C'est là une reconnaissance de l'expérience algérienne et un mea culpa implicite de la Grande-Bretagne. Ce week-end a été marqué par deux faits majeurs: les entretiens téléphoniques entre le chef de l'Etat, le Premier ministre britannique et le secrétaire général des Nations unies. Des «contacts» qui interviennent, il est utile de le rappeler, dans une conjoncture internationale caractérisée par l'escalade des attentats terroristes, aussi bien en Irak que dans les pays impliqués dans cette guerre. Les discussions Bouteflika-Annan, d'une part et Bouteflika-Blair de l'autre, renseignent, si besoin est, de la place de l'Algérie sur l'échiquier international. En effet, le président de la République vient d'être invité par le Premier ministre britannique « à des entretiens plus approfondis à Londres sur l'ensemble des questions évoquées, à la fois pour renforcer les relations bilatérales et pour échanger leurs points de vue respectifs sur les problèmes régionaux et internationaux». C'est ce qui ressort de l'entretien téléphonique qu'ont eu jeudi dernier les deux hommes et qui coïncide, il est utile de le rappeler, avec la nouvelle menace d'Al Qaîda à l'égard des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne. Le Premier ministre britannique, Tony Blair, a violemment réagi, hier, aux menaces «révoltantes» du numéro deux d'Al Qaîda, estimant que «ceux qui ont fait des déclarations, hier, sont aussi ceux qui sont d'accord pour tuer des innocents en Irak, des innocents en Afghanistan et des innocents dans tous les pays démocratiques du monde». Tony Blair qui vient d'annoncer, le même jour, de nouvelles mesures radicales et strictes contre le terrorisme et l'asile au Royaume-Uni, compte, à travers son invitation au chef de l'Etat, évoquer avec ce dernier les grands axes de la coopération entre Londres et Alger «tous les aspects du renforcement des relations bilatérales aux plans politique, sécuritaire, économique et culturel», indique-t-on de sources officielles. Un geste de reconnaissance C'est là aussi, à la fois une reconnaissance de l'expérience algérienne en matière de lutte antiterroriste et surtout un mea culpa implicite du rôle joué par la Grande-Bretagne dans l'avènement de l'islamisme radical. En outre, les entretiens Bouteflika-Blair, qui s'inscrivent dans l'esprit de la coopération antiterroriste entre l'Algérie et la Grande-Bretagne, et plus particulièrement le message de soutien adressé par le chef de l'Etat à Tony Blair au lendemain des attentats sanglants de Londres, marquent la détermination d'Alger à poursuivre son rôle pilote dans la lutte antiterroriste dans les pays arabes et africains. Dans ce contexte, et fidèle à ses positions de principe, l'Algérie, a, par la voix de son représentant permanent aux Nations unies, Abdallah Baali, condamné «avec la plus grande énergie» les attentats perpétrés en Irak. Intervenant devant le Conseil de sécurité de l'ONU, à l'occasion de l'adoption par ce dernier d'une résolution condamnant le terrorisme en Irak, le diplomate algérien a rappelé que «le Conseil de sécurité a pour mandat de combattre avec la plus grande détermination le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations jusqu'à son éradication définitive». Cependant, M.Baali n'a pas manqué de rappeler la position de l'Algérie demandant le départ des forces étrangères d'Irak pour permettre au peuple de ce pays de décider de son sort, en dehors de toute pression. Pour M.Baali, «la lutte contre le terrorisme doit, dans le même temps, s'accompagner, en Irak d'une intensification des efforts en vue de conduire le processus politique à son terme et d'assurer une transition de nature à permettre à ce pays de recouvrer sa pleine souveraineté et de préserver son unité et son intégrité territoriale». Un point qui a fait l'objet, jeudi d'un entretien téléphonique entre le chef de l'Etat et le secrétaire général des Nations unies, M.Kofi Annan. D'après une source officielle, les deux hommes ont fait «un tour d'horizon sur les questions régionales, continentales, arabes et internationales». Ces entretiens coïncident aussi avec la tenue à Addis Abeba d'un sommet extraordinaire de l'Union africaine, qui avait inscrit à son ordre du jour les dossiers de la lutte antiterroriste et de la réforme de l'ONU. A noter que l'Algérie, qui abrite le siège du centre africain de prévention et de lutte contre le terrorisme, avait lors de la décennie rouge attiré l'attention des principales capitales occidentales, qui subissent aujourd'hui l'effet boomerang de leur passivité, voire même de leur complaisance vis-à-vis des activistes islamistes, sur le caractère transnational du terrorisme. A l'époque, Londres, Paris, Washington, Rome et Berlin, servaient de «tanières» aux chefs terroristes qui n'hésitaient pas à revendiquer les carnages perpétrés en Algérie. Annouar Haddam, qui continue de jouir de l'«hospitalité» de la Maison-Blanche n'a-t-il pas revendiqué l'attentat du Boulevard Amirouche, à partir du pays de l'oncle Sam? Un partenaire incontournable L'invitation du chef de l'Etat à se rendre dans la capitale britannique, se veut, par ailleurs, un geste de gratitude envers notre pays, qui, tout en s'engageant dans la voie de la réconciliation nationale, s'engage résolument dans le processus international de lutte antiterroriste né au lendemain des attentats du 11 septembre aux Etats-Unis. Cette invitation, tombe aussi à point nommé, à savoir, au moment où le chef de l'Etat égyptien pressé par la rue et les attentats de Charm El Cheikh, s'est permis, à travers une flagrante manoeuvre de diversion, de convoquer un sommet extraordinaire de la Ligue arabe. Une récidive de la part de Hosni Moubarak, qui avait déjà considéré en pleine fièvre du GMO, que l'Algérie est loin d'être un modèle, en matière d'ouverture démocratique. Toutefois, l'Algérie ne voulant pas entrer dans une polémique stérile, a, tout en annonçant sa participation à ce sommet, en tant que simple pays membre, refusé de présider l'édition de Charm El Cheikh, rejetant ainsi la politique du fait accompli affichée par le président égyptien et son compatriote secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. L'objectif du chef de l'Etat égyptien est non seulement de se poser comme le «pilier» de la lutte antiterroriste dans les pays arabes, mais aussi de dirigeant de toute la nation arabe. Là aussi, le président égyptien semble s'être trompé de «cible», maintenant que l'Algérie est aux yeux de l'Occident le partenaire incontournable dans la lutte antiterroriste. D'ailleurs, les entretiens entre le chef de l'Etat et le secrétaire général de l'ONU, ont, outre la réforme de l'organisation, passé en revue la tenue en septembre prochain d'une session de l'Assemblée générale de l'ONU, consacrée à la lutte antiterroriste. Un événement qui coïncide avec la commémoration du soixantième anniversaire de l'organisation onusienne. A cette occasion les chefs d'Etat du monde entier seront amenés à adopter une convention internationale de lutte antiterroriste. Un document, longtemps bloqué par Washington et Londres. Ces derniers, versant dans l'amalgame, refusent le qualificatif de mouvements de libération de la résistance palestinienne, les assimilant à de simples groupes terroristes. Une approche que l'Algérie a de tout temps rejetée, car la remise en cause de la lutte des peuples pour le recouvrement de leur indépendance, remettrait en cause l'esprit de Novembre et tous les mouvements de libération à travers le monde.