L'Irak se trouve face à un défi gigantesque, reconstruire ce que quatre décennies de guerres ont détruit L'Irak, meurtri par quatre décennies de guerres et de sanctions internationales, cherche à récolter 88 milliards de dollars pour se reconstruire, un chantier titanesque entamé hier avec l'ouverture d'une conférence internationale au Koweït. Pendant trois jours, des centaines de responsables politiques, d'ONG et d'hommes d'affaires sont attendus à cette conférence. Baghdad mise notamment sur le secteur privé pour lever des fonds au plus vite, alors que des milliers d'habitations sont détruites et plus de 2,5 millions de personnes déplacées. Ravagé depuis les années 1980 par les guerres à répétition et un long embargo, notamment après l'invasion du Koweït en 1990, l'Irak a annoncé il y a deux mois la «fin» d'une nouvelle guerre, cette fois contre les jihadistes du groupe Etat islamique (EI), qui s'étaient emparés d'un tiers de son territoire à partir de 2014, menaçant son existence même. Mais la reconstruction du pays, deuxième producteur de pétrole de l'Opep, s'annonce longue et difficile. «Nous estimons que les besoins totaux de reconstruction en Irak s'élèvent à 88,2 milliards de dollars (71,9 milliards d'euros)», a déclaré le ministre irakien de la Planification, Salmane al-Joumeili, à l'ouverture de la conférence. Ces fonds «serviront d'abord à réhabiliter les personnes déplacées et reconstruire les services publics», a-t-il ensuite précisé. Selon Qusai Abdelfattah, directeur général au sein du ministère de la Planification, 22 milliards de dollars de ces fonds sont nécessaires de façon urgente, et le reste à moyen terme. «Nous avons lancé des programmes de reconstruction (...) mais ce que nous avons accompli est inférieur à 1% de ce dont l'Irak a besoin», s'est alarmé Mustafa al-Hiti, président du fonds de reconstruction pour les zones touchées par les combats contre l'EI. «Plus de 138 000 maisons sont endommagées, dont la moitié sont complètement détruites», a-t-il souligné. Outre les destructions matérielles, l'Irak fait face à une grave crise humanitaire, avec 2,5 millions de déplacés. La conférence de Koweït doit ainsi permettre de financer leur retour «volontaire», estime le Haut Commissariat de l'ONU pour les Réfugiés (HCR). «Si les combats à grande échelle sont terminés (...), les stigmates demeurent dans tout le pays: les villes ont été durement endommagées, les communautés ont été disséminées et une génération d'enfants risque d'être perdue», a rappelé Bruno Geddo, représentant de cette organisation en Irak. L'Unicef et ONU-Habitat ont pour leur part appelé à des investissements urgents pour restaurer les infrastructures et les services de base à destination des familles irakiennes. «La violence (...) a détruit la vie de millions de personnes, laissant un enfant sur quatre dans la pauvreté», ont-elles insisté, alors que la moitié des écoles ont besoin de réparations et que plus de 3 millions d'enfants ont vu leur éducation interrompue. Dès hier, des ONG - en majorité koweïtiennes - ont annoncé une levée de fonds pour soutenir les opérations humanitaires de plus de 330 millions de dollars, dont 130 du Comité international de la Croix-Rouge. Aujourd'hui, la conférence fera une large place au secteur privé, tandis que le troisième jour sera consacré à l'annonce par les Etats participants du montant de leurs contributions financières. Avant de rejoindre le Koweït, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian est arrivé hier à Baghdad pour assurer les responsables irakiens du «soutien de la France». «Nous serons toujours au rendez-vous. Nous l'avons été dans la participation à la coalition (internationale antijihadistes), nous le serons aussi dans la phase de reconstruction», a affirmé le chef de la diplomatie française, qui participera aujourd'hui à une réunion de cette coalition au Koweït, en présence de son homologue américain Rex Tillerson.