployés par les autorités algériennes et irakiennes pour retrouver les cadavres. Le gouvernement, en condamnant l'assassinat et en le qualifiant d'«agression» contre le pays, s'est fait par là même, le devoir de rapatrier les corps des victimes. «Alors que l'Etat déployait tous les moyens pour libérer les deux otages, des voix, citées par quelques journaux, ont accusé de faiblesse les autorités» s'indigne notre interlocuteur qui tient à démentir ces «allégations» faites au nom de la famille de Belaroussi, notamment à Guemmar dans la wilaya d'El Oued d'où elle est originaire. Citées dans un quotidien national arabophone, des personnes se présentant comme proches de la victime avaient vivement critiqué et accusé les pouvoirs publics de ne rien faire pour la libération des deux diplomates enlevés. D'autres ont poussé le bouchon plus loin en demandant carrément la démission du ministre des Affaires étrangères. La même indignation est exprimée par rapport à la réaction d'Ali Benhadj, ex-numéro deux de l'ex-FIS. Interrogé par la chaîne de télévision qatarie El Jazeera, celui-ci avait justifié le meurtre des deux Algériens au nom d'un fanatisme auquel il semble tout fier d'appartenir. «On aurait souhaité un message de solidarité mais...» se désole notre source. Hormis cette fausse note regrettable, les marques de sympathie et les messages de solidarité se profilent depuis l'annonce de la mort des deux diplomates. Des personnalités politiques notamment font la noria au domicile de Belaroussi. Mercredi 27 juillet, quelques heures après le drame, c'était au ministre des Affaires étrangères de venir à Chevalley exprimer ses condoléances. Suivi le lendemain, jeudi, par l'ambassadeur d'Irak ainsi que certains hommes politiques dont l'ancien Premier ministre, Belaïd Abdesselam. Tous sont venus dire la solidarité à un homme qui a consacré toute sa vie au service du pays, notamment dans les situations difficiles comme celle de la guerre en Irak. Il lui restait quelques jours pour achever sa mission en Mésopotamie mais le destin a voulu que les choses se passent autrement. Appartenant à la zaouia Tidjania, hier, les membres de la famille devaient donner à Alger dans les pures traditions de cette confrérie, une cérémonie d'adieu au défunt.