Une guerre commerciale que l'UE redoute Une guerre commerciale menace d'éclater entre les chantres du libre-échange en raison des contradictions qui minent l'ordre économique mondial. Décidément, la Mecque du capitalisme mondial perd ses repères et sa mécanique s'enraye au risque de s'arrêter définitivement. Après la fin du bloc soviétique, le parachèvement de l'internationalisation de l'économie de marché et les changements prochains que connaîtra la dernière citadelle non capitaliste, en l'occurrence la Corée du Nord, le chantre du libre-échange et de la liberté d'entreprendre se rebiffe et semble remettre en cause les principes fondateurs du capitalisme qui ont motivé l'attitude va-t-en-guerre de l'Oncle Sam, son hégémonie et sa suprématie militaire mises au service de l'expansion du modèle américain depuis au moins le début du vingtième siècle. Ainsi donc, les tensions entre les alliés stratégiques occidentaux ne semblent pas connaître une détente puisque la Maison- Blanche est allée jusqu'au bout de son entêtement et décide finalement d'imposer l'acier et l'aluminium importés d'Europe. L'Union européenne ne peut pas rester sans réagir. Ce qu'ils (les Etats-Unis) peuvent faire, nous sommes capables de faire exactement la même chose», a affirmé M. Juncker, lors d'une conférence à Bruxelles. «Les Etats-Unis ne nous laissent pas d'autres choix que de porter ce conflit devant l'OMC et d'imposer des droits de douane supplémentaires à un nombre de produits en provenance des Etats-Unis», a expliqué M. Juncker, cité dans un communiqué. La saisine de l'OMC comme institution d'arbitrage des conflits commerciaux devait être lancée hier, précise le communiqué de la Commission, mais la procédure en elle-même pourrait prendre des années avant d'aboutir à un verdict. La Commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a rappelé, dans le même communiqué, que «nous (l'UE) avons fait tout ce que nous avons pu pour éviter ceci» soulignant qu'elle avait parlé ces derniers mois en de multiples occasions au secrétaire américain au Commerce Wilbur Ross. De son côté, le président français, Emmanuel Macron, a «déploré» jeudi dernier, l'application par les Etats-Unis d'importants tarifs douaniers sur l'acier et l'aluminium importés de l'Union européenne, la qualifiant d'«illégale» et d'«erreur». Le président français a indiqué à des journalistes qu'il s'entretiendrait «dans la soirée» avec son homologue américain Donald Trump. «Je déplore la décision américaine» et «nous aurons une position européenne à prendre», celle qui «consiste à s'inscrire dans le droit international», a déclaré Emmanuel Macron. «Cette décision n'est pas conforme au droit commercial international (...), donc elle est illégale», a-t-il ajouté. «Je pense que cette décision est une erreur à plusieurs égards (...) car elle répond à des déséquilibres internationaux qui existent de la pire manière, c'est-à-dire en fragmentant et en faisant du nationalisme économique. Et le nationalisme, c'est la guerre (...) C'est exactement ce qui s'est passé dans les années 30», a-t-il lâché. La déclaration du président français se réfère au droit international qui est pourtant bafoué par les alliés occidentaux chaque fois que leurs intérêts communautaires ou nationaux sont en jeu. La question palestinienne qui traîne depuis 1948 en raison du parti pris de l'Occident en faveur d'une puissance coloniale et d'agressions répétées contre les peuples de la région, notamment le Liban et la Syrie. L'occupation illégale depuis juin 1967, du plateau du Golan sans que les puissances occidentales dont trois sont membres permanents du Conseil de sécurité, ne se décident à faire respecter le droit international en la matière. L'invasion de l'Irak, de la Libye, l'ingérence criminelle en Syrie, le soutien du génocide contre le peuple du Yémen, le problème du Sahara occidental...ne constituent-ils pas autant d'entorse manifestes au droit international formulées et imposées au reste du monde par le même Occident dont une partie crie aujourd'hui «au loup», parce que ses intérêts sont menacés? L'ordre économique mondial tout autant que ses règles et la morale qui lui sert d'alibi, ont atteint leur limite et, à ce titre ne peuvent plus garantir la stabilité des relations internationales, encore moins la paix à travers le monde puisque c'est pour accaparer les richesses des peuples faibles et plus de marchés, que les guerres sont entretenues et alimentées par les lobbies d'intérêts financiers qui tirent les ficelles de ce désordre programmé. Une certitude est pourtant à noter: les loups se disputent une proie, mais ne se mangent pas entre eux. Il s'agit là d'une surenchère entre alliés stratégiques qui finiront par s'entendre et revenir au compromis historique qui les unit contre un ennemi réel ou supposé. Bientôt le G7 aura un conclave au Canada. Ce sera l'occasion d'enterrer la hache de guerre quitte à s'inventer un ennemi de circonstance pour seller de nouveau, l'union sacrée de l'Occident et des capitalistes.