L'affaire Krispal, scandale du siècle? Voire! En prenant fait et cause pour le Royaume-Uni sans autre forme de procès, Européens et Nord-Américains ont choisi d'emblée la solidarité au détriment de la vérité. De fait, l'ampleur dont a été investie cette affaire dépasse l'entendement, lui donnant un retentissement qu'elle n'aurait jamais dû avoir. En vérité, que savons-nous de cette affaire à part les allégations de Londres qui, jusqu'à ce jour, n'a apporté aucune justification - ou seulement début de preuve - à ses assertions. Or, voilà que l'actualité politique internationale s'avère dominée par la crise diplomatique induite par les retombées de cette affaire. La Grande-Bretagne est habituée à ce genre de duplicités et ce n'est pas pour rien qu'elle est surnommée la «perfide Albion». Les Britanniques restent égaux à leur détestable réputation. On dit souvent à qui profite le crime. Or, alors que Theresa May, l'actuelle Première ministre britannique, se trouvait il y a à peine un mois sur un siège éjectable - à cause de sa gestion erratique du Brexit, du scandale de la vente d'armes à l'Arabie saoudite en pleine guerre du Yémen, entre autres - a ainsi effectué un singulier rétablissement faisant d'elle une héroïne. Ce que fait Theresa May, entre en droite ligne de ce qu'a fait avant elle Tony Blair dans l'affaire des «armes de destruction massive» (ADM) attribuées à l'Irak. Une fois l'Irak détruit, les langues se sont déliées et au moins deux acteurs principaux de la guerre contre l'Irak, Tony Blair et l'ancien chef de la diplomatie des Etats-Unis, Colins Powell, ont admis que l'affaire était cousue de fil blanc, que tout n'était que mensonges. En sera-t-il ainsi, dans un an ou dix ans, de l'affaire de Salisbury, où l'on apprendra que cela a été un coup monté magistral? Or, il a été noté des anomalies dans cette affaire: comment à l'ère de l'Internet, de Facebook, Twtter etc où les images jouent un rôle de premier plan, aucune photo des Krispal ne soit disponible? N'est-ce pas étrange dans un monde où le «choc des photos» fait la différence? D'autre part, pourquoi ce black-out imposé par les autorités britanniques sur les Krispal, interdiction de visite, aucune information les concernant: sont-ils morts, vivants? L'autre anomalie est le refus de Londres à la participation de la Russie à l'examen de l'état de santé de l'ex-agent double et de sa fille. Plus encore: pourquoi Londres n'a-t-il pas nommé une commission internationale indépendante de médecins pour le cas échéant, confondre le (les) coupable(s)? Cela n'a pas été fait, et jusqu'à ce jour, il faut croire ce que dit Londres. Or, l'accusation contre la Russie aurait été plus fiable si elle avait été accompagnée de preuves tangibles, certes, mais aussi confortées par des parties indépendantes. Autre fait: pourquoi subitement Moscou décide-t-elle de «liquider» l'agent double, vivant dans un trou perdu en Angleterre, alors qu'elle ne l'a pas fait quand elle l'avait sous la main en Russie (il a été condamné à la prison pour trahison et libéré dans un échange d'espions avec les Etats-Unis)? Or, les Etats-Unis et une partie des pays de l'Union européenne - pas tous, il convient de le noter, qui continuent de douter de la véracité des faits tels que présentés - prenant pour argent comptant les assertions britanniques se sont empressés de sanctionner la Russie sur les seules allégations du Royaume-Uni. Une obligation de solidarité? Un pays comme la France, dont son président affirmait qu'aucune preuve n'étayait les accusations de Londres est revenu sur sa position pour assurer de sa «solidarité» la Grande-Bretagne. Ce pas de deux de Paris n'est guère innocent et sent l'intimidation, à tout le moins la manipulation. Ainsi, une partie des pays de l'UE a choisi l'obligation de solidarité au détriment de l'obligation de vérité. Et ce sont ces pays qui proclament haut et fort être les parangons de la défense des droits de l'homme. En fait, d'autres anomalies émaillent cette affaire qui ne peuvent être toutes citées ici. Il y en a au moins une qui semble assez grave pour susciter une toute autre prise en charge de l'affaire: l'emploi d'un agent chimique (le Novitchok, nous dit-on) comme l'assure Londres. A tout le moins cela aurait demandé l'expertise des experts au fait de la chose. Alors comment peut-on affirmer que c'est du «Novitchok» alors que personne n'est censé en connaître la formule et ses effets sur les victimes? Le pire est que, un mois après les faits, l'enquête n'est pas terminée et aucun fait confortant la position de Londres n'a été établi. Nous sommes encore dans les non-dits et dans le «croyez-nous» sur parole. C'est léger au regard de la dimension donnée à cette affaire qui a pris les allures d'une crise diplomatique mondiale. Un prétexte pour d'autres objectifs comme faire rentrer la Russie dans les rangs?