Les autorités locales ont fait un effort pour aménager la plage et rendre le séjour plus agréable. Si vous pensez qu'en escaladant le col d'El Fdjoudj qui culmine à 570 mètres d'altitude, tout près de la montagne de Houara, à partir duquel vous débutez la descente vers les plaines de Annaba, dite la perle de l'Est, vous allez atteindre rapidement la fraîcheur de la mer et échapper à la chaleur torride, augmentée par un sirocco qui a investi tôt la région, vous vous trompez. Celle-ci vous poursuit jusqu'à la côte et vous oblige à vous diriger directement vers la plage la plus éloignée pour chercher refuge. C'est-à-dire Aïn Achir, située au bout du cap. Nous survolons la façade maritime et la corniche longue d'une quinzaine de kilomètres, grouillant de monde, pour atteindre ce lieu, très prisé par les estivants en famille en quête de repos et des délices de la mer. Nous découvrons, émerveillés, les aménagements et les embellissements introduits tout au long de la côte, faisant d'elle l'une des plus belles du pays. Chaque plage vous attire pour vous y installer. Saint Cloud, Tauch, Le Belvédère qui gardent leurs appellations coloniales, malgré le temps, sont irrésistibles. Mais nous préférons Aïn Achir pour sa beauté, son éloignement, sa profondeur en mer, sa propreté et sa fraîcheur. Passez une journée par un temps de sirocco constitue un moment de refuge inoubliable et un délice inestimable. Nous avons vu juste. La corniche d'Annaba connaît de grandes transformations avec l'investissement touristique. Complexes touristiques, hôtels, restaurants et lieux de loisirs s'y installent. De grands travaux sont en cours, notamment pour construire une double voie tout au long de la corniche en joignant le cap au centre-ville et rendre la circulation plus fluide et agréable. Arrivés sur les lieux, nous constatons que la tempête de sirocco semblait être contenue par la brise de la mer qui lui oppose une résistance farouche. De même, l'approche du mont Edough avec ses 1 000 mètres d'altitude surplombant la mer contribue à stopper l'avancée du sirocco. Là sur nos têtes, vent chaud et brise de la mer mènent de front une lutte d'équilibre, au grand bonheur des estivants. La mer est calme et stable. Notre premier réflexe est de nous jeter rapidement à l'eau et d'y rester le plus longtemps possible. L'accueil est remarquable. L'état des lieux est plus accueillant et propre. Nous relevons que les autorités locales ont fait un effort pour aménager la plage et rendre le séjour plus agréable. Dès l'arrivée, des jeunes à l'afflût des automobilistes qui arrivent en famille, vous prennent en charge et vous sécurisent en affichant amabilité et disponibilité. Vous payez 50 DA pour le parc de stationnement et 50 autres pour la surveillance, et vous pouvez partir tranquille pour toute la journée. Vous acquiescez sans rechigner. Ce n'est pas fini. D'autres jeunes vous proposent leurs services : un parasol à 100 DA et des chaises à 50 DA l'unité. C'est parti. Qui dit mieux? Discrètement aussi, les équipes de la gendarmerie et de la Protection civile veillent sur la sécurité des estivants, venus essentiellement en famille. Ce qui vous tranquillise davantage. Lorsque le moment du déjeuner arrive, un restaurant surplombant la plage offre à ses clients des repas assez fournis et surtout bien cuisinés. L'état des lieux aménagés dans un site verdoyant couvert de feuillage, et surtout propre, ajoute aux délices de la cuisine annabie de circonstance. Le goût et la fraîcheur du lieu vous font oublier le prix à payer. Au demeurant pas cher du tout. A quatre, vous payez 1400 DA. Cela mérite la visite. Les estivants en famille viennent de loin, dont des Algérois en quête de repos et de découverte et aux grosses voitures connues aux immatriculations. Nous y restons jusqu'à ce que nous sentions que le sirocco est vaincu et chassé. C'est le moment que nous choisissons pour retourner en ville car visiter la perle de l'Est, la ville de Hassen El Annabi, sans une tournée en fin d'après-midi dans le centre et sa placette pour y goûter à ses glaces, n'a pas de sens. Là, un autre monde vous attend et vous livre une partie apparente des trésors et des secrets que cette perle garde jalousement. On ne peut pas ne pas se retenir d'avoir une pensée pour son chantre Si Hassen qui est pour elle ce qu'est El Fergani pour la ville des Rochers, El Anka et Dahmène El Harrachi pour Alger, Ouahbi pour Oran, Khlifi Ahmed pour le Sud. Ceux-là, à titre d'exemple. Il était si humble mais si original et si talentueux, et a laissé derrière lui des disciples qui font parler d'eux tels que Bennani et El Ayachi Hemdi. Dans le folklore, les chansons de Theldja traduisent toujours les sentiments profonds des masses et surtout de la condition féminine. Dans le style moderne, Warda est passée par là en gardant l'accent ronronnant, mielleux et typique à l'origine de son succès arabe et international. En tant que ville moderne avec son immense et riche plaine, la seconde après la Mitidja, mais beaucoup moins envahie, avec ses complexes, ses usines, ses stades, ses jardins, ses ouvertures routières, son université et ses écoles, Annaba, Hippone pour les Romains, Bona pour les Arabes et Bône pour les Français, demeure profondément attachée à son passé, plusieurs fois millénaire, à sa diversité et sa spécificité culturelle. C'est cet enracinement civilisationnel fait d'équilibre, de justesse et d'équité qui lui a permis de résister farouchement et jalousement aux poussées intégristes et déviationnistes de toutes sortes et d'être un rempart infranchissable contre les incursions terroristes. La basilique Saint- Augustin et la mosquée Mérouane, l'une des plus vieilles du pays, témoignent de la grandeur de ce passé. La ville dispose d'un théâtre très actif et de la fameuse et grandiose Maison de la culture dont le nom restera lié pour longtemps encore à l'assassinat, dans des conditions dramatiques, du président Boudiaf. Le destin a voulu que le père de la Révolution, au passé fabuleux, périsse ici. Mais ses idées, son militantisme, sa bravoure et sa loyauté, continueront à éclairer les générations futures. Aujourd'hui, elle veut oublier, tourner la page. Au moment où le processus de la réconciliation bat son plein, les paisibles Annabis sont les premiers à s'y inscrire. Ils s'attachent à la vie, à la paix, la sécurité et la convivialité. Aussi, c'est avec difficulté que nous quittons la perle de l'Est pour entamer le chemin du retour. Cette fois-ci par la corniche Jijel-Béjaïa, avec un léger arrêt dans la ville des Rochers et le barrage de Bou Haroun, où l'on n'a pas encore tout vu. Histoire de découvrir une autre facette du pays.