Les grandes soirées sont de retour à Tizi Ouzou Il faut d'abord patienter au moins vingt minutes pour accéder à la ville de Tizi Ouzou par son entrée ouest. Des centaines de véhicules, transportant des jeunes ou des familles, se dirigent simultanément vers la ville de Tizi Ouzou en cette soirée de Ramadhan. Il est 22 heures quand nous arrivons à proximité du carrefour Matoub-Lounès. La stèle érigée à la mémoire du Rebelle est complètement détériorée. Pour l'instant, on ne songe pas à la restaurer. En fait, qui devrait s'en préoccuper? Pourtant, c'est ici le point de convergence de la majorité des visiteurs nocturnes de la ville des Genêts. La placette publique Mbarek-Aït Menguellet, du nom de l'un des pionniers du combat pour l'identité amazighe, est devenue un immense manège où les enfants se disputent la première place en dépit des prix qui ne sont pas du tout attractifs. Sur place, on vous propose un ticket à quatre jeux à 300 DA ou un ticket à un seul jeu à 100 DA. Avec trois enfants sur les bras, on devine aisément quelle somme on devrait laisser sur place pour faire plaisir à sa progéniture. Mais en ce mois de Ramadhan, des sacrifices s'imposent. C'est pourquoi, cet espace dédié en grande partie aux enfants et aux familles ne désemplit pas, pratiquement dès 21 h 30. Une partie de l'espace qui est l'ancienne gare routière de Tizi Ouzou fait office de terrasses de café familiaux. Ici aussi, pour trouver une table libre, il faut courir. Pourtant, les terrasses ont été renforcées par des dizaines d'autres tables en prévision de Ramadhan. De l'autre côté de la chaussée, la place de l'Olivier est également transformée en un immense espace de détente et de consommation de toutes sortes de boissons fraîches ou chaudes. Le boulevard Larbi-Ben Mhidi, qui relie la place de l'ancienne gare routière au théâtre régional Kateb-Yacine et au siège de la mairie, est envahi tout le long et des deux côtés. Les trottoirs sont noirs de monde. On marche dans les deux sens. Parfois, il faut s'arrêter quelques secondes, le temps que la «circulation humaine» se relâche. A proximité du théâtre régional, les derniers bambins, accompagnés de leurs parents, pressent le pas pour assister aux spectacles enfantins du jour. Chaque soir le théâtre régional propose des pièces de théâtre ou de magie, principalement aux enfants. C'est désormais la ruée sur cet espace culturel surtout quand le rendez-vous est donné aux enfants. Les adultes en sont moins friands, a-t-on constaté. Au niveau du rond-point principal de la ville de Tizi Ouzou, nous sommes surpris par ces enfants, le torse nu, qui n'hésitent pas à se lancer à corps perdu dans des plongeons à l'intérieur même du bassin du jet d'eau. Pour se rafraîchir, toutes les eaux sont bonnes, croient ces enfants, qui ont échappé sans doute à la vigilance parentale. Le boulevard Abane-Ramdane, appelé communément la Grande-Rue, n'échappe pas à la règle. Tout s'y vend désormais. On n'arrête pas de manger en ces soirées de Ramadhan. En voyant ces montagnes de brochettes de viande, de foie et d'escalope un peu partout, on devine que l'heure est loin d'être aux sacrifices et à l'abstinence. Les vendeurs de jouets n'ont pas attendu le dernier quart d'heure avant l'Aïd pour étaler leurs marchandises. Certains jouets proposés coûtent parfois les yeux de la tête. Mais les gens achètent quand même. C'est à se demander s'il y a vraiment une austérité quelque part comme on ne cesse de le ressasser. A moins que certains ne soient pas concernés. Auquel cas, ils sont fort nombreux. D'ailleurs, jusqu'au deuxième rond-point de la ville de Tizi Ouzou, il n' y a pas un mètre carré libre sur les trottoirs. La salle de spectacle de la Maison de la culture Mouloud-Mammeri, où a chanté la diva Nouara jeudi dernier, est pleine à craquer, nous avertit d'emblée avec son amabilité habituelle le fonctionnaire de la Maison de la culture posté à l'entrée de la salle, en nous ouvrant la porte. A l'intérieur, nous découvrons effectivement une salle pleine comme un oeuf. C'est la première soirée et il y en aura tous les jours jusqu'au 13 juin prochain dans le même espace. On annonce de grandes vedettes comme Brahim Tayeb, Yasmina, Ali Meziane, Ali Ferhati, Rabah Lani, Rabah Asma... Quand nous quittons la Maison de la culture à la fin de la prestation de Nouara, aux environs de minuit trente, le centre-ville de Tizi Ouzou grouille encore de monde. Les gens se déplacent en toute quiétude. La chaleur de ce soir a encouragé une telle ruée sur le chef-lieu de wilaya après un début timide des premiers jours où il a même plu et fait froid. Mais quand la température monte, la première idée qui vient en tête, c'est d'aller cueillir la fraîcheur dehors. Surtout que les soirées de Ramadhan s'y prêtent parfaitement. A demain donc, c'est déjà l'heure du «s'hour».