Une vue des travaux «Nous sommes en bonne voie...même s'il reste beaucoup à faire» serait la conclusion incongrue de cette matinée qui a vu la contribution de plusieurs acteurs importants dans le domaine audiovisuel, notamment en Afrique. Les travaux du Congrès annuel des auteurs de l'audiovisuel, membres de la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs (Cisac, organisatrice de cet évènement), se sont ouverts hier matin à l'hôtel Sofitel d' Alger. Coordonnée par l'Office national des droits d'auteur et droits voisins (Onda), membre de la Cisac, cette rencontre qui se poursuivra aujourdhui verra la participation d'une centaine d'auteurs et artistes, issus d'une trentaine de pays aux côtés du vice-président de la Cisac, Marcelo Pineyro. Des experts et représentants de sociétés de droits d'auteurs, membres de la Cisac, devront évoquer lors de cette rencontre la situation des droits d'auteur de l'audiovisuel en Afrique. Les ministres de la Culture, Azzedine Mihoubi, de la Communication Djamel Kaouane et de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Tahar Hadjar, étaient présents à l'ouverture de cette rencontre annuelle qu'abrite l'Algérie pour la première fois. Dans leurs allocutions d'ouverture, le ministre de la Culture Azzedine Mihoubi mais aussi le directeur de l'Onda, Samy Bencheikh El Hocine ont insisté sur l'importance de cette rencontre que l'Algérie accueille en vue de l'amélioration et le renforcement des droits d'auteur dans le continent africain. «C'est un évènement unique en son genre car c'est la première fois que l'Algérie abrite ce congrès. C'est la preuve de la confiance qu'on donne à notre pays car elle a beaucoup donné en matière de droits d'auteur. L'Algérie est devenu un modèle à suivre dans ce sens au niveau arabe et africain. Nous sommes en contact permanent avec les organisations internationales qui oeuvrent dans ce domaine, c'est pourquoi ce congrès a été organisé ici et je pense qu'il contribuera à améliorer le climat des droits d'auteur en Algérie et en Afrique.» Et de s'interroger: «Le souci est comment inclure l'Algérie dans l'organisation mondiale des droits d'auteur avec les bons mécanismes qu'il faut? L'Onda est à juste titre en avant-garde de cette opération. On est content que plus de 36 pays soient présents qui sont là pour évoquer leur expérience a fortiori dans le monde de la révolution numérique dans lequel nous vivons actuellement. Il faut impérativement mettre en place des lois pour gérer toutes ces sociétés telles Google et trouver les formules pour traiter avec elles et procéder à la protection des droits d'auteur car c'est le dû de l'artiste qui est en jeu.» En effet créer une confiance nécessaire pour travailler ensemble en mettant en place des politiques communes en unissant les efforts de tout un chacun est ce qui s'est dégagé comme idée principale lors de cette matinée à l'ouverture des travaux du congrès dont d'aucuns parleront de «lutte à mener» pour contrer le piratage sans le nommer et surtout de débattre avec les responsables des fournisseurs de service numérique pour rémunérer les auteurs audiovisuels. Samuel Sangwa, le directeur de la Cisac dans la région Afrique, entamera sa conférence en faisant savoir que la Sisac a 37 membres en Afrique, mais seulement 10 oeuvrent pour la protection des droits d'auteur audiovisuels. Deux nouveaux, un du Ghana et un autre du Nigeria viennent d'y adhérer récemment. Le statut de ces sociétés diffère l'une de l'autre. Certaines sont publiques, privées ou appartiennent à des organismes gouvernementaux comme c'est le cas avec l'Onda. «Ce qui est un avantage car le soutien se veut plus efficace. Mais il peut y avoir une certaine interférence quand les créateurs ne sont pas assez représentatifs, où l'état d'esprit fonctionnaire risque de primer.» En termes de rémunération nous apprenons que les deux pays qui se targuent d'avoir fait de meilleurs chiffres sont l'Afrique du Sud avec 67 millions d'euros et l'Algérie avec 32 millions, mais «cela ne représente que 0,7% pour l'Afrique en termes de rémunération. Ce qui est très peu» et d'ajouter: «Il y a de plus en plus de prise de conscience de la part des décideurs. Nous sommes en bonne voie. En Afrique la musique c'est le moteur essentiel. Il faut renforcer l'audiovisuel. Le meilleur pays reste la société algérienne pour la copie privée. Il existe une nouvelle génération qui travaille avec le numérique et ne connaît pas ses droits. En Afrique seuls quatre pays possèdent la législation et les mécanismes pour la perception des droits d'auteur. Il y a une demande plus forte de la part des sociétés qui gèrent l'industrie musicale. Il faut des lobbyings très forts pour inciter à la protection des copies privées dans le domaine audiovisuel. Il faut subventionner les jeunes auteurs. Les auteurs doivent aussi se mobiliser et s'engager avec le soutien du gouvernement. Nous avons besoin de synergies et de ressources extérieures pour mettre en place ces mécanismes», a conclu Sangwa. Dans sa communication intitulée à juste titre «cinéma entre passé et futur» Ahmed Bedjaoui dira que «ce n'est pas un hasard si le cinéma algérien est né en 1957 car les armes ne suffisaient pas. Le cinéma a été la lumière qui a accompagné l'émancipation des sociétés, notamment africaines. La télévision est devenue un média majeur dans la communication dans les années 1960 afin d'atteindre le coeur de l'opinion publique. Bien qu'aujourd'hui on enregistre des retards accumulés dans les droits d'auteur, Bedjaoui a tenu à rendre hommage à l'Onda même si ajoute-t-il «beaucoup de choses restent à faire dans le domaine de l'audiovisuel qui connaît des changements. L'Afrique entière a besoin d'un secteur audiovisuel très fort car l'image d'un pays ce n'est pas ce que le pays peut créer, mais ce sont les images créées qui peuvent refléter ce pays. Il est légitime de défendre les droits d'auteur car ce n'est pas normal qu'un film algérien passe à la télé sans qu'il y ait de retour. Nous ne sommes pas en train d'inventer le couteau qui coupe le beurre» et de renchérir: «C'est frustrant aujourd'hui cette envie de devoir lutter pour revenir à l'âge d'or du cinéma algérien, celui du passé alors qu'on doit oeuvrer pour son avenir. Il faut surveiller cette catastrophe des films dupliqués sans autorisation...» Estimant qu'il existe un public qui fréquente les salles de cinéma en Algérie, Bedjaoui proposera de revenir à l'action d'autrefois celle de prélever des taxes sur les entrées, mais aussi de mettre en place des multiplexes. «Pour les droits d'auteur, des mécanismes sont en train d'être mis en place. Ce n'est pas propre à l'Algérie. La production dépend des financements de l'extérieur, alors qu'on peut rétablir un marché, il suffit aussi de rénover les salles et les donner à la gestion des professionnels.» Pour la représentante de l'Onda, le souci aujour d'hui qui se pose est comment faire pour que les ayants droit aient leurs redevances sans passer par d'autres sociétés. Un défi que l'Onda est en train de mener actuellement via des opérations de sensibilisations auprès des artistes algériens, notamment installés en France. Pour rappel «Le dernier congrès s'est tenu à Venise et cette année, ils ont décidé de l'organiser en Algérie, avec l'objectif de développer le droit d'auteur et de développer les droits de rémunérations pour les auteurs de l'audiovisuel et du cinéma, en Afrique, la législation de notre pays reconnaît ces droits contrairement aux autres pays africains. L'Algérie fait partie des 18 membres administrateurs de la Cisac, qui compte 290 sociétés dans le monde Et l'Onda, a été élue pour représenter les pays africains et les pays arabes. La loi algérienne sur les droits d'auteurs reconnaît ce régime de droit pour lequel nous travaillons aujourd'hui», a fait savoir hier Samy Bencheikh El Hocine directeur général de l'Onda à l'ouverture de ce congrès.